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§2. — Le Tanzimât après la guerre de Crimée, jusqu’à la mort d’Abd-ul-Medjid
ОглавлениеLa Turquie eût infailliblement succombé sous les attaques des armées russes, et le traité de San-Stéfano eût été signé vingt-deux ans plus tôt, sans l’intervention des armées française et anglaise. La Turquie sauvée, victorieuse, devait son salut à ses puissants alliés: l’Angleterre et la France; et sa reconnaissance lui imposait comme premier devoir d’en écouter les conseils, surtout lorsqu’il s’agissait des chrétiens de l’empire, cause indirecte de l’agression de la Russie, et par conséquent de la guerre sanglante qui venait de se dérouler. En outre, comme la Turquie, par le fait même du succès de la guerre de Crimée, était désormais admise dans le concert européen d’où elle avait été exclue jusqu’à ce jour, il était naturel que son entrée dans la grande famille chrétienne fut signalée par l’affranchissement définitif des populations chrétiennes placées sous le sceptre de l’Islam. Le protocole de Vienne du 1er février 1855, qui servit de base à la paix, qui fut comme le préliminaire du traité de Paris, contenait, en dehors des propositions touchant aux provinces moldo-valaques, à l’embouchure du Danube et à la neutralisation de la mer Noire, celle relative aux «immunités des populations chrétiennes de l’empire ottoman». Et la Porte, comme preuve manifeste de sa bonne volonté, promulguait, le 7 mai 1855, l’abolition définitive de l’impôt de la capitation ou haradj, en même temps qu’elle annonçait l’admission des raïas et dans l’administration et dans l’armée.
C’était un pas énorme que venait de faire la Turquie dans la voie de l’égalité civile et politique de tous les sujets de l’empire; mais les alliés du sultan Abd-ul-Medjid n’entendaient pas que la Porte restât à mi-chemin du but à atteindre. Du reste, l’occasion était trop belle et l’instant unique d’obtenir et au besoin d’arracher des concessions plus complètes, concessions que les puissances alliées et la Russie espéraient rendre à jamais intangibles en les consignant dans le traité de Paris lui-même. Telle fut l’origine du Hatti-Humayoun du 18 février 1856. du autant à la collaboration des ambassadeurs des puissances à Constantinople qu’à celle des hommes d’Etat du Divan.
Négligeant tout ce qui a trait aux immunités religieuses proprement dites, nous ne retiendrons du hatt impérial que les parties qui s’adaptent à notre étude et sont pour ainsi dire liées avec elle.
Après avoir confirmé les déclarations solennelles du Hatti-Chérif de Gulkhané, ainsi que les garanties promises par toutes les lois du Tanzimât promulguées jusqu’à ce jour, le nouveau hatt entrait encore plus avant dans la voie des promesses précises et des abus qu’il importait de réprimer au plus vite.
«La loi, dit le hatt, sévira contre l’emploi, entre particuliers ou de la part des autorités, de toute qualification injurieuse ou blessante. — Les témoignages en justice seront reçus indistinctement, sous un serment prêté selon la loi religieuse de chaque culte. — On avisera aux moyens les plus prompts et les plus énergiques de corriger les abus dans la perception des impôts, et notamment des dîmes. — Le système de la perception directe sera successivement, et aussitôt que faire se pourra, substitué au régime des fermes dans toutes les branches des revenus de l’Etat. — Il sera interdit, sous les peines les plus sévères, à tous les membres des medjliss et à tous les agents de l’autorité de se rendre adjudicataires des fermes qui seront annoncées avec publicité et concurrence. — Enfin, les lois contre la corruption, la concussion ou la malversation seront appliquées à tous les sujets de l’empire, quelles que soient leur classe et la nature de leurs fonctions.»
L’article 4 du Hatti-Humayoun supprimait également les redevances ecclésiastiques et les remplaçait par un traitement fixe et proportionnel à l’importance, à la dignité et au rang des divers membres du clergé. Cette suppression mérite une mention spéciale. En effet, antérieurement, et en vertu de privilèges accordés au patriarchat grec depuis l’occupation ottomane, en plus des droits de rendre justice, d’attributions qui englobaient la vie civile et politique de ses ressortissants, le chef de cette communauté religieuse s’était réservé la faculté de lever des impôts; et cet avantage considérable avait entraîné de tels abus, que les populations sur lesquelles il s’exerçait, en étaient excédées.
