Читать книгу Œuvres de Napoléon Bonaparte (Tome I-V) - Napoleon Bonaparte - Страница 61

Оглавление

Au quartier-général à Trieste, le 11 floréal an 5 (30 avril 1797).

Au directoire exécutif.

Il m'aurait fallu trois mois pour dégrader les moles du port de Trieste, encore ne l'aurais-je pas détruit, car ce port n'est simplement qu'une rade.

Mantoue n'est pas fort par l'art, mais seulement par sa position; il n'y a rien ou peu de chose à détruire, et que les ennemis auraient rétabli en peu de temps et avec très-peu de travail.

Ayant un équipage de siège en Italie, nous prendrons Mantoue, tant que nous voudrons, dans vingt jours de tranchée. Lorsque Wurmser m'obligea à en lever le siège, nous étions aux batteries de brèche et sur le point d'y entrer. Pendant le blocus, nous avons, avec sept mille hommes, bloqué vingt mille hommes: vous voyez donc que cette place n'est pas aussi essentielle qu'on se l'imagine; mais j'avais un seul avantage, c'est que l'équipage de siège de l'ennemi était fort loin, et que je comptais mettre dedans la ville deux ou trois mille Français, et le reste des Italiens: ce qui, avec les nouveaux ouvrages que j'avais fait faire, me faisait espérer de tenir en échec une armée autrichienne.

D'après le nouvel ordre de choses, nous aurions donc pour frontières l'Oglio et un rang de places fortes, telles que Pizzighitone, Crema et Bergame.

Pizzighitone vaut mieux que Mantoue.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Trieste, le 11 floréal an 5 (30 avril 1797).

Au directoire exécutif.

Je ne suis pas étonné que l'on ait fait courir le bruit que nous avons été battus dans le Tyrol: il n'a jamais entré dans mon projet de percer par deux endroits à la fois, ce qui m'aurait obligé de garder deux communications au lieu d'une.

J'ai dû percer par le Tyrol et par la Carinthie, parce qu'il fallait que, jusqu'à ce que l'offensive fût décidément à notre avantage, être en état de la soutenir; parce qu'il fallait empêcher l'ennemi de nous couper: mais lorsque j'ai été à Clagenfurth et à Freysach, que l'offensive a été déterminée, j'ai voulu sur-le-champ porter toutes mes forces à ma droite et refuser constamment ma gauche, qui était suffisamment assurée par le camp retranché de Castel-Novo, de Peschiera et de Mantoue. Pendant ce temps-là, toutes mes forces étant concentrées sur ma droite, j'aurais marché à Salzbourg; l'ennemi eût été obligé d'évacuer Inspruck; de là j'aurais traversé les gorges de l'Inn et marché dans la Bavière. J'aurais auparavant levé des contributions sur le faubourg de Vienne.

Ce plan a totalement manqué par l'inaction de l'armée du Rhin. Si Moreau avait voulu marcher, nous eussions fait la campagne la plus étonnante, et bouleversé la situation de l'Europe. Au lieu de cela, il s'est rendu à Paris, n'a voulu rien faire; et quand j'ai vu par vos lettres mêmes que vous n'aviez d'autre espérance qu'en faisant mouvoir Hoche seul, j'ai cru la campagne perdue, et je n'ai pas douté que nous ne fussions battus les uns après les autres.

Quant à moi, je me suis jeté sans aucune espèce de considération au milieu de l'Allemagne; j'ai fait plus de vingt-quatre mille prisonniers, obligé l'empereur d'évacuer Vienne, et j'ai fait conclure la paix à mon quartier-général. Les conditions de cette paix sans doute sont avantageuses à la France et a l'empereur: c'est ce qui fait sa bonté. Elle nous ôte l'influence de la Prusse, et nous met à même de tenir la balance dans l'Europe.

Il est vrai que cette paix n'a pas été comme celle du Pape et du roi de Sardaigne; mais c'est que l'empereur est aussi puissant que nous, qu'on se levait de tous côtés en masse, et que partout, en Hongrie et dans le Tyrol, on était sous les armes, qu'il ne restait rien à faire, puisque Vienne était évacuée par la maison impériale, et qu'en portant la guerre dans la Bavière, j'aurais été tout seul. C'était améliorer la situation de l'empereur, que de rester sans rien faire dans les positions que j'occupais, puisque cela mettait ses états dans une tension énergique, qui lui aurait donné, dans vingt jours, une foule de combattans. Nous nous sommes bien conduits en Allemagne, mais l'armée du Rhin s'était mal conduite l'année dernière; l'impression qu'elle avait faite durait encore, de sorte que la manière dont nous nous conduisions n'avait pas le temps d'arriver jusqu'aux différens peuples prévenus.

La paix, au contraire, a remis tout en Allemagne dans l'état naturel. En évacuant ce pays, je garde véritablement tout ce que j'avais pris, en conservant la Ponteba et les hauteurs de la Carinthie, qui, dans une marche, me mettent en Allemagne, et j'ôte aux peuples de la Hongrie, de l'Autriche et de Venise les raisons de s'armer et de se croire en danger. Si les hostilités doivent recommencer, il faut, avant tout, prendre un parti pour Venise: sans quoi, il me faudrait une armée pour les contenir. Je sais que le seul parti qu'on puisse prendre, c'est de détruire ce gouvernement atroce et sanguinaire: par ce moyen nous tirerons des secours de toute espèce d'un pays que, sans cela, il faudra garder plus que le pays ennemi.

Il est impossible de prendre plus de précautions que je n'en ai pris contre les Vénitiens, dont je connais la profonde duplicité. Je suis maître de toutes leurs forteresses, et à l'heure où vous lirez cette lettre, je le serai tellement de toute la terre-ferme, qu'il n'y aura d'autre chose à faire que de prendre un parti.

Pendant l'armistice, il y a eu une escarmouche fort vive entre le chef de brigade Dagobert et la levée en masse de la Croatie.

Les ennemis étaient parvenus à Trente, que je n'ai jamais gardé sérieusement, parce que, par sa position, il est hors du système de la guerre; mais tout a été rétabli dans l'état ordinaire.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Palma-Nova, le 12 floréal an 5 (1er mai 1797).

Au directoire exécutif.

Je reçois à l'instant des nouvelles de la république cispadane. Les choix ont été fort mauvais. Les prêtres ont influencé toutes les élections, des cardinaux et des évêques sont venus exprès de Rome pour diriger les choix du peuple; ils voient bien que leur salut ne dépend plus que de leur influence dans le corps législatif.

La république cispadane, comme la Lombardie, a besoin d'un gouvernement provisoire pendant trois ou quatre ans, pendant lesquels on cherchera à diminuer l'influence des prêtres: sans quoi, vous n'auriez rien fait en leur donnant la liberté. Dans les villages, ils dictent des listes et influencent toutes les élections; mais, conformément à vos ordres et aux traités, je vais commencer par réunir sous un même gouvernement provisoire la Lombardie et la Cispadane: après quoi, je prendrai les mesures qui se concilient avec leurs moeurs, pour y diminuer l'influence des prêtres et éclairer l'opinion.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Palma-Nova, le 13 floréal an 5 (2 mai 1797).

Au chef de l'état-major.

