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CHAPITRE IV

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Table des matières

Appauvrissement et dépopulation de la Noblesse.—Chevaliers pleuvent.—Magnanime mot d'ordre.—Morts au lict d'honneur.—Rallye au Roy!—Etats Généraux de 1483.—La république et la chose publique.—Vive qui vainque!—Les casaniers.—Dégradations de noblesse.—Sully et sa chevalerie d'honneur.—Louis XIV et la croix de Saint-Louis.—Ils se battaient pour nous!

Ce qui, dans l'histoire de la chevalerie de France, est plus frappant encore que son appauvrissement jusqu'à la ruine, c'est son amoindrissement numérique, sa constante dépopulation. Dans les vieux cartulaires, à partir du XIe siècle, les chevaliers abondent, «chevaliers pleuvent», comme disait la devise des sires de Chauvigny; puis, progressivement, ils se raréfient; les guerres saintes ont dévoré les seigneurs et les fiefs; les survivants, à quelques-uns près, ne sont plus assez riches pour tenir le rang de chevalier; trois cents ans de batailles contre les Anglais, puis la fureur des guerres de religion, achèvent l'œuvre d'extermination, de spoliation, de dénobilisation. A Crécy, à Poitiers, à Cocherel, dans les champs d'Azincourt, le sang des chevaliers coula jusqu'à l'épuisement; telle bataille faucha presque toute la Noblesse d'une province[15]; mais les traditions d'honneur et de sacrifice ne mouraient pas; elles se transmettaient de génération en génération comme un magnanime mot d'ordre; Bayard, tué à Rebec, était fils, petit-fils, arrière-petit-fils, neveu, petit-neveu de gentilshommes «morts au lict d'honneur». Tant que l'on pouvait, on servait, on sacrifiait la fortune et la vie avec une généreuse obstination, en disant la devise des Montesson: «Rallye au Roy!» Le Roi! auguste et prestigieuse incarnation de la majesté, de la grandeur et de la pérennité de la Patrie française, dont la Noblesse était, je l'ai dit, le premier et le vivant rempart; vérité que proclamèrent les États généraux du Royaume, assemblés à Tours en 1483: «L'estat de Noblesse est nécessaire à la tuition et garde de la république, car c'est le nerf et la force du Royaulme.» La république, en ce temps-là, c'était la chose publique; ce n'est plus, hélas! la même chose. Aux États généraux de 1589, il fut demandé «qu'on restablist la chevallerye, comme la seule institution capable de réprimer les désordres du Royaulme[16].» C'est que non seulement les rangs de la Noblesse apparaissaient décimés, mais le désordre des choses fomentait l'indécision, le découragement, et plus d'un gentilhomme se tenait à l'écart des luttes, prêt peut-être à crier comme en Italie: «Vive qui vainque!» Un arrêt de la cour des aides, donné à Tours en 1593, déclara roturiers les nobles qui n'allaient pas à la guerre[17], tant le nom de noblesse était synonyme de service militaire, et cette affirmation se retrouve, en 1596, dans les remontrances des trois ordres du bailliage de Loudunois, aux États généraux de Rouen: «Les cazaniers et qui auront demeuré en leurs maisons sans avoir faict service à Sa Majesté seront déclarez roturiers et dégradez de noblesse, paieront une somme de deniers à Sa Majesté pour avoir manqué à leur debvoir et [seront] doresnavant taillables[18].» Deux ans avant la mort d'Henri IV, Sully pensait rendre à l'État sa splendeur et sa force par la création d'une chevalerie d'honneur[19]; patriotique conception que devait réaliser le génie de Louis XIV; et l'on sait quels miracles de vaillantise enfanta le noble appât de la croix de Saint-Louis[20].

Ainsi noblesse était synonyme de «service de guerre»; le gentilhomme se devait en tout temps, à tout âge[21], à la défense du pays, et c'était, on le verra, une charge grandement en disproportion avec ses avantages honorifiques; le culte des traditions et la passion de l'honneur pouvaient seuls la rendre supportable. «Nos nobles! disait avec un tendre orgueil un paysan de l'héroïque Vendée. Ils se battaient pour nous!»—Cela, c'était leur devoir et leur droit, c'était l'honneur!

Essai d'Introduction à l'Histoire Généalogique

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