Nous avons prononcé le mot de garantie collective des puissances à l’occasion du Hatti-Humayoun, et nous avons dit que par le fait même que le traité de Paris en mentionne la promulgation, les immunités qu’il contient, tous les privilèges qu’il consacre sont à l’avenir placés sous la protection des Etats signataires du traité. Le mot de garantie, en effet, avait été repoussé avec hauteur par les délégués ottomans, et il ressort clairement des négociations, auxquelles le Hatti-Humayoun donna lieu, qu’il répugnait absolument à la Porte d’accepter une sorte de tutelle que l’Europe aurait pu faire peser sur elle dans ses rapports avec les sujets chrétiens de l’empire. Voici, du reste, les termes mêmes dans lesquels le traité de Paris, du 30 mars 1856, mentionne le hatt:
«S. M. I. le sultan, dans sa constante sollicitude pour le bien-être de ses sujets, ayant octroyé un firman qui, en améliorant leur sort, sans distinction de religion et de race, consacre ces généreuses intentions envers les populations chrétiennes de son empire, et voulant donner un nouveau témoignage de ses sentiments à cet égard, a résolu de communiquer aux puissances contractantes ledit firman, spontanément émané de sa volonté souveraine.
«Les puissances contractantes constatent la haute valeur de cette communication. Il est bien entendu qu’elle ne saurait, en aucun cas, donner droit aux dites puissances de s’immiscer soit collectivement, soit séparément, dans les rapports de S. M. le sultan avec ses sujets, ni dans l’administration intérieure de son empire».
Malgré les restrictions que contient cet article du traité, et le droit d’immixtion que s’interdisent les puissances signataires du dit traité, il importe cependant de retenir que le Hatti-Humayoun est comme le corollaire du principe posé dans le protocole de Vienne, qu’il a été l’œuvre de la diplomatie étrangère à Constantinople, qu’enfin il reçoit comme une sanction officielle dans le traité de Paris, et qu’ainsi il revêt une forme particulièrement solennelle. Quant au droit d’ingérence, s’il est formellement supprimé, nous verrons bientôt que les puissances se le sont attribué fort souvent dans la suite, et qu’il s’affirme à chaque instant et tout particulièrement dans l’œuvre de réorganisation financière qui naîtra du Hatti-Humayoun.
Au reste, voici l’interprétation que donne au droit d’immixtion un commentateur bien connu :
«A mon avis, les contractants de 1856 ont voulu éviter qu’en se fondant sur la haute valeur de la communication, tout ambassadeur eùt le droit formel de signaler toute violation, si minime qu’elle fût, et de poursuivre le redressement du grief en faveur de n’importe quel sujet du sultan.
«Aller plus loin, conclure de la fin du paragraphe qu’en aucun cas les gouvernements n’auront jamais rien à dire à propos de l’exécution ou de l’inexécution du Hatti-Humayoun, ce serait non pas seulement faire que la communication n’eût plus une haute valeur: elle n’en aurait plus du tout, ce que personne n’admettra. A mon avis, les deux parties combinées du paragraphe signifient ceci: 1° Nul ambassadeur n’est autorisé à poursuivre devant la Porte le redressement d’un grief particulier concernant un sujet ottoman; 2° chaque puissance a le droit (il faut peut-être dire le devoir) de demander à la Porte, par voie de représentation générale, de ne pas manquer à l’engagement qui résulte de la communication mentionnée à l’article 16 du traité de Paris.
«On verra plusieurs gouvernements s’expliquer nettement en 1875 et en 1877 sur les droits que l’article 9 du traité de Paris confère aux puissances garantes. La France déclarera que la communication du Hatti-Humayoun a été la condition de l’admission de la Turquie dans la famille des Etats européens. «Le Hatti-Humayoun de 1856 est un des fruits de la sollicitude des puissances», écrit le comte Andrassy en 1875. Lord Salisbury a dit le 15 janvier 1877: «Les engagements de ce traité ne peuvent être unilatéraux.»