Je vous fais passer, citoyen général, un manifeste relatif aux Vénitiens; vous voudrez bien faire en sorte qu'il y en ait mille exemplaires imprimés dans la nuit: vous en enverrez une copie à la congrégation de Milan, pour qu'elle le fasse traduire en italien et qu'elle le fasse imprimer et répandre partout.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Palma-Nova, le 15 floréal an 5 (2 mai 1797).

Bonaparte, général en chef de l'armée d'Italie.

MANIFESTE.

Pendant que l'armée française est engagée dans les gorges de la Styrie et laisse loin derrière elle l'Italie et les principaux établissemens de l'armée, où il ne reste qu'un petit nombre de bataillons, voici la conduite que tient le gouvernement de Venise:

1°. Il profite de la semaine sainte pour armer quarante mille paysans, y joint dix régimens d'Esclavons, les organise en différens corps d'armée et les poste aux différens points, pour intercepter toute communication entre l'armée et ses derrières.

2°. Des commissaires extraordinaires, des fusils, des munitions de toute espèce, une grande quantité de canons sortent de Venise même pour achever l'organisation des différens corps d'armée.

3°. On fait arrêter en terre-ferme ceux qui nous ont accueillis; on comble de bienfaits et de toute la confiance du gouvernement tous ceux en qui on connaît une haine furibonde contre le nom français, et spécialement les quatorze conspirateurs de Verone que le provéditeur Prioli avait fait arrêter il y a trois mois, comme ayant médité l'égorgement des Français.

4°. Sur les places, dans les cafés et autres lieux publics de Venise, on insulte et on accable de mauvais traitemens tous les Français, les dénommant du nom injurieux de jacobins, de régicides, d'athées: les Français doivent sortir de Venise, et peu après il leur est même défendu d'y entrer.

5°. On ordonne au peuple de Padoue, de Vicence, de Verone, de courir aux armes, de seconder les différens corps d'armée et de commencer enfin ces nouvelles Vêpres siciliennes. Il appartient au Lion de Saint-Marc, disent les officiers vénitiens, de vérifier le proverbe, que l'Italie est le tombeau des Français.

6°. Les prêtres en chaire prêchent la croisade, et les prêtres, dans l'état de Venise, ne disent jamais que ce que veut le gouvernement. Des pamphlets, des proclamations perfides, des lettres anonymes sont imprimés dans les différentes villes et commencent à faire fermenter toutes les têtes; et dans un état où la liberté de la presse n'est pas permise, dans un gouvernement aussi craint que secrètement abhorré, les imprimeurs n'impriment, les auteurs ne composent que ce que veut le sénat.

7°. Tout sourit d'abord aux projets perfides du gouvernement; le sang français coule de toutes parts; sur toutes les routes on intercepte nos convois, nos courriers et tout ce qui tient à l'armée.

8°. À Padoue, un chef de bataillon et deux autres Français sont assassinés. À Castiglione de Mori, nos soldats sont désarmés et assassinés. Sur toutes les grandes routes de Mantoue à Legnago, de Cassano à Verone, nous avons plus de deux cents hommes assassinés.

9°. Deux bataillons français, voulant rejoindre l'armée, rencontrent à Chiari une division de l'armée vénitienne, qui veut s'opposer à leur passage; un combat s'engage et nos braves soldats se font passage en mettant en déroute ces perfides ennemis.

10°. À Valeggio il y a un autre combat; à Dezenzano, il faut encore se battre: les Français sont partout peu nombreux; mais ils savent bien qu'on ne compte pas le nombre des bataillons ennemis lorsqu'ils ne sont composés que d'assassins.

11°. La seconde fête de Pâques, au son de la cloche, tous les Français sont assassinés dans Verone. On ne respecte ni les malades dans les hôpitaux, ni ceux qui, en convalescence, se promènent dans les rues, et qui sont jetés dans l'Adige, ou meurent percés de mille coups de stylet: plus de quatre cents Français sont assassinés.

12°. Pendant huit jours, l'armée vénitienne assiège les trois châteaux de Verone: les canons qu'ils mettent en batterie leur sont enlevés à la baïonnette; le feu est mis dans la ville, et la colonne mobile qui arrive sur ces entrefaites, met ces lâches dans une déroute complète, en faisant trois mille hommes de troupe de ligne prisonniers, parmi lesquels plusieurs généraux vénitiens.

13°. La maison du consul français de Zante est brûlée dans la Dalmatie.

14°. Un vaisseau de guerre vénitien prend sous sa protection un convoi autrichien, et tire plusieurs boulets contre la corvette la Brune.

15° Le Libérateur de l'Italie, bâtiment de la république, ne portant que trois à quatre petites pièces de canon, et n'ayant que quarante hommes d'équipage, est coulé à fond dans le port même de Venise et par les ordres du sénat. Le jeune et intéressant Laugier, lieutenant de vaisseau, commandant ce bâtiment, dès qu'il se voit attaqué par le feu du fort et de la galère amirale, n'étant éloigné de l'un et de l'autre que d'une portée de pistolet, ordonne à son équipage de se mettre à fond de cale: lui seul, il monte sur le tillac au milieu d'une grêle de mitraille, et cherche, par ses discours, à désarmer la fureur de ces assassins, mais il tombe roide mort; son équipage se jette à la nage et est poursuivi par six chaloupes montées par des troupes soldées par la république de Venise, qui tuent à coups de hache plusieurs de ceux qui cherchaient leur salut dans la haute-mer. Un contre-maître, blessé de plusieurs coups, affaibli, faisant sang de tous côtés, a le bonheur de prendre terre à un morceau de bois touchant au château du port; mais le commandant lui-même lui coupe le poignet d'un coup de hache.

Vu les griefs ci-dessus, et autorisé par le titre 12, art. 328 de la constitution de la république, et vu l'urgence des circonstances:

Le général en chef requiert le ministre de France près la république de Venise de sortir de ladite ville; ordonne aux différens agens de la république de Venise dans la Lombardie et dans la terre-ferme vénitienne de l'évacuer sous vingt-quatre heures.

Ordonne aux différens généraux de division de traiter en ennemi les troupes de la république de Venise, de faire abattre dans toutes les villes de la terre-ferme le Lion de Saint-Marc. Chacun recevra, à l'ordre du jour de demain, une instruction particulière pour les opérations militaires ultérieures.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Palma-Nova, le 14 floréal an 5 (3 mai 1797).

Au directoire exécutif.

Je reçois dans l'instant des nouvelles de Verone. Je vous envoie les rapports du général de division Balland, du général Kilmaine et du chef de brigade Beaupoil. Dès l'instant que j'eus passé les gorges de la Carinthie, les Vénitiens crurent que j'étais enfourné en Allemagne, et ce lâche gouvernement médita des Vêpres siciliennes. Dans la ville de Venise et dans toute la terre-ferme on courut aux armes. Le sénat exhorta les prédicateurs, déjà assez portés par eux-mêmes à prêcher la croisade contre nous. Une nuée d'Esclavons, une grande quantité de canons, et plus de cent cinquante mille fusils furent envoyés dans la terre-ferme; des commissaires extraordinaires, avec de l'argent, furent envoyés de tous côtés pour enrégimenter les paysans. Cependant M. Pezaro, sage grand, me fut envoyé à Goritzia, afin de chercher à me donner le change sur tous ces armemens. J'avais des raisons de me méfier de leur atroce politique, que j'avais assez appris à connaître; je déclarai que si cet armement n'avait pour but que de faire rentrer des villes dans l'ordre, il pouvait cesser, parce que je me chargeais de faire rentrer les villes dans l'ordre, moyennant qu'ils me demanderaient la médiation de la république: il me promit tout, et ne tint rien. Il resta à Goritzia et à Udine assez de temps pour être persuadé par lui-même que j'étais passé en Allemagne, et que les marches rapides que je faisais tous les jours donneraient le temps d'exécuter les projets qu'on avait en vue.

