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mère pièce rideau grand-père
ОглавлениеMa mère m’amenait parfois chez mon grand-père.
L’appartement où il vivait avec ma grand-mère
Était angulaire : une fenêtre donnait sur la cour
Et l’autre, sur les berges de la rivière,
Ou, plus précisément, de la mer artificielle
En amont du barrage hydroélectrique.
Les rideaux de l’appartement
Éveillaient ma curiosité.
Ils étaient complètement passés de mode
Même en ces temps-là :
Tricotés de fil blanc,
Avec des bordures à franges.
Mon grand-père était austère,
Mais parfois il me gâtait
En me donnant quelques pièces de monnaie
Pour une crème glacée et un soda.
Les valeurs des pièces
En ces jours étaient curieuses :
Un, deux, trois,
Cinq, dix, quinze,
Vingt et cinquante kopecks.
Cette suite était couronnée
Par la plus grosse pièce
Qu’on appelait « rouble de fer ».
Le soir, ma grand-mère me couchait
Sur un matelas dur à même le sol.
« Prends l’habitude, tu seras soldat ! me disait-elle. »
J’avais du mal à m’endormir
Dans ces conditions
Et longtemps je suivais des yeux
Les lumières des autos
Qui tournaient devant le barrage
Avec un bruit propre à cette époque-là
Et les images difformes des rideaux tricotés
Qui couraient le long des murs et du plafond.
19 septembre 2019