«Lord Palmerston déclarera au Parlement britannique que le traité de Paris, en faisant simplement mention du Hatti-Humayoun, en plaçait le contenu sous la garantie des puissances; qu’à celles-ci appartenait dès lors la faculté d’intervenir, ainsi que de faire des remontrances suffisantes.»
Tandis que le conseil du Tanzimât, dont l’accès avait été ouvert aux représentants des communautés religieuses, s’appliquait à préparer les lois dans l’esprit du Hatti-Humayoun, que faisait-on au ministère des finances pour parer à la détresse des provinces et du Trésor, détresse qu’avait amenée à un point d’extrême tension l’épuisement du pays à la suite de la guerre de Crimée? Aali et Fuad pachas voulurent frapper un grand coup en commençant la Réforme par le palais du sultan. A la date du 26 août 1858, le sultan, sur les remontrances de ses deux ministres, se décida à publier un hatt prescrivant en termes énergiques la plus sévère économie dans les dépenses en général, et aussi dans celles de la liste civile. Ce hatt était de nature à impressionner les pachas des provinces et à restreindre d’autant plus leurs dépenses et leurs prodigalités que le souverain donnait le premier l’exemple de l’économie. Ensuite on s’occupa de la réorganisation des finances.
A cet effet, et dans l’année 1859, un conseil de sept membres fut attaché au ministère des finances. Il se composait de quatre hauts fonctionnaires ottomans et de trois étrangers: M. Falconnet, Anglais, directeur de la Banque Ottomane; M. de Lahenbacher, Autrichien, envoyé par le ministère des finances de l’Autriche où il occupait un emploi supérieur; enfin M. Alléon, banquier indigène et sujet français, le même qui avait organisé la première banque d’Etat à Constantinople dont nous parlerons plus loin. Peu après, M. Alléon déclinait la mission qui lui avait été confiée, et il était remplacé par le marquis de Ploeuc, délégué spécial du gouvernement français, et qui jouera un rôle considérable dans les finances ottomanes.
Le programme de cette commission était ainsi libellé : étude des réformes qui devaient être apportées dans l’administration financière du pays; examen des recettes et des dépenses de l’empire; mode de perception et emploi des contributions de toute nature dont se composent les revenus du pays. La commission était en outre chargée de préparer une refonte des lois actuellement en vigueur et concernant l’assiette, la répartition et le mode de perception des revenus généraux. La commission avait à réformer aussi les lois et règlements relatifs à l’administration générale des finances, c’est-à-dire au mode d’effectuer les recettes et les dépenses, et en général aux opérations du Trésor; elle proposera en outre les mesures propres à ramener l’ordre et la régularité dans l’administration.
La commission avait la faculté d’exercer son examen sur les objets ci-dessus soit par délégation donnée à l’un ou plusieurs de ses membres, soit au moyen de tous mémoires ou autres documents dont elle pouvait faire la demande à qui de droit; et à cet effet, elle aura le droit de convoquer dans son sein tous les chefs de service qui paraîtraient utiles pour l’éclairer. La commission avait à examiner toutes les modifications à introduire dans les lois organiques qui régissent l’administration financière, et à les compléter par l’introduction des principes consacrés par l’expérience des nations les mieux administrées et qui seraient reconnus applicables; elle rassemblera et coordonnera les lois et règlements, de façon à les approprier aux besoins du temps. Elle présentera ces lois et règlements en forme de projets, et lorsqu’ils auront été adoptés, la commission sera autorisée à se renseigner sur leur exécution. Enfin, il était stipulé que toutes les lois ou règlements en matière financière devraient être communiqués au préalable à cette commission, afin qu’elle donnât, avant leur promulgation, son avis motivé.