Le 30 germinal, des corps de troupes vénitiennes considérables, augmentés par une grande quantité de paysans, interceptèrent les communications de Verone à Porto-Legnago. Plusieurs de mes courriers furent sur-le-champ égorgés et les dépêches portées à Venise. Plus de deux mille hommes furent arrêtés dans différentes villes de la terre-ferme et précipités sous les plombs de Saint-Marc: c'étaient tous ceux que la farouche jalousie des inquisiteurs soupçonnait de nous être favorables. Ils défendirent à Venise que le canal où ils ont coutume de noyer les criminels fût nettoyé. Eh! qui peut calculer le nombre des Vénitiens que ces monstres ont sacrifiés?

Cependant, au premier vent que j'eus de ce qui se tramait, j'en sentis la conséquence; je donnai au général Kilmaine le commandement de toute l'Italie. J'ordonnai au général Victor de se porter avec sa division, à marches forcées, dans le pays vénitien. Les divisions du Tyrol s'étant portées sur l'armée active, cette partie devenait plus découverte; j'y envoyai sur-le-champ le général Baraguey d'Hilliers. Cependant le général Kilmaine réunit des colonnes mobiles de Polonais, de Lombards et de Français qu'il avait à ses ordres, et qu'il avait remis sous ceux des généraux Chabran et Lahoz. À Padoue, à Vicence et sur toute la route, les Français étaient impitoyablement assassinés. J'ai plus de cent procès-verbaux, qui tous démontrent la scélératesse du gouvernement vénitien.

J'ai envoyé à Venise mon aide-de-camp Junot, et j'ai écrit au sénat la lettre dont je vous ai envoyé copie.

Pendant ce temps, ils étaient parvenus à rassembler à Verone quarante mille Esclavons, paysans, ou compagnies de citadins, qu'ils avaient armés, et au signal de plusieurs coups de la grosse cloche de Verone et de sifflets, on court sur tous les Français, qu'on assassine: les uns furent jetés dans l'Adige; les autres, blessés et tout sanglans, se sauvèrent dans les forteresses, que j'avais depuis long-temps eu soin de réparer et de munir d'une nombreuse artillerie.

Je vous envoie le rapport du général Balland; vous y verrez que les soldats de l'armée d'Italie, toujours dignes d'eux, se sont, dans cette circonstance comme dans toutes les autres, couverts de gloire. Enfin, après six jours de siège, ils furent dégagés par les mesures que prit le général Kilmaine après les combats de Dezenzano, de Valeggio et de Verone. Nous avons fait trois mille cinq cents prisonniers et avons enlevé tous leurs canons. À Venise, pendant ce temps, on assassinait Laugier, on maltraitait tous les Français, et on les obligeait à quitter la ville. Tant d'outrages, tant d'assassinats ne resteront pas impunis: mais c'est à vous surtout et au corps législatif qu'il appartient de venger le nom français d'une manière éclatante. Après une trahison aussi horrible, je ne vois plus d'autre parti que celui d'effacer le nom vénitien de dessus la surface du globe. Il faut le sang de tous les nobles vénitiens pour apaiser les mânes des Français qu'ils ont fait égorger.

J'ai écrit à des députés que m'a envoyés le sénat la lettre que je vous fais passer; j'ai écrit au citoyen Lallemant la lettre que je vous envoie également. Dès l'instant où je serai arrivé à Trévise, j'empêcherai qu'aucun Vénitien ne vienne en terre-ferme, et je ferai travailler à des radeaux, afin de pouvoir forcer les lagunes, et chasser de Venise même ces nobles, nos ennemis irréconciliables et les plus vils de tous les hommes. Je vous écris à la hâte; mais dès l'instant que j'aurai recueilli tous les matériaux, je ne manquerai pas de vous faire passer dans le plus grand détail l'histoire de ces conspirations aussi perfides que les Vêpres siciliennes.

L'évêque de Verone a prêché, la Semaine Sainte et le jour de Pâques, que c'était une chose méritoire et agréable à Dieu, que de tuer les Français. Si je l'attrape, je le punirai exemplairement.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 17 floréal an 5 (6 mai 1797).

Au directoire exécutif.

Il y a eu des troubles dans la division de la Corse, occasionnés par l'insurrection de la gendarmerie, qui n'était pas payée.

Ce défaut de fonds est produit par la dilapidation qui a été faite des fonds envoyés. Depuis que la Corse est restituée à la France, nous y avons fait passer 700,000 fr., outre une grande quantité de blé et d'autres approvisionnemens.

Je vous envoie les lettres que j'ai écrites au général Gentili et à l'ordonnateur en chef. Je crois que l'on doit tenir à faire un exemple sur le commissaire des guerres et le commissaire faisant les fonctions de payeur, qui devaient, avant tout, solder la troupe.

Le général Vaubois et le général Lafont, qui y vont commander, mettront, j'espère, plus d'économie, et j'engage l'ordonnateur en chef à y faire passer promptement un autre commissaire. La dix-neuvième demi-brigade, forte de douze cents hommes, et qui était à Livourne, va s'embarquer pour se rendre en Corse.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 17 floréal an 5 (6 mai 1797).

Au général Gentili.

Je ne puis vous dissimuler mon mécontentement sur le mauvais emploi des sommes qui ont été envoyées en Corse pour le service de la division. Plus de la moitié a été dilapidée ou dépensée à des choses inutiles, tandis que tout devait être uniquement consacré au service de la force armée.

1°. Il est inutile que vous envoyiez des adjoints à Paris.

2°. Les commissaires du gouvernement ne devaient pas être payés sur les fonds des soldats.

3°. Vous n'aviez pas le droit de faire donner 1000 francs à l'adjudant-général Franceschi.

4°. Vous ne deviez rien faire donner aux officiers isolés, à qui, il y a trois mois, j'avais ordonné de rejoindre.

De plus grands abus ont eu lieu encore dans la distribution de 4 à 500,000 fr. que vous avez précédemment reçus: aucun article ne sera porté au compte à l'ordonnateur et au payeur, ils s'arrangeront ensemble pour les faire rembourser à la république.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 17 floréal an 5 (6 mai 1797).

Au commissaire ordonnateur en chef.

Des troubles sont nés en Corse par le défaut d'argent, cela pourrait même devenir extrêmement sérieux; il est donc indispensable que vous fassiez passer le plus promptement possible 100,000 fr. à Ajaccio, uniquement destinés pour payer la gendarmerie de ces deux départemens. Il est aussi nécessaire que vous vous fassiez rendre un compte exact de l'emploi des sommes que vous y avez envoyées; que vous rappeliez sur-le-champ l'ordonnateur, et que vous y envoyiez un homme probe et intelligent, que vous rendrez responsable de l'emploi des fonds.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 17 floréal an 5 (6 mai 1797).

À M. l'évêque de Côme.

