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L'APOSTROPHE DE MIRABEAU
ОглавлениеBientôt M. le marquis de Brezé est venu leur dire [aux députés des communes]: «Messieurs, vous connaissez les ordres du roi.» Sur quoi un des membres des communes lui adressant la parole a dit: «Oui, Monsieur, nous avons entendu les intentions qu'on a suggérées au Roi, et vous qui ne sauriez être son organe auprès des États-Généraux, vous qui n'avez ici ni place, ni voix, ni droit de parler, vous n'êtes pas fait pour nous rappeler son discours; [Note: Le garde des sceaux, d'après le protocole, était seul qualifié pour communiquer les ordres du roi aux États généraux. Dreux-Brezé outrepassait ses pouvoirs. Il ne devait être que le porteur d'ordres écrits du roi.] cependant pour éviter toute équivoque et tout délai, je vous déclare que si l'on vous a chargé de nous faire sortir d'ici, vous devez demander des ordres pour employer la force, car nous ne quitterons nos places que par la puissance de la baïonnette.» Alors, d'une voix unanime, tous les députés se sont écriés: «Tel est le voeu de l'Assemblée.» [Note: Treizième lettre de Mirabeau à ses commettants.]
Le Tiers, sur la proposition de Camus et de Sieyès, déclara persister dans ses précédents arrêtés, récidivant ainsi sa désobéissance. Il décréta en outre, sur la proposition de Mirabeau, que la personne des députés était inviolable. «Ce n'est pas manifester une crainte, avait dit Mirabeau, c'est agir avec prudence; c'est un frein contre les conseils violents qui assiègent le trône.»
Le roi céda devant l'attitude résolue des nobles patriotes, l'offre de démission de Necker, qui n'avait déjà pas assisté à la séance royale, devant l'agitation du monde des rentiers qui craignait la banqueroute, devant l'insubordination de l'armée et les manifestations populaires.