Malgré des pouvoirs très étendus en apparence, la commission ainsi constituée n’était en réalité que consultative; son initiative dépendait beaucoup de la complaisance des divers chefs de service dont le concours lui était indispensable pour accomplir sa mission, comme le succès de ses travaux était subordonné à son tour à l’empressement du gouvernement à accepter ses conseils, à sa loyauté à faire exécuter ses décisions. Nous verrons bientôt, lorsqu’au mois de juin 1860, cette commission sera transformée en conseil de réformes financières, que son activité se heurtera à des mauvaises volontés évidentes, qui réduiront de beaucoup les heureux résultats qu’on aurait pu en attendre.
Ces premières mesures ne suffisaient pas à diminuer l’état de crise que traversait le pays. Les conseillers de la Porte s’impatientaient de voir la Réforme s’attarder dans les préparatifs de sa mise à exécution, et le 5 octobre 1859, le grand-vizir reçut communication d’un mémorandum des représentants des puissances garantes, où ils exprimaient «le regret de voir que la Turquie ne s’aidait pas par elle-même, qu’elle ne procédait pas à une application graduelle et soutenue des réformes, qu’une suffisante impulsion ne se manifestait pas pour atteindre le but marqué par le firman de 1856».
D’autre part, l’état de trouble dans lequel se trouvaient à ce moment la Bulgarie, la Bosnie et l’Herzégovine, dù surtout à une mauvaise administration financière, donnait le prétexte d’intervention à la Russie pour demander qu’une enquête international fùt ouverte pour connaître exactement la position des raïas dans ces provinces slaves. Allant au-devant de cette demande insidieuse de la Russie, le grand-vizir Méhémet Kiprisli pacha, qui avait succédé à Aali pacha, partait à la fin du mois de mai 1860 pour Varna pour un grand voyage d’inspection.
Après avoir passé par Widdin, Sophia, Monastir et Salonique, voici en quels termes il rendit compte de son voyage au sultan: «Il est complètement faux, dit-il, que vos sujets chrétiens aient eu à se plaindre de la moindre persécution systématique de la part de leurs concitoyens musulmans; de même que dans toute société humaine, chaque communauté fournit son contingent de criminels...» Le grand-vizir avoue pourtant que quelques branches de l’administration demandent une prompte et sérieuse réforme: «La collection des dîmes, l’organisation de la police rurale et l’état des routes donnent de justes sujets de plaintes à tous vos sujets sans distinction. La création de quelques tribunaux criminels offrant plus de garanties aux accusés est l’une des réformes qui répondraient le mieux aux vœux du pays. Les règlements qui régissent aujourd’hui la perception de l’impôt foncier et des contributions indirectes demandent aussi quelques réformes .»
Revenons à la commission, qui est devenue le conseil de réformés financières, et examinons sa méthode de travail, ainsi que les difficultés qu’elle rencontre dans l’accomplissement de sa mission.
Avant de procéder à une refonte complète des finances ottomanes, la commission devait commencer tout d’abord par se rendre un compte exact de l’état présent des finances du pays, et pour y arriver, il était indispensable qu’elle possédât un exposé détaillé de leur situation actuelle. Mais pour bien connaître le présent, fallait-il approfondir aussi le passé, et connaissant les causes de gaspillage et de désordre, il serait évidemment beaucoup plus facile de trouver les remèdes. Elle se rendit bien vite compte qu’elle n’obtiendrait jamais les éclaircissements voulus sur le premier point. Allait-elle rencontrer plus de facilités pour être renseignée sur l’état présent? Ici sa tâche devient des plus laborieuses. Elle est obligée de renoncer à avoir entre ses mains l’exposé général qu’elle avait demandé ; la commission se contente d’exiger de l’administration un état détaillé des ressources de l’empire par vilayets, livas et cazas, en même temps qu’un tableau des charges de l’Etat par nature de service. Cela était obligatoire pour établir le budget de chaque département ministériel, et ensuite le budget général du pays en les réunissant tous. Sans ces documents, comment organiser sérieusement les finances d’un pays? Comment ne pas rester plongé dans les ténèbres qui enfantent le désordre et permettent toutes les dilapidations?
