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LE SERMENT DU JEU DE PAUME

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Tandis que les députés se rendaient à la salle [des séances] une proclamation, faite par des hérauts d'armes et affichée partout, annonça que les séances étaient suspendues et que le roi tiendrait une séance royale le 22. On donnait pour motifs de la clôture de la salle pendant trois jours la nécessité des préparatifs intérieurs pour la décoration du trône. Cette raison puérile servit à prouver qu'on n'avait voulu que prévenir la réunion du clergé, dont la majorité avait adopté le système des communes. Cependant les députés arrivent successivement, et ils éprouvent la plus vive indignation de trouver les portes fermées et gardées par des soldats. Ils se demandent les uns aux autres quelle puissance a le droit de suspendre les délibérations des représentants de la nation. Ils parlent de s'assembler sur la place même, ou d'aller sur la terrasse de Marly offrir au roi le spectacle des députés du peuple; de l'inviter à se réunir à eux dans une séance vraiment royale et paternelle, plus digne de son coeur que celle dont il les menace. On permet à M. BAILLY, leur président, d'entrer dans la salle avec quelques membres pour prendre les papiers; et là il proteste contre les ordres arbitraires qui la tiennent fermée. Enfin il rassemble des députés dans le jeu de paume de Versailles, devenu célèbre à jamais par la courageuse résistance des premiers représentants de la nation française. On s'encourage en marchant; on se promet de ne jamais se séparer et de résister jusqu'à la mort. On arrive; on fait appeler ceux des députés qui ne sont pas instruits de ce qui se passe. Un député malade s'y fait transporter. Le peuple, qui assiège la porte, couvre ses représentants de bénédictions. Des soldats désobéissent pour venir garder l'entrée de ce nouveau sanctuaire de la liberté. Une voix s'élève [celle de Mounier]; elle demande que chacun prête le serment de ne jamais se séparer et de se rassembler partout jusqu'à ce que la constitution du royaume et la régénération publique soient établies. Tous le jurent, tous le signent, hors un [Martin d'Auch]; et le procès-verbal fait mention de cette circonstance remarquable. La cour, aveuglée, ne comprit pas que cet acte de vigueur devait renverser son ouvrage. [Note: Précis de l'histoire de la Révolution française, réimp. De 1819, pp. 56-57.]

Armand Brette a complété ce récit. «Sur les 19 curés affiliés dès ce moment à la cause du Tiers, sept seulement adhérèrent au serment le 20 juin ou le 22 juin, 12 s'abstinrent…, 4 députés du Tiers seulement refusèrent de signer … il n'y eut qu'un seul opposant, Martin d'Auch, qui déclara qu'il ne pouvait jurer d'exécuter des délibérations qui ne sont pas sanctionnées par le roi…, tous les nobles députés du Tiers présents à Versailles, les royalistes les plus éprouvés, Malouet, Mounier, Flachslanden, l'ami intime du roi, Hardy de La Largère, dont le fils fut anobli sous la Restauration en souvenir du constituant, Charrier, qui en 1792 souleva la Lozère et paya de sa tête son dévouement à la cause royale, vingt autres enfin, dont l'affection pour le roi était notoire, ont signé le serment et ont ainsi légitimé l'audacieuse constitution du Tiers en Assemblée nationale.» [Note: A. BRETTE, La séance royale du 23 juin 1789, ses préliminaires et ses suites. La Révolution française, t. XX, p. 442 et 534.]

Parmi ceux qui signèrent le serment, cet acte solennel de rébellion, il y en eut qui éprouvèrent une émotion intense. L'un d'eux devint fou.

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