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XI

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Table des matières

Quoi qu’il en soit, c’est dans un but d’utilité que nous retracerons l’histoire fidèle de ces grands coupables; nous en emprunterons les détails aux débats devant la Cour des pairs, aux précédents juridiques des condamnés, aux entretiens que nous avons eus avec eux, lesquels, je n’ai pas besoin de le répéter, n’avaient rien de confidentiel; nous ferons connaître les fausses idées sous l’influence desquelles ils ont agi; nous reproduirons les faux raisonnements par lesquels ils cherchaient à se justifier en se trompant eux-mêmes; et l’on se convaincra, avec effroi, qu’il suffit d’une fausse idée pour produire tous les genres de fanatismes, et pour faire souvent d’un homme un monstre.

On verra, dans la plupart de ces criminels, une instruction incomplète, incohérente, pire peut-être que l’ignorance. En effet, c’est une parcelle de vérité, jointe à l’erreur, qui fait la force de celle-ci et qui la rend si dangereuse. On remarquera surtout chez eux l’absence ou l’oubli des enseignements religieux, qui seuls nous donnent des notions exactes du bien et du mal. Aussi, dans leurs conversations, les mois comme les principes étaient dénaturés; toutes les expressions qui appartiennent à l’ordre moral étaient détournées de leur signification véritable: devoir, vertu, patrie, liberté..... Y a-t-il rien au monde de plus simple, de plus intelligible, et, en même temps, de plus beau, de plus auguste? Dans leur bouche, comme dans leur esprit, toutes ces dénominations et les idées qu’elles expriment, indignement profanées, perdaient leur sens primitif. A les entendre, l’attentat politique qu’on leur imputait ne pouvait être un crime! c’était, de leur part, un devoir, un acte patriotique et courageux, dont il leur était permis de se glorifier, comme si un tel attentat politique ne présentait pas une criminalité plus grande que tout autre, et dans son objet, et dans ses suites, pouvant amener les plus grands désastres, l’ébranlement et la ruine de l’État; comme s’il suffisait de faire d’avance le sacrifice de sa vie pour avoir le droit d’attenter à celle du souverain; comme si l’audace et l’atrocité du crime pouvaient jamais devenir de l’héroïsme; comme si l’arme infâme de l’assassinat n’était pas l’arme la plus antisociale, et dès lors la plus antifrançaise.

Notre récit, où l’on chercherait vainement la moindre intention politique, encore une fois, n’est que le résumé des notes que, jour par jour, nous avons soigneusement recueillies. Jamais nous ne nous sommes écarté de la plus scrupuleuse exactitude, même dans l’intention de procurer un plus grand bien, qu’on ne saurait jamais acheter aux dépens de la vérité. Nous nous sommes donc fait un devoir d’éviter avec soin le exagérations et les mensonges de convention au profit de je ne sais quelle moralité équivoque; la moralité profitable ne se trouve que dans la vérité des faits et la sincérité des appréciations.

Nous avons représenté ces hommes sous leurs traits véritables, tels, du moins, qu’ils nous ont apparu; si leur individualité ne semble pas de tous points odieuse, on n’en aura que plus d’horreur pour ces doctrines décevantes qui les ont perdus. Quel enseignement plus utile et plus grave! puisse-t-il faire comprendre à quels excès criminels peuvent entraîner l’oubli des vrais principes et des pratiques de la religion, l’aveuglement des passions, le fanatisme politique, la démence d’une fausse idée; puisse-t-il, surtout, prévenir à jamais le retour de ces excès et de ces crimes!

La prison du Luxembourg sous le règne de Louis-Philippe: Impressions et souvenirs

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