Читать книгу Un Cadet de Famille, v. 1/3 - Trelawny Edward John - Страница 11

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Dès notre arrivée à un port anglais, je fus placé et détenu à bord d'un garde-côte à Spithead, et peu de jours après on me transféra sur un sloop de guerre. Ces différentes dispositions furent opérées sans qu'un signe d'existence, de souvenir et d'amitié me fût donné par ma famille. J'en souffris cruellement; mais, quoique bien jeune, l'étrangeté aventureuse de ma vie m'avait donné assez d'orgueil et assez de philosophie pour me rendre dédaigneusement indifférent, en apparence du moins, à l'abandon de ma famille.

Cet abandon était cependant bien complet, car jusqu'à ce jour, quoique éloigné des miens, j'avais eu dans mes chefs des amis ou des connaissances de mon père, tandis que ce nouvel embarquement me livrait sans défense à la volonté tyrannique de personnes étrangères à mon cœur et à mes intérêts.

Je me trouvais donc, à quatorze ans, jeté sur un vaisseau, sans protection visible ou lointaine, sans argent et dépourvu des objets les plus nécessaires.

Je ne ressemblais guère à un prudent et soigneux jeune homme dont l'étonnante figure se dessine dans le tableau de mes souvenirs.

C'était un certain midshipman écossais que ses parents avaient envoyé à la mer avec une très-petite quantité d'habits pour son dos; mais, en revanche, une bonne provision de maximes écossaises dans la tête, telles que:

«Un sou épargné est un sou gagné.»

«Les petits ruisseaux font les grandes rivières.»


Cet impudent escroc à cheveux jaunes avait enlevé de ma malle, à bord du garde-côte sur lequel j'avais été emprisonné, la plupart de mes vêtements. Un jour, un matelot l'ayant surpris porteur d'un paquet de choses bizarres, telles que de vieilles brosses à dents, des morceaux de savon, du linge sale, lui demanda ce qu'il venait de faire.

– J'ai, répondit-il avec le plus grand sang-froid, ramassé sur le pont les vieilleries qu'on y laisse traîner.

Ce filou calédonien eut l'effronterie d'avouer qu'il possédait trois ou quatre douzaines de chemises, chacune avec une marque différente; le gaillard avait dîmé sur trente ou quarante d'entre nous. S'il avait trop de prévoyance, moi, j'en avais trop peu. Manquant de tout, n'ayant personne qui prît la peine de s'inquiéter de mes besoins, je repris la mer sur le sloop de guerre.

Nous touchâmes successivement à Lisbonne, à Cadix, à la côte de l'Amérique du Sud, puis à la côte d'Afrique. Notre voyage dura dix-huit mois, et je vis trois des parties du monde, de sorte que j'acquis par la pratique un peu de géographie pendant les douze ou quinze mille lieues que nous parcourûmes.

Notre commandant était un capitaine explorateur. Petit, arrogant, plein de suffisance, et, comme la plupart des petits hommes, il se croyait un très-grand personnage. La seule chose que je puisse me rappeler de cet extrait de commandant est son habitude de tourner la tête tout d'une pièce de mon côté en m'adressant la parole avec des grognements de voix et des mots bien sonores et bien grands pour une si petite bouche. Il me disait donc aigrement:

– Eh bien! hideux colosse, tête de bois, masse inerte et épaisse, pourquoi flânez-vous là au lieu d'obéir à mes ordres?

Le commandant me haïssait parce que j'étais formé comme un homme, et je le méprisais parce qu'il me ressemblait fort peu, et en toute vérité il avait des allures de singe lorsque la colère le faisait sauter à cheval sur l'affût d'une caronade pour frapper les matelots à la tête.

Un Cadet de Famille, v. 1/3

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