Quelles étaient en effet jusqu’alors les pratiques ministérielles dans le règlement de leurs dépenses? Habituellement les ministres décidaient en conseil les crédits dont ils avaient besoin; ils disposaient ensuite de leurs revenus spéciaux, et tiraient, à leur défaut et quand ils étaient épuisés, sur la caisse du Trésor public. Si le Trésor était vide, comme cela arrivait le plus souvent, ils avaient la faculté d’émettre, sans limitation aucune, sous le nom de «serghis», des obligations de payer. Quant à l’emploi des deniers ainsi dépensés, ou du nombre de serghis ainsi lancés dans la circulation, jamais ils n’en rendaient compte à qui que ce fût.
On conçoit maintenant combien la commission dut rencontrer de résistance pour obtenir les renseignements qu’elle exigeait de la part de ceux qui avaient tant d’intérêt à dissimuler la confusion régnant dans leur administration.
Il fallut au moins six mois pour réunir les ébauches d’un budget. «Encore fallut-il qu’elle envoyât elle-même dans les divers ministères des spécimens de budget que les chefs de service remplirent tant bien que mal, et ce n’est qu’à la fin du mois de mai 1860 que ces documents furent en la possession de la commission. Depuis cette époque, elle a bien souvent demandé que ces budgets, qui sont plutôt des projets que des états de situation, fussent complétés par des exposés de motifs faits par les différents ministres, et que le ministre des finances fît un rapport général qui résumât les charges ordinaires et extraordinaires, qui indiquât aussi les moyens de faire face au déficit présumé d’environ 162 millions de francs. La commission ne put l’obtenir.»
«Ainsi point de budget, sinon des conjectures faites pour remplir les spécimens d’imprimés préparés par les membres de la commission, point d’exposé pour chaque ministère, point de rapport général du ministère des finances. Voilà la première phase des travaux de la commission de réformes financières.»
Le gouvernement ne consultait pas davantage la commission sur les mesures qu’il comptait prendre sur le retrait du caimé dont nous parlerons plus loin, pas plus que sur la création de la Banque de Turquie dont il était alors question. Aussi beaucoup pensaient que cette commission n’avait été constituée que dans un but de réclame. Ses pouvoirs, disait-on, n’avaient été publiés dans les journaux, communiqués aux chancelleries que pour tâcher d’inspirer de la confiance à l’Europe et préparer ainsi les voies à un prochain emprunt. C’est pourquoi, après huit mois de séjour à Constantinople, le marquis de Ploeuc écrivait à son ministre des finances à Paris: «Je me garderai bien, quoiqu’en Turquie depuis huit mois, de faire un rapport sur son état financier. Aucun exposé ne nous a été fait jusqu’ici par les ministres des finances qui se sont succédé, et je commence à me l’expliquer par le désordre et la confusion qui sont tels que personne, je le crois fermement, ne sait jusqu’à quel point le gouvernement se trouve engagé.»
A la même époque, le marquis de Lavalette, ambassadeur de France à Constantinople, recommandait à ses ressortissants «de n’engager leurs intérêts que dans des entreprises définies clairement sur des bases de la plus parfaite loyauté.»
Tandis que les efforts de la commission se heurtaient à l’apathie et au mauvais vouloir évident, ou peut-être à une sorte d’impuissance chez les pouvoirs ottomans dont elle avait attendu en vain le concours, le Trésor se débattait, toujours vide, avec des demandes d’argent que rendaient de plus en plus pressantes les soulèvements de quelques provinces et les exigences du gouvernement aux abois et du pays incliné fortement alors vers une catastrophe imminente.
C’est à ce moment que s’éteignait Abd-ul-Medjid, dans son kiosque de Flamour; il expira le 25 juin 1861.
Quels que soient les défauts de ce souverain, sa faiblesse et son manque de décision, la postérité ne peut manquer de saluer respectueusement son nom, et les chrétiens de l’empire de garder fidèlement sa mémoire.
«Le nom d’Abd-ul-Medjid, dit M. Engelhardt, restera inséparable du Tanzimât, car son toughra figure en lettres d’or sur les deux actes les plus importants de la Réforme, c’est-à-dire sur la charte de Gulkhané et sur le Hatti-Humayoun de 1856.»