J'ai reçu, monsieur l'évêque, la lettre que vous vous êtes donné la peine de m'écrire, avec les deux imprimés; j'ai vu avec déplaisir la devise qu'un zèle malentendu de patriotisme a fait mettre au-dessus d'un de vos imprimés. Les ministres de la religion ne doivent, comme vous l'observez fort bien, jamais s'émanciper dans les affaires civiles; ils doivent porter la teinte de leur caractère, qui, selon l'esprit de l'Évangile, doit être pacifique, tolérant et conciliant. Vous pouvez être persuadé qu'en continuant à professer ces principes, la république française ne souffrira pas qu'il soit porté aucun trouble au culte de la religion et à la paix de ses ministres.

Jetez de l'eau et jamais de l'huile sur les passions des hommes; dissipez les préjugés et combattez avec ardeur les faux prêtres, qui ont dégradé la religion en en faisant l'instrument de l'ambition des puissans et des rois. La morale de l'Évangile est celle de l'égalité, et dès-lors elle est la plus favorable au gouvernement républicain, que va désormais avoir votre patrie.

Je vous prie, monsieur l'évêque, de croire aux sentimens, etc.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 17 floréal an 5 (6 mai 1797).

Au chef de l'état-major.

Vous donnerez ordre, citoyen général, que tous les soldats vénitiens qui ont été faits prisonniers soient transférés en France, et que tous les officiers soient mis; savoir, les généraux, colonels, lieutenans-colonels et capitaines au château de Milan, et les lieutenans et sous-lieutenans, cadets, etc., au château de Pavie.

Vous chargerez un officier supérieur de les interroger; ils doivent être considérés comme assassins, et non comme avoués par leur prince. Vous me rendrez compte de leur interrogatoire.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 17 floréal en 5 (6 mai 1797).

Bonaparte, général en chef de l'armée d'Italie, arrête:

ART. 1er. La ville de Verone paiera une imposition de cent vingt mille sequins, qui sera affectée aux dépenses de l'armée.

2. Elle paiera, en outre, une contribution de cinquante mille sequins, qui sera distribuée entre tous les soldats et officiers qui se sont trouvés assiégés dans les châteaux, et ceux qui formaient la colonne mobile qui s'est emparée de la ville.

3. Tous les effets qui sont au mont-de-piété et qui ont une valeur moindre de 50 fr. seront rendus au peuple. Tous les effets d'une valeur supérieure seront séquestrés au profit de la république.

4. Verone n'étant point la route de l'armée, ni le séjour d'aucun dépôt, il est expressément défendu de rien payer sous prétexte d'effets perdus, soit aux administrateurs, soit aux militaires; il ne sera admis, soit dans la comptabilité en argent, soit dans celle en matières, aucun déficit justifié par des pertes faites à Verone.

5. Le commissaire ordonnateur en chef fera dresser un état des pertes qui auront été faites par les personnes formant la garnison des forts qui se trouvaient aux hôpitaux, et il sera frappé une troisième contribution sur la seule ville et territoire de Verone, du montant de ladite indemnité.

6. Tous les chevaux de voiture et de selle qui se trouveront à Verone seront affectés aux charrois d'artillerie ou à la cavalerie.

7. La ville de Verone fournira, dans le plus court délai, des cuirs pour faire quarante mille paires de souliers et deux mille paires de bottes; du drap pour faire douze mille paires de culottes, douze mille vestes et quatre mille habits; des toiles pour faire douze mille chemises et douze mille paires de guêtres; douze mille chapeaux et douze mille paires de bas; une partie desdits effets sera destinée pour l'habillement de la division du général Joubert.

8. Toute l'argenterie existante dans les églises ou autres bâtimens publics, ainsi que tout ce qui appartiendrait au gouvernement, sera confisqué au profit de la république.

9. Il sera réuni sur-le-champ une commission militaire qui, quarante-huit heures après la réception du présent ordre, déclarera ennemis de l'humanité et assassins les cinquante principaux coupables auteurs de l'assassinat qui a eu lieu le jour de la seconde fête de Pâques; lesdits coupables seront arrêtés et envoyés garottés à Toulon pour être de là transférés à la Guiane: si cependant parmi ces cinquante il s'en trouvait de nobles Vénitiens, ou de ceux qui furent arrêtés il y a plusieurs mois, envoyés à Venise comme coupables de conspiration contre la république française, et qui depuis ont été relâchés, ils seront condamnés à être fusillés; les séquestres seront mis sur-le-champ sur tous les biens, meubles et immeubles desdits condamnés, et leurs biens fonds seront confisqués et affectés à faire rebâtir les maisons du peuple qui ont été brûlées pendant le siège, et à indemniser les autres personnes de la ville qui se trouveraient avoir perdu.

10. On fera un désarmement général dans tout le Véronais, et quiconque sera trouvé avoir désobéi à l'ordre du désarmement, sera condamné à être envoyé pour six ans de fers à Toulon.

11. Tous les tableaux, collections de plantes, de coquillages, etc., qui appartiendraient, soit à la ville, soit aux particuliers, seront confisqués au profit de la république; les particuliers qui seront dans le cas d'être indemnisés, le seront sur les biens des condamnés.

12. Le général chef de l'état-major, le général divisionnaire Augereau, et le commissaire ordonnateur en chef prendront toutes les mesures pour l'exécution du présent ordre.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 19 floréal an 5 (8 mai 1797).

Au directoire exécutif.

Je vous fais passer, citoyens directeurs, la ratification du grand-duc de Toscane, que j'ai oublié de vous envoyer. Les Anglais ayant évacué Porto-Ferrajo, j'ordonne que l'on évacue également Livourne.

BONAPARTE.

P. S. Je vous fais tenir également une note explicative, remise par les plénipotentiaires de l'empereur.

Au quartier-général à Milan, le 19 floréal an 5 (8 mai 1797).

Au directoire exécutif.

Je suis parti, le 12 floréal, de Palma-Nova, et je me suis rendu à Mestre. J'ai fait occuper par les divisions des généraux Victor et Baraguay d'Hilliers toutes les extrémités des lagunes. Je ne suis éloigné actuellement que d'une petite lieue de Venise, et je fais les préparatifs pour pouvoir y entrer de force, si les choses ne s'arrangent pas. J'ai chassé de la terre-ferme tous les Vénitiens, et nous en sommes en ce moment exclusivement les maîtres. Le peuple montre une grande joie d'être délivré de l'aristocratie vénitienne: il n'existe plus de Lion de Saint-Marc.

Comme j'étais sur les bords des lagunes, sont arrivés trois députés du grand conseil, qui me croyaient encore en Allemagne et qui venaient avec des pleins pouvoirs du même conseil, pour finir tous les différens. Ils m'ont remis la note que je vous envoie. En conséquence, je leur ai fait répondre par le général Berthier la lettre que je vous fais tenir; je viens de recevoir une nouvelle députation, qui m'a remis la note que je vous envoie.

Les inquisiteurs sont arrêtés; le commandant du fort de Lido, qui a tué Laugier, est arrêté; tout le corps du gouvernement a été destitué par le grand conseil; et celui-ci lui-même a déclaré qu'il allait abdiquer sa souveraineté et établir la forme du gouvernement qui me paraîtrait la plus convenable. Je compte d'après cela y faire établir une démocratie, et même faire entrer dans Venise trois ou quatre mille hommes de troupes. Je crois qu'il devient indispensable que vous renvoyiez M. Quirini.

