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On trouverait en France des milliers de personnes capables de reconnaître l'état lamentable de notre enseignement, mais je doute qu'il en existe dix aptes à formuler un projet utile de réformes universitaires.

Elles ne se sont pas montrées, lorsqu'il y a quelques années, à la suite des révélations de l'enquête parlementaire, fut tentée la réforme de notre enseignement. Cette tentative aboutit, on le sait, au système dit des cycles, reconnu aujourd'hui comme très inférieur au régime, pourtant fort médiocre, qu'il remplaçait.

«Quelques années ont suffi, écrivait un ancien ministre, membre de l'Académie française, M. Hanotaux, pour mettre à l'épreuve et pour condamner le régime des cycles. Et ces cinq ans ont suffi aussi pour démontrer définitivement l'incompatibilité de l'enseignement secondaire tel qu'il survivait avec le régime actuel. Il faut en prendre son parti; le régime des mots est fini, l'éducation verbale a fait son temps... on a fait de nos générations un peuple d'écoliers, de candidats, de bêtes à concours. La prétendue supériorité intellectuelle et sociale s'affirme par l'art de répéter les mêmes mots et les mêmes gestes jusqu'à trente ans et au delà. L'énergie nationale s'endort dans ce ronron archaïque et vain: apprendre, copier, réciter.»

L'auteur, comme tant d'autres, a très bien montré le mal, mais malheureusement, sans indiquer les remèdes.

Cette incapacité à trouver le traitement d'un mal que chacun voit nettement est une conséquence des influences ancestrales qui nous mènent. Il y a des choses que les peuples latins n'ont jamais comprises et ne pourront probablement jamais comprendre.

D'autres nations, possédant des caractères héréditaires différents des nôtres, ont très bien su saisir ces choses si incompréhensibles pour nous. Il est évident, par exemple, que les Américains ont fort bien su résoudre le problème de l'éducation. Les Japonais, qui n'étaient pas gênés par leur passé, ont adopté en bloc les méthodes allemandes, et on sait à quel degré de supériorité scientifique, industrielle et militaire elles les ont conduits en quarante ans.

Et si le lecteur veut percevoir nettement la profondeur de l'abîme qui sépare les idées latines de celles d'autres peuples, je l'engage à lire quelques discours sur l'éducation[3], prononcés dans une occasion récente en Angleterre et à les comparer à ceux des universitaires français dont j'ai cité des passages au commencement de ce chapitre. Je ne puis, malheureusement, en donner que de trop brefs extraits:

[3] Ils ont été prononcés par M. Asquith, ministre des Finances, M. Haldane, ministre de la Guerre, et M. Lyttelton, directeur du collège d'Eton. On en trouvera des résumés dans le journal anglais Nature.

«Rien ne doit être plus éloigné du but de l'Université que de donner cette vague omniscience qui touche la surface de tous les sujets et ne va au cœur d'aucun. On peut juger de la façon dont l'Université remplit sa tâche par la façon dont elle développe la mentalité de ses élèves et leur goût pour la connaissance.»

Après avoir, de son côté, recommandé la méthode expérimentale, le Directeur d'Eton ajoutait: «Ses avantages sont d'exiger un service constant de la raison, de la patience, de l'exactitude, de l'aptitude à regarder et des plus précieuses facultés de l'imagination».

Résumant ces divers discours, le Directeur de la Revue, où ils sont reproduits, écrivait: «Si une bonne méthode scientifique est enseignée, peu importent les sujets qui seront étudiés par les élèves. Il y a aujourd'hui une désapprobation unanime pour le bourrage de phrases scientifiques et littéraires dont on surchargeait autrefois la mémoire».

Psychologie de l'éducation

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