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AU TEXAS.
RAPPORT A MES AMIS.

Table des matières

Avant le départ.

I

Vers la fin de1852, au moment de mon départ pour l’Amérique, j’étais occupé à rédiger une Note qui vous était destinée.

Je rappelais le passé, les phases successives de notre Propagation, et j’examinais l’état présent des choses. Recherchant quel but d’activité l’École phalanstérienne pouvait aujourd’hui se proposer, je ne dissimulais pas les entraves dont elle est actuellement entourée. Toutefois, je constatais un fait important, et je proposais une résolution.

Le fait dont je prenais acte n’est nouveau pour aucun esprit exercé, parmi nous. Il résulte du caractère des élément modernes de l’élaboration historique qui tend à dégager l’Ordre de l’avenir de celui du passé.

Ces éléments sont: l’industrie et la science d’une part, et d’une autre les idées suscitées par l’avènement du problème social;–le reste, quelque place qu’il puisse tenir dans les choses et les préoccupations du moment, appartient au passé, et, comme tel, ne compte pas ici.

Or, les créations modernes de la science et de l’industrie, tout en se développant sur le terrain neutre et indépendant qui est leur domaine propre, revêtent de plus en plus le caractère grandiose de procédés puissanciels, d’intruments de grande activité combinée et collective: c’est-à-dire qu’elles vont, à leur insu, droit à l’Ordre sociétaire.

Quant aux idées socialistes proprement dites, malgré les températures élevées qui en surexcitaient naguères l’éclosion, et en dépit des efforts inouïs d’originalité tentés généralement par leurs promoteurs, elles n’ont offert, cela est clair à nos yeux, que des lambeaux ou des déformations de la pensée vaste, homogène et harmonique de Fourier. C’est ce qu’établissait une revue de ces idées, commençant aux doctrines communistes, parcourant les principaux genres des innombrables combinaisons qui ressortissent aux données du Garantisme (systèmes de crédits, mutualités, réformes commerciales, associations et cités ouvrières, consommations sociétaires, innovations en éducation, etc.) et finissant à la réaction individualiste de MM. Proudhon et Emile de Girardin.

Tout ce travail si passionné, si bruyant, si troublé et si trouble s’est opéré, en dernière analyse, autour de deux pivots:

a) Le desideratum d’une combinaison parfaite et absolue des choses et des forces sociales;

b) Le desideratum non moins formel de la liberté parfaite et absolue des éléments humains:

Ce qui implique comme conséquence et troisième terme:

k) Une Justice distributive universellement agréée.

Chacun de nous sait comment ces trois absolus, dont les luttes ont défrayé le chaos socialiste des dernières années . se résolvent dans la conception de l’Ordre naturel et harmonique découvert par Fourier.

Or, une gravitation aussi évidente de tous les éléments du monde vivant vers un même but, prouve péremptoirement que celui-ci est sur la route naturelle et certaine de l’humanité. La grande Théorie sociale dont nous sommes en possession trouve donc ici une contre-preuve, une confirmation historique, et le gage de sa réalisation ultérieure, quoi qu’il arrive.

Cela reconnu, je me demandais par quels moyens, en l’état des choses ambiantes, nous pouvions hâter cette réalisation, objet de nos indéfectibles efforts.–Les circonstances actuelles étant données, que faire pour notre Cause?

Malgré la résistance bien connue que j’ai toujours opposée à l’idée de quelque entreprise faible et trop diminuée, la discussion des conditions présentes me forçait à reconnaître qu’une œuvre quelconque était préférable, pour l’École, à un prolongement d’inaction absolue. J’étais amené, pour conclusion principale, à la proposition d’un Projet d’expérimentation du Procédé sériaire, réduit aux données les plus simples, aux éléments absolument indispensables et réclamant les moindres ressources.–Les bases de ce Projet, avaient été déjà posées et discutées dans une série de lettres échangées entre nos amis de Paris et moi pendant le courant de l’été.

Cette conclusion, ainsi que les différentes hypothèses d’exécution qui s’y rattachaient, était raisonnée et motivée; et, malheureusement, si modeste qu’elle fût, je ne pense pas qu’en s’enfermant dans les données actuelles de l’Europe, il nous serait aisé de trouver mieux,–du moins parmi les combinaisons à la fois réalisables dans ce milieu et acceptables par nous.

II

Si j’ai rappelé cette Note, mes amis, quoique j’aie aujourd’hui, grâce à Dieu, autre chose à vous présenter, c’est pour vous montrer d’abord que je n’ai pas perdu un seul instant la foi pleine et entière au triomphe nécessaire de l’Harmonie, dont la loi efficiente,–la Série,–est acquise à la connaissance humaine depuis Fourier; c’est pour vous confesser, ensuite, que tout en ayant pu compter très-légitimement, à d’autres époques, sur une expérimentation large, libre, suffisamment munie et fortement nouée, de cette formule libératrice, j’avais néanmoins cédé à la force des circonstances, et cru devoir accepter, sous leur pression (on en eût il est vrai pris acte), un pis-aller d’où je m’étais jusque-là, pour ma part, toujours efforcé de tenir l’École éloignée;–c’est enfin, et surtout, pour que vous sachiez au juste quel était l’état de mon esprit au moment de mon départ pour l’Amérique.

Il me paraît en effet nécessaire, pour édifier vos intelligences sur les vues et les plans nouveaux que j’ai mainteant à vous proposer, de vous faire assister à la formation des idées qui constituent ceux-ci, et de vous décrire fidèlement les causes qui en ont motivé le développement dans mon propre esprit. Entre vous et moi, et pour une communication du genre de celle-ci, celte filiation est la meilleure méthode d’exposition et la plus naturelle que je puisse choisir.

Nous partirons donc du point où j’en étais moi-même au moment, de mon voyage. Je spéculais exclusivement alors sur nos données européennes; à telle enseigne que Brisbane étant venu nous voir quelque temps avant ce voyage,– auquel, bien qu’il m’y engageât vivement, j’étais loin encore de songer alors,–j’avais fait mon possible pour le convertir à l’idée d’une expérimentation en Suisse, où je supposais que, toutes forces réunies, nous pourrions agir, et repoussé comme de très-faible valeur ce qu’il me proposait du côté de l’Amérique. Il est vrai que Brisbane, qui a parcouru cinq ou six fois l’Europe et touché même à l’Asie, ne con naissait encore qu’une assez petite partie de son propre pays, et ne se doutait pas de ce que, quelques mois plus tard, nous étions destinés à y rencontrer, je dirais presque à y découvrir ensemble.

Mon but n’est pas ici d’écrire un livre sur les États-Unis, pas môme de vous faire un récit de voyage: il y faudrait plusieurs volumes. Je me bornerai donc à toucher les points qui me paraîtront liés à la Proposition qui est l’objet et la conclusion de ce Mémoire.

Au Texas

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