Depuis que j'ai appris le passage du Rhin par Hoche et Moreau, je regrette bien qu'il n'ait pas eu lieu quinze jours plus tôt, on que du moins Moreau n'ait pas dit qu'il était dans le cas de l'effectuer. Notre position militaire est tout aussi bonne aujourd'hui qu'il y a quinze jours; j'occupe encore Clagenfurth, Goritzia et Trieste. Tous les paysans vénitiens sont désarmés; dans toutes les villes, ceux qui nous étaient opposés sont arrêtés; nos amis sont partout en place, et toute la terre-ferme est municipalisée. On travaille tous les jours sans relâche aux fortifications de Palma-Nova.

Je vous prie de désigner le Frioul pour le lieu où les Autrichiens doivent nous faire passer les prisonniers français. Nous ne leur en restituerons qu'à mesure qu'ils nous restitueront les nôtres.

Le choix des membres qui composent le directoire de la Cisalpine est assez mauvais; il s'est fait pendant mon absence, et a été absolument influencé par les prêtres; mais comme Modène et Bologne ne doivent faire qu'une seule république avec Milan, je suspens l'activité du gouvernement, et je fais rédiger ici par quatre comités différens toutes les lois militaires, civiles, financières et administratives qui doivent accompagner la constitution. Je ferai, pour la première fois, tous les choix, et j'espère que d'ici à vingt jours toute la nouvelle république italienne sera parfaitement organisée et pourra marcher toute seule.

Mon premier acte a été de rappeler tous les hommes qui s'étaient éloignés, craignant les suites de la guerre. J'ai engagé l'administration à concilier tous les citoyens et à détruire toute espèce de haine qui pourrait exister. Je refroidis les têtes chaudes et j'échauffe les froides. J'espère que le bien inestimable de la liberté donnera à ce peuple une énergie nouvelle et le mettra dans le cas d'aider puissamment la république française dans les guerres futures que nous pourrions avoir.

BONAPARTE.

Milan, le 20 floréal an 5 (9 mai 1797).

Le général en chef voit avec indignation les vols que commettent plusieurs agens français, qui, sous différens prétextes, s'introduisent dans les monts-de-piété des villes vénitiennes, y mettent les scellés pour y voler tout ce qui est à leur convenance.

En conséquence, il ordonne:

1°. Aux généraux de division de faire lever tous les scellés des monts-de-piété et de les restituer à leurs administrateurs, et, en attendant, qu'il ne soit porté aucun changement auxdites administrations (hormis celui de la ville de Verone).

2°. De faire vérifier par les administrateurs et les membres des municipalités ce qui manque aux monts-de-piété et autres établissemens publics, depuis l'apposition des scellés, et de faire arrêter sur-le-champ les agens ou commissaires qui auraient mis les scellés ou qui seraient coupables de dilapidations, et de les faire traduire devant le conseil militaire de sa division.

3°. Les municipalités de la terre-ferme vénitienne enverront sur-le-champ au général en chef une note de tout ce qui aurait été pris et qui serait à leur connaissance.

4°. La propriété des villes et des habitans de la terre-ferme vénitienne est sous la responsabilité des généraux de division qui y commandent: ils prendront toutes les mesures possibles pour faire arrêter les coupables, réprimer les abus, et garantir ce pays des ravages de cette nuée de voleurs qui semble s'y être donné rendez-vous.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 20 floréal an 5 (9 mai 1797).

Au général chef de l'état-major.

Vous voudrez bien, citoyen général, conformément au traité d'alliance qui existe entre la république française et sa majesté le roi de Sardaigne, ordonner que tous les déserteurs des troupes sardes soient sur-le-champ rendus, et défendre aux différens chefs de corps, soit français, soit milanais, de recevoir aucun déserteur sarde.

Vous voudrez bien donner l'ordre aux commandans de la Lombardie pour qu'ils prennent les mesures afin qu'il existe une sévère discipline sur les frontières du Piémont, et s'opposent à tout ce qui pourrait troubler la tranquillité des états du roi de Sardaigne.

Vous voudrez bien également ordonner au commandant de Tortone de faire tout ce qui dépendra de lui pour maintenir la tranquillité dans les états du roi de Sardaigne, s'opposer à la contrebande du blé et des bestiaux, et enfin avoir pour sa majesté le roi de Sardaigne les sentimens que notre position actuelle doit lui assurer.

Vous le préviendrez également que l'évêque de Tortone va prendre possession de son évêché, et qu'il ait pour lui tous les égards qui sont dus à son caractère.

Vous voudrez bien ordonner au général Casabianca de faire ôter l'arbre de la liberté de la ville de Ceva, et de faire tout son possible pour maintenir le bon ordre dans les états de sa majesté le roi de Sardaigne.

Vous donnerez les ordres pour que les nommés Viniatteri, Rozetti et Strovengo, chefs de la conspiration qui a eu lieu pour assassiner le roi de Sardaigne, soient arrêtés.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 24 floréal an 5 (13 mai 1797).

Au directoire exécutif.

Le dernier courrier que j'ai reçu de vous est du 3 floréal, et je ne connais pas encore vos intentions relativement aux préliminaires de la paix: cela ne laisse pas que de m'embarrasser dans la direction à donner aux différentes affaires actuelles.

Je vous ai rendu compte, par mon dernier courrier, du terme où en était la négociation de Venise. Les négociateurs et le citoyen Lallemant sont ici; mais, pendant ce temps-là, les affaires marchent à grands pas dans Venise même, où l'emprisonnement des inquisiteurs et l'effervescence populaire rendent les propriétés incertaines, sans la présence d'une force française.

Je vous envoie une lettre du citoyen Villetard, secrétaire de la légation française à Venise.

J'ai donné ordre au général Baraguay d'Hilliers d'y entrer avec cinq mille hommes.

J'ai envoyé ordre au citoyen Bourdé, commandant la flottille de l'Adriatique, de s'y rendre également.

Vous ordonnerez au général Lahoz d'éloigner de Milan les citoyens Lerese, Anisette et Barnabitte, et de les employer hors de cette ville, les engageant à ne rien faire qui trouble la tranquillité des états du roi de Sardaigne.

Il est probable, quoiqu'il ne soit cependant pas sûr, que lorsque vous lirez cette lettre, vous serez maîtres de Venise et de son arsenal.

La république cispadane paraît vouloir se réunir avec Venise, si cette ville accepte le gouvernement représentatif, plutôt que de se réunir avec le Milanez.

La république lombarde serait alors composée des pays compris entre le Tesin, le Pô, l'Oglio et le Modénais; ce qui ferait deux millions de population.

La république de Venise démocrate serait composée, 1°. du Trévisan, deux cent mille habitans; 2°. du Dogodo, cent mille; 3°. de la Polésine, de Rovigo et d'Adria, quatre-vingt mille; 4° de la ville de Venise, cent cinquante mille; 5°. des îles du Levant, deux cent mille; 6°. de la Cispadane, six cent mille; 7°. de la Romagne, trois cent mille: en tout, un million six cent mille habitans.

Les deux républiques concluraient une alliance offensive et défensive avec la France contre les Anglais.

Nous trouverons dans l'arsenal de Venise quelques ressources pour notre marine, et quelques vaisseaux de guerre, s'ils sont d'une bonne construction.

J'ai fait partir de Trieste pour Toulon six bâtimens chargés de blé et d'acier.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 25 floréal an 5 (14 mai 1797).

Extrait d'une lettre au directoire exécutif.

