Читать книгу Histoires romanesques - Arsène Houssaye - Страница 13

ACTE V
LE PETIT SALON DE MADAME DE CAMPAGNAC

Оглавление

Table des matières

Madame de Campagnac rentre chez elle pâle et abattue; elle reparaît dans le petit salon du premier acte.

–Enfin! me voilà à la dernière station de ma jalousie et de mon désespoir.

Elle va au cabinet d’ébène.

–Ce poison, où l’ai-je donc caché?

Elle trouve un portrait.

Ma mère!

Elle baise le portrait.

–Ma mère, tu me pardonneras, car ne suis-je pas assez punie!

Elle lève les yeux.

–Et vous, mon Dieu! vous aussi me pardonnerez, car vous savez qu’avant ces heures de mortelle et folle passion, j’ai vécu dans ma dignité. Mais ce poison, je ne le trouve pas.

Elle cherche encore.

–Ah! voilà le flacon. Quand on pense qu’en respirant ce qu’il y a là dedans, je vais trouver la fin de mes peines! Le tombeau! le silence! l’oubli! Achille ne m’oubliera peut-être pas. Quand une femme se tue pour un homme, elle jette le deuil sur sa vie. Il aura beau faire, mon souvenir sera de toutes ses fêtes. Et d’ailleurs, qui sait si les âmes ne reviennent pas?

Elle regarde encore le flacon.

– Omystère! tout est là? Quand Achille viendra demain matin, il me trouvera plus blanche encore que je ne suis à cette heure. On m’a dit que ce poison ne défigurait pas: il endort. Mais le sommeil de la mort a les yeux ouverts, qui donc me fermera les yeux?

Elle sonne et va entr’ouvrir la porte:

–Eléonore, M. de Santa-Cruz viendra sans doute ce matin. On n’entrera pas dans ma chambre avant qu’il ne vienne. Vous lui direz que je l’attends.

La femme de chambre, à moitié endormie, se réveille tout à fait:

–Mais il y a longtemps que M. le duc est dans la chambre de madame! Il dort profondément sur un livre de philosophie. Il n’y avait pas cinq minutes que madame était sortie quand M. le duc est arrivé.

Madame de Campagnac n’en peut croire ses oreilles; elle se précipite à l’autre porte.

–Achille! Achille! Quoi! tu es là? Je ne vais pas mourir de chagrin, je vais mourir de joie!

Il n’était que trop vrai que Santa-Cruz avait voulu souper avec mademoiselle Fleur-de-Thé, ce qui explique son télégramme. Mais il s’était ravisé, craignant les fureurs jalouses d’Hermione. Il était venu chez elle cinq minutes après son départ.

Ce fut pour ce retard de cinq minutes que cette grande dame déchue, plus jalouse que la jalousie, afficha ainsi sa passion désordonnée dans le Paris bruyant et sceptique.

On l’avait reconnue au bal de l’Opéra et au café Anglais.

D’ailleurs mademoiselle Fleur-de-Thé raconta aux chroniqueurs la station de madame de Campagnac dans sa chambre à coucher, où elle trouva son imperceptible poignard.

Histoires romanesques

Подняться наверх