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On n’avait jamais vu Carilès sans sa lévite.


CHAPITRE V

Table des matières

Réveil et terreur.

Lorsque Carilès se réveilla, l’aube grise pénétrait à travers les carreaux peu nettoyés de sa chambrette. Il se sentit un peu endolori, et ne comprit pas tout de suite pourquoi. Il se mit sur son séant, étira ses longs bras, se leva et étira ses longues jambes; puis il regarda Miette qui dormait toujours.

«Pauvre agneau! se dit-il, comme elle était fatiguée! Je suis un peu moulu, ce matin, d’avoir couché par terre: ce que c’est que de s’habituer au luxe! Et puis il faut dire que je n’ai plus quinze ans. Ah çà, quand elle aura dormi, il faudra qu’elle mange. Qu’est-ce que ça mange, les petites filles? Du lait, je crois: du moins il y en a beaucoup qui viennent m’acheter des moulins avec leur écuelle de soupe au lait dans la main. Je vais lui faire de la soupe au lait!»

Carilès prit son unique petit pot de terre, se coiffa de sa grande casquette, et sortit avec précaution, en refermant la porte derrière lui.

«Tiens! dirent les locataires qui le virent passer, le père Carilès qui n’a pas sa lévite!»

Le fait est que c’était une chose extraordinaire. On n’avait jamais vu Carilès sans sa lévite. Il est vrai que jamais non plus la lévite n’avait servi de couverture à une petite fille endormie.

La petite fille s’éveilla bientôt après le départ de Carilès. Elle ouvrit les yeux et les referma; elle les rouvrit et regarda autour d’elle. Où était-elle, la pauvre petite Miette, et comment était-elle venue dans cette prison? Car c’était une prison, bien sûr, que cette chambre froide et sale, avec sa paillasse, sa petite table, rien qu’un tronc d’arbre pour s’asseoir, et une cruche dans un coin. Miette savait que c’était là un vrai ameublement de prisonnier, et elle chercha des yeux la grosse chaîne qui ne pouvait manquer d’être fixée au mur. De grosse chaîne, point: c’était déjà une inquiétude de moins. Miette se leva, alla à la porte et essaya de l’ouvrir; elle n’y put réussir. «Je suis bien en prison!» se dit-elle avec découragement. Elle alla à la fenêtre: elle n’était pas assez grande pour atteindre à l’espagnolette. Elle frotta une vitre pour voir dehors: elle ne vit que des toits. «Gomme c’est haut! je ne pourrai jamais me sauver par là ! Il faut pourtant que je me sauve, sans cela ils vont revenir me prendre.» Telles furent les réflexions de Miette.

Un rayon de soleil se glissa dans la chambre: il ne l’embellissait pas beaucoup, car il en mettait en lumière toutes les toiles d’araignée; mais les enfants aiment d’instinct la lumière, et Miette se sentit le cœur éclairé par ce rayon. D’ailleurs, il donnait juste sur le petit moulin abandonné la nuit précédente, et la petite fille ne put s’empêcher de le prendre et de le regarder. Un joujou! Quelle charmante chose! Miette n’en avait jamais eu; sa mère gagnait tout juste leur pain quotidien et n’avait rien à donner au superflu. Miette, d’un souffle timide, commençait à faire tourner les ailes du moulin, lorsqu’elle entendit des pas d’homme dans l’escalier. Toutes ses terreurs la ressaisirent. La porte s’ouvrit, et Carilès parut. Miette ne douta pas un instant que Voltigeur, Paillasse et Lavocat ne fussent derrière lui, et, croisant ses deux bras devant ses yeux pour ne pas les voir, elle jeta un cri désespéré et courut se réfugier, le visage contre le mur, dans l’angle le plus éloigné de la chambre.


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