Je vous envoie une lettre du citoyen Villetard, une autre du général Baraguay d'Hilliers, et enfin la délibération du grand-conseil, qui a abdiqué. Je crains fort que cette pauvre ville de Venise ne soit en partie pillée par les Esclavons, à l'heure où je vous écris.

J'ai envoyé, par un courrier extraordinaire, au doge la proclamation que je vous fais passer, afin de chercher à y rétablir la tranquillité.

Demain, je conclurai un traité avec les députés vénitiens: j'espère que cette affaire s'achèvera heureusement, et que, si nous ne sommes pas, à l'heure qu'il est, dans Venise, nous ne tarderons pas à y être.

La marine pourra y gagner quatre ou cinq vaisseaux de guerre, trois ou quatre frégates, pour 3 ou 4,000,000 de cordages, de bois et d'autres objets qui lui sont nécessaires.

J'ai envoyé des courriers a Gênes et à Livourne, pour qu'on me fasse passer en toute diligence tous les matelots français ou corses qui s'y trouveraient; je prendrai ceux des lacs de Mantoue et de Garda, et je diminuerai le nombre de ceux que j'ai sur la flottille.

Je vous prie de m'envoyer en poste un contre-amiral, un major d'escadre, etc.

J'aurais aussi besoin de quatre ou cinq cents matelots, qui pourraient se rendre à Gênes, d'où ils viendraient à Tortoue, où ils recevront, du commandant de la place, les ordres, et trouveront les moyens de s'embarquer sur le Pô jusqu'à Venise.

J'espère, si tout réussit conformément à mes espérances, avoir:

Quatre bâtimens de guerre, tout équipés et approvisionnés pour six mois; trois frégates françaises, compris la Brune; deux corvettes françaises et quinze chaloupes canonnières.

Ces vingt-quatre bâtimens seront prêts, j'espère, à mettre à la voile avant l'arrivée du contre-amiral.

Je trouverai les bâtimens et les frégates vénitiennes prêtes à mettre à la voile, parce qu'elles viennent de croiser dans l'Archipel.

BONAPARTE.

Traité de paix entre la république française et la république de Venise.

Le directoire exécutif de la république française et le grand-conseil de la république de Venise, voulant rétablir sans délai l'harmonie et la bonne intelligence qui régnaient ci-devant entre elles, conviennent des articles suivans:

ART 1. Il y aura paix et amitié entre la république française et la république de Venise; toutes les hostilités cesseront dès à présent.

2. Le grand-conseil de Venise, ayant à coeur le bien de sa patrie et le bonheur de ses concitoyens, et voulant que les scènes qui ont eu lieu contre les Français ne puissent plus se renouveler, renonce à ses droits de souveraineté; ordonne l'abdication de l'aristocratie héréditaire, et reconnaît la souveraineté de l'état dans la réunion de tous les citoyens, sous la condition cependant que le gouvernement garantira la dette publique nationale, l'entretien des pauvres gentilshommes qui ne possèdent aucun bien fonds, et les pensions viagères accordées sous le titre de provisions.

3. La république française, sur la demande qui lui en a été faite, voulant contribuer, autant qu'il est en elle, à la tranquillité de la ville de Venise et au bonheur de ses habitans accorde une division de troupes françaises pour y maintenir l'ordre et la sûreté des personnes et des propriétés, et seconder les premiers pas du gouvernement dans toutes les parties de son administration.

4. La station des troupes françaises à Venise n'ayant pour but que la protection des citoyens, elles se retireront aussitôt que le nouveau gouvernement sera établi, ou qu'il déclarera n'avoir plus besoin de leur assistance. Les autres divisions de l'armée française évacueront également toutes les parties du territoire vénitien qu'elles occuperont dans la terre ferme, lors de la conclusion de la paix continentale.

5. Le premier soin du gouvernement provisoire sera de faire terminer le procès des inquisiteurs et du commandant du fort de Lido, prévenus d'être les auteurs et instigateurs des Pâques vénitiennes et de l'assassinat commis dans le port de Venise; il désavouera d'ailleurs ces faits de la manière la plus convenable et la plus satisfaisante pour le gouvernement français.

6. Le directoire exécutif, de son côté, par l'organe du général en chef de l'armée, accorde pardon et amnistie générale pour tous les autres Vénitiens qui seraient accusés d'avoir pris part à toute conspiration contre l'armée française; et tous les prisonniers seront mis en liberté après la ratification.

Ainsi a été arrêté et convenu, savoir: au nom de la république française, par les citoyens Bonaparte, général en chef de l'armée d'Italie; et Lallemant, ministre plénipotentiaire de la république française près celle de Venise; et, au nom du grand conseil vénitien, par MM. François Dona, Léonard Justiani et Louis Moncenigo, députés munis de pleins pouvoirs, dont l'original est annexé aux présentes, lesquelles devront être ratifiées par les hautes puissances contractantes, dans le plus court délai possible, pour sortir leur entière exécution.

Fait à Milan, le 27 floréal an 5 de la république française (16 mai 1797).

Signé BONAPARTE, etc.

Articles secrets faisant suite et partie du traité de paix conclu cejourd'hui 27 floréal an 5 de la république française (16 mai 1797), entre la république française et telle de Venise.

ART Ier. La république française et la république de Venise s'entendront entre elles pour l'échange des différens territoires.

2. La république de Venise versera dans la caisse du payeur de l'armée d'Italie trois millions tournois en numéraire; savoir, un million dans le mois de prairial prochain, un second million dans le mois de messidor, et le troisième million lorsque le gouvernement provisoire sera entièrement organisé.

3. La république de Venise fournira pour la valeur de trois autres millions tournois en chanvres, cordages, agrès et autres objets nécessaires à la marine, sur la réquisition des commissaires qui seront nommés par le général en chef de l'armée, et en tant que ces objets existeront réellement dans les magasins ou dépôts de l'arsenal.

4. La république de Venise fournira en outre trois vaisseaux de ligne et deux frégates en bon état, armés et équipés de tout le nécessaire, sans comprendre l'équipage, et au choix du général en chef, qui, de son côté, promet au gouvernement vénitien la médiation de la république française pour terminer promptement les différens survenus entre celle de Venise et la régence d'Alger.

5. La république de Venise remettra enfin aux commissaires à ce destinés vingt tableaux et cinq cents manuscrits au choix du général en chef.

Les cinq articles ci-dessus, quoique convenus et transcrits séparément, sont néanmoins essentiellement inhérens au traité ostensible conclu cejourd'hui entre les deux républiques, et n'en sont de fait que la continuation: en sorte que la non exécution d'un seul desdits articles secrets rendrait le traité en entier nul et non stipulé.

Ainsi a été arrêté et convenu; savoir, au nom de la république française, par le citoyen Bonaparte, général en chef de l'armée d'Italie, et par le citoyen Lallemant, ministre plénipotentiaire de la république française près celle de Venise, et au nom du directoire exécutif.

Et au nom du grand conseil vénitien, par MM. François Dona, Léonard Justiniani et Louis Moncenigo, députés munis de pleins pouvoirs, dont l'original est annexé au traité ostensible de ce jour.

Fait et signé à Milan, le 27 floréal an 5 de la république française (16 mai 1797).

Signé BONAPARTE, etc.

Milan, le 25 floréal an 5 (14 mai 1797).

Aux citoyens de Venise.

Les citoyens de la ville de Venise sont sous la protection de la république française: en conséquence, je déclare que je traiterai en ennemi de la république française tout homme qui porterait la moindre atteinte aux personnes et aux propriétés des habitans de Venise.

Si, vingt-quatre heures après la publication du présent ordre, les Esclavons n'ont pas, conformément à l'ordre qui leur a été donné par les magistrats de Venise, quitté cette ville pour se rendre en Dalmatie, les officiers et les aumôniers des différentes compagnies d'Esclavons seront arrêtés, traités comme rebelles, et leurs biens, en Dalmatie, confisqués. Le général en chef fera, à cet effet, marcher une division de l'armée en Dalmatie, et ils seront la cause de ce que la guerre et ses horreurs seront transplantés au milieu de leurs foyers.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 25 floréal an 5. (14 mai 1797).

Au directoire exécutif14.

J'organise la république cisalpine: j'ai à cet effet quatre comités qui travaillent sans relâche à la confection des lois organiques qui doivent accompagner la publication de la constitution.

Le citoyen Serbelloni, par la réputation dont il jouit dans ce pays-ci, et par l'ascendant que donne la fortune, est propre à remplir avec succès une place de membre du directoire exécutif; il est d'ailleurs tellement compromis avec les Autrichiens, que c'est une des personnes de l'opinion de laquelle nous devons être les plus sûrs: je l'ai donc fait prévenir par l'administration de la Lombardie qu'il était nommé à la place de directeur; je vous prie de faire en sorte qu'il parte de suite pour Milan.

Je vous envoie une lettre du citoyen Villetard, une autre du général Baraguay d'Hilliers, et enfin la délibération du grand conseil, qui a abdiqué; je crains fort que cette pauvre ville de Venise ne soit en partie pillée par les Esclavons à l'heure où je vous écris.

J'ai envoyé, par un courrier extraordinaire, au doge la proclamation que je vous fais passer, afin de chercher à y rétablir la tranquillité.

Demain, je conclurai un traité avec les députés vénitiens; j'espère que cette affaire s'achèvera heureusement, et que si nous ne sommes pas à l'heure qu'il est dans Venise, nous ne tarderons pas à y être.

La marine pourra y gagner quatre ou cinq vaisseaux de guerre, trois ou quatre frégates, pour trois ou quatre millions de cordages, de bois et d'autres objets nécessaires à la marine.

J'ai envoyé des courriers à Gênes et à Livourne, pour qu'on me fasse passer en toute diligence tous les matelots français ou corses qui s'y trouveraient; je prendrai ceux des lacs de Mantoue et de Garda, et je diminuerai le nombre de ceux que j'ai sur la flottille.

Je vous prie de m'envoyer en poste un contre-amiral, un major d'escadre, etc.

J'aurais aussi besoin de quatre ou cinq cents matelots, qui pourraient se rendre à Gênes, d'où ils viendraient à Tortone, où ils recevront, du commandant de la place, les ordres et trouveront les moyens de s'embarquer sur le Pô jusqu'à Venise.

J'espère, si tout réussit conformément à mes espérances, avoir quatre bâtimens de guerre tout équipés et approvisionnés pour six mois; trois frégates françaises, compris la Brune; deux corvettes françaises et quinze chaloupes canonnières.

Ces vingt-quatre bâtimens seront prêts, j'espère, à mettre à la voile avant l'arrivée du contre-amiral.

Je trouverai les bâtimens et frégates prêtes à mettre à la voile, parce qu'elles viennent de croiser dans l'Archipel.

Le million pour Toulon, que je vous ai annoncé, part demain; un autre million, dont cinq cent mille francs en or et autant en argent, part après demain 27 pour Paris; il pourra servir à vivifier notre marine à Brest.

Les deux millions que le ministre des finances a tirés sur le citoyen André, négociant, seront acquittés en marchandises ou en terres; ce qui, joint à un million pour l'armée de Sambre-et-Meuse, autant pour celle du Rhin, et cinq cent mille francs pour celle des Alpes, cinq cent mille francs que nous coûte la Corse, formera la somme de cinq millions que l'armée d'Italie aura fournis depuis la nouvelle campagne.

Vingt-cinq mille quintaux de blé, et pour cent mille francs de chanvre avec de l'acier, sont partis de Trieste pour Toulon.

Le pape nous a donné huit millions de diamans, qui, à l'évaluation de Modène, ne valent pas davantage que quatre millions cinq cent mille francs.

Le service de l'armée est assuré pour prairial, messidor, thermidor et fructidor.

Treize ou quatorze millions d'arriéré, que nous avions à l'armée, vont être payés en biens nationaux du pays.

Les objets de Rome se réunissent tous à Livourne: il serait urgent que le ministre de la marine envoyât le prendre par trois ou quatre frégates, afin de les mettre à l'abri de tous risques.

Une soixantaine de citoyens de différentes villes du midi se sont présentés à moi pour avoir des secours; je les ai distribués dans toute l'Italie pour y être employés chacun son métier. Le chef de l'état-major enverra au ministre de la police générale les noms, âge, demeure, profession de ces citoyens.

J'ai chargé Comeyras de se rendre à Sion, peur chercher à ouvrir une négociation avec le Valais, afin de conclure un traité au nom de la France et de la république cisalpine, qui nous accorde le passage depuis le lac de Genève au lac Majeur, en suivant la vallée du Rhône. J'ai envoyé un excellent ingénieur des ponts et chaussées pour savoir ce que coûterait cette route à établir: elle irait de Versois à Bouveret par le lac, quinze lieues; de Bouveret à Sion, dix lieues; de Sion à Brigge, huit lieues; de Brigge à Dossola, huit lieues; de Dossola au lac Majeur, huit lieues; du lac Majeur à Milan, douze lieues: ce qui ferait soixante et une lieues de Versois à Milan, ou cent soixante de Milan à Paris: sur ces soixante et une lieues, les quinze du lac et les vingt de Dossola à Milan, c'est-à-dire trente-cinq, sont en grande route; il reste donc vingt-six lieues à faire, dont se chargerait le Milanez.

J'ai chargé le même ingénieur d'aller jusqu'au pont de... et de voir ce qu'il faudrait pour faire sauter le rocher dans lequel s'enfuit le Rhône, et par-là rendre possible l'exploitation des bois du Valais et de la Savoie, bois immenses et qui peuvent seuls relever notre marine. On m'assure qu'il ne faut pas plus de 2 ou 300,000 fr. pour cette opération.

La Toscane et les Grisons vont conclure un traité d'alliance avec la nouvelle république cisalpine: il faudrait obtenir des Suisses les bailliages italiens, qui n'ont qu'une population de quarante mille âmes; nous pourrions leur donner le Freythal, et, s'il était nécessaire, la nouvelle république s'obligerait à fournir tous les ans une certaine quantité de riz et de blé.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 25 floréal an 5 (14 mai 1797).

À M. le général-major comte de Meerveldt, ministre de S. M. l'empereur.

J'ai l'honneur de vous prévenir, Monsieur le général, que je viens de recevoir à l'instant du directoire exécutif de la république française la ratification des préliminaires que nous avons signés à Léoben.

Je me rendrai dans la ville que vous voudrez bien indiquer, afin de procéder aux échanges.

Je vous prie de faire passer le courrier que vous m'enverrez, par Trévise, où il s'adressera au général Gauthier, qui lui indiquera l'endroit où je pourrai me trouver.

J'ai également l'honneur de vous faire part, comme j'ai eu l'honneur d'en prévenir M. le marquis de Gallo par l'envoi de mon aide-de-camp, que le directoire exécutif de la république française a bien voulu munir de ses pleins pouvoirs pour traiter de la paix définitive, le général Clarke et moi; je vous prie de le faire connaître à S. M. l'empereur, afin que les plénipotentiaires qu'elle voudra envoyer se réunissent le plus promptement possible dans la ville de Brescia, comme nous en étions convenus, ou dans toute autre qui paraîtra plus convenable.

Je vous prie de vouloir bien donner des ordres pour qu'à Trieste on se hâte de payer le reste de la contribution, afin de me mettre dans le cas, comme nous en étions convenus, de l'évacuer.

L'évacuation de Clagenfurth a souffert quelque retard par celui qu'a mis l'administration de cette ville à fournir les chariots nécessaires au transport des effets militaires.

Je vous prie de donner aussi des ordres à cet égard, et de croire aux sentimens d'estime et de considération avec lesquels, etc.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 26 floréal an 5 (15 mai 1797).

Au citoyen Faypoult, ministre de la république française, à Gênes.

Je réponds à votre lettre du 21 floréal, citoyen ministre. Je pense, comme vous, que la chute entière de Venise amène celle de l'aristocratie de Gênes; mais il faut pour cela encore quinze jours pour que les affaires de Venise soient bien complètement terminées.

Il est hors de doute qu'il faut laisser Gênes république indépendante; mais il n'est pas moins vrai qu'en réunissant à Gênes tous les fiefs impériaux, il faudrait chercher à avoir le golfe de la Spezzia pour la nouvelle république. Cette seconde pensée s'exécuterait naturellement lorsque le gouvernement aristocratique serait dissous, et le corps de l'état en fusion: alors nous serions toujours sûrs d'avoir avec nous Gênes ou la Spezzia.

Je vous salue et vous prie de m'écrire un peu plus souvent relativement à l'idée que vous avez:

BONAPARTE.

Au quartier-général à Montebello, le 30 floréal an 5 (19 mai 1797).

Au directoire exécutif.

Je vous ai envoyé le traité que j'ai conclu avec Venise, en conséquence duquel cinq à six mille hommes sous les ordres du général Baraguay d'Hilliers ont dû prendre, le 27, possession de la ville. J'ai eu plusieurs buts en concluant ce traité.

1°. D'entrer dans la ville sans difficultés: avoir l'arsenal et tout en notre possession, et pouvoir en tirer ce qui nous convient, sous le prétexte de l'exécution des articles secrets.

2°. De nous trouver à même, si le traité de paix avec l'empereur ne s'exécutait pas, de rallier à nous et de faire tourner à notre avantage tous les efforts du territoire vénitien.

3°. De ne pas attirer sur nous l'espèce d'odieux de la violation des préliminaires relatifs au territoire vénitien, et en même temps de donner des prétextes et de faciliter leur exécution.

4°. Et enfin de calmer tout ce qu'on pourrait dire en Europe, puisqu'il est constaté que notre garnison de Venise n'est qu'une opération momentanée, et un acte de protection sollicité par Venise même.

Le pape est très-malade et a quatre-vingt-trois ans. Sur la première nouvelle que j'en ai eue, j'ai fait réunir tous mes Polonais à Bologne, d'où je les pousserai jusqu'à Ancône. Quelle conduite dois-je tenir si le pape meurt?

Gênes demande à grands cris la démocratie, le sénat m'envoie des députés pour sonder là-dessus mes intentions. Il est très possible qu'avant dix ou douze jours l'aristocratie de Gênes subisse le même sort que celle de Venise.

Il y aurait alors en Italie trois républiques démocratiques, qui, pour le moment, ne pourraient être que difficilement réunies, vu les coupures qu'y produisent les états intermédiaires de Parme et de l'empereur, et vu d'ailleurs l'enfance dans laquelle sont encore les Italiens; mais, et la liberté de la presse, et les événemens futurs ne manqueront pas de réunir ces trois républiques en une seule.

1°. La république cisalpine comprenant la Lombardie, le Bergamasque, le Crémasque, le Modénois, Massa-Carara, la Graffiniana, le golfe de la Spezzia, forme une population de dix-huit à dix-neuf cent mille habitans.

2°. La république cispadane, comprenant le Bolonais, le Ferrarois, la Romagne, Venise, Rovigo, et une partie du Trévisan et les îles de l'Archipel, forme une population de seize à dix-huit cent mille habitans.

3°. La république ligurienne, comprenant les fiefs impériaux, Gênes et les états de Gênes, hormis le golfe de la Spezzia.

Les états du duc de Parme et ceux du roi de Sardaigne ne tarderont pas à s'insurger; je fais cependant ce qui est possible pour soutenir le duc de Parme et le roi de Sardaigne.

La république cisalpine et cispadane se réuniront difficilement, de sorte que si l'empereur s'arrange à laisser la Marche trévisane et la Polésine de Rovigo, il sera possible de laisser Venise avec la république cispadane.

Si, au contraire, il ne voulait pas, l'on réunirait ces deux républiques en une, parce qu'alors il est bien prouvé que la république cispadane ne serait pas assez forte pour maintenir la ville de Venise, comme ville de province.

En attendant, je laisse subsister la Cispadane organisée séparément, puisque sa réunion avec la Lombardie mécontenterait beaucoup de monde, et pourrait être regardée par l'empereur comme une violation des préliminaires, et que d'ailleurs la capitale à Bologne nous permettra d'avoir une grande influence sur toutes les affaires de Rome.

Je vous envoie donc l'ordre que je donne aujourd'hui pour la réunion de la Romagne à la république cispadane. Je profiterai de cette circonstance pour leur faire renommer un autre directoire, celui qu'ils ont nommé étant assez mal composé.

Quand ensuite la paix définitive avec l'empereur sera faite, je prendrai des mesures pour réunir ces deux républiques; mais en attendant il faut que je profile des momens de repos pour organiser parfaitement l'une et l'autre, afin que si les choses se brouillent avec l'empereur, nous puissions être sûrs que nos derrières soient tranquilles, et que si les affaires de Rome viennent à se brouiller par la mort du pape, l'on puisse partir de là pour faire toutes les opérations qui deviendraient nécessaires.

BONAPARTE.

Au quartier-général à Milan, le 30 floréal an 5 (19 mai 1797).

Au directoire exécutif.

Je vous envoie, citoyens directeurs, plusieurs lettres relatives à la conduite des Vénitiens:

1°. Plusieurs lettres du général de division Kilmaine.

2°. Un échantillon des manifestes, et autres lettres anonymes que l'on fait imprimer dans l'état de Venise pour exciter le peuple contre les Français.

3°. Plusieurs lettres du général commandant à Verone, et du général commandant à Mantoue.

4°. Une lettre du citoyen Lallemant.

Vous y verrez que toutes sont extrêmement alarmantes sur les intentions des Vénitiens, et ont dû m'obliger à prendre un parti.

Je vous envoie également quelques lettres interceptées sur un courrier de Naples, qui vous donneront quelques renseignemens sur les mouvemens extraordinaires qui se passaient à Vienne.

BONAPARTE.

14 Cette lettre, relatée déjà en partie par extrait, se trouve complète ici.

Œuvres de Napoléon Bonaparte (Tome I-V)

Подняться наверх