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TROISIÈME ÉTUDE.

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Table des matières

DE LA LIGNE DROITE ET DE LA LIGNE COURBE.

ACCORD QUI RÉSULTE DU MELANGE DES DEUX LIGNES. — EXEMPLE EN ARCHITECTURE. — EXEMPLE DANS LA CÉRAMIQUE. — LA COURBE SIMPLE. — L’ONDOYANTE. — LA SPIRALESCENTE. — LA SERPENTINE. — DÉDUCTIONS ANALOGIQUES.

Rentrons dans notre cœur, nous y verrons clairement deux principes d’action.

SOCRATE.

Au point de vue matériel, toutes les formes possibles peuvent se décomposer en lignes droites et en lignes courbes. Ceci n’a pas besoin de preuves; un moment d’attention sur les objets qui nous environnent, un moment de simple réflexion, suffisent pour le faire comprendre. Il y aurait subtilité à le discuter. Archimède, en définitive, voulut qu’un cylindre et une sphère, symboles de la ligne droite et de la ligne courbe, fussent placés sur son tombeau.

Pythagore a dit, avant Aristote: Les points forment les lignes, les lignes forment les figures planes, desquelles procèdent les solides, des solides les corps qui ont quatre éléments. (Diogène Laerce.)

Les lois de la pesanteur et de la stabilité rendent indispensable, en architecture, l’emploi des lignes perpendiculaires dans l’ensemble. L’ordonnance des divisions intérieures exige généralement des plans composés de lignes droites et d’angles droits; néanmoins une loi de notre nature, la loi des contrastes, peut-être, ou celle de la variété dans l’unité, nous porte à considérer comme une condition de la beauté le mélange des lignes droites et des lignes courbes; c’est par un accord heureux des unes et des autres qu’ont été créés les chefs-d’œuvre de l’architecture et de l’art céramique; c’est ainsi que le mélange de notes brèves et de notes longues, indiquées par une ligne courbe et une ligne droite, est la base de la forme poétique chez les Grecs et les Romains.

Si nous portons nos regards sur les plus belles productions de l’homme, nous voyons des édifices composés de lignes droites perpendiculaires, coupés de grandes divisions horizontales; mais bientôt nous sentons l’influence de la ligne courbe dans les colonnes, les chapiteaux, les volutes, les consoles, les arceaux, etc., etc. La forme circulaire des colonnes a donc pour objet de faire contraster heureusement la ligne courbe horizontale avec les lignes droites et les angles droits qui l’environnent de toutes parts. La statuaire, qui représente les formes si variées de la nature vivante, est appelée elle-même à faire intervenir les lignes courbes ondoyantes et spiralescentes parmi les surfaces et les saillies rectilignes. Par cet heureux accord, temples, cathédrales, portiques, palais, etc., excitent et méritent l’admiration universelle. Donc une condition de la beauté réside dans le mélange de la ligne droite et de la ligne courbe, dans la variété jointe à l’unité, omnis porro pulchritudinis forma unitas est, a dit saint Augustin. L’unité est le symbole de toute beauté ; ce principe est fécond en conséquences, car il comprend la variété dans l’unité.

Si dans un autre art nous considérons la silhouette du vase composite auquel on a donné le nom générique de Médicis, nous ne tardons pas à reconnaître l’heureuse influence de la ligne droite et de la ligne courbe. Ce vase, dans le tiers inférieur de la corolle qui en fait le corps, est cylindrique, tandis que la base est un cratère ovoïde; l’ensemble repose sur un socle carré à parois perpendiculaires. Indépendamment d’autres qualités, par cet intelligent mélange de lignes droites et de lignes courbes, cette forme composite restera comme un des types de la beauté dans l’art céramique. Nous constaterons bientôt que plus la ligne droite domine, plus l’œuvre est susceptible d’être régie par des principes fixes, des mesures justes, des proportions rigoureuses. Plus, au contraire, les lignes courbes abondent comme dans la nature humaine, plus la variété infinie des formes offre d’incertitude sur le point juste où réside la beauté dont le type ne peut être unique quel qu’en soit l’idéal.

La ligne droite est une, la variété des lignes courbes est infinie; les lignes courbes peuvent néanmoins se diviser en trois courbes primitives: la courbe simple, C, l’ondoyante, S, et la spiralescente, à la fois ondoyante et contournée.

La ligne que je nomme spiralescente, est cette grande ligne invisible qui est l’âme d’un mouvement simple dans les belles statues antiques. C’est de cette ligne que Léonard de Vinci, dans son traité de peinture s’est inspiré en disant: «Ne faites

«jamais les têtes droites sur le milieu des épaules,

«mais toujours un peu tournées à droite ou à

«gauche, parce qu’il est nécessaire de leur donner

«une attitude qui fasse paraître du mouvement et

«de la vie.» Hogarth a donné à cette ligne de grâce et de beauté le nom de ligne serpentine, et il en démontre l’effet agréable non-seulement dans l’ensemble, mais dans tous les détails d’une statue et de la figure humaine. Si l’on considère la ligne «décrite par les ondulations du serpent, on voit que cette ligne est une suite d’ondoyantes. Si le serpent enlace un cylindre, un cône ou un arbre, il décrit une hélice dont le contour est impossible à la nature humaine; et comme le serpent excite plutôt l’horreur que l’admiration, le mot serpentine n’est pas l’expression de cette grande ligne qui fait la belle tournure d’une statue; car la nature ne permet pas à notre tête, dans ses mouvements habituels, de tourner au delà d’un quart de circonférence soit à droite soit à gauche. Cette torsion, qui est le résultat de la vie et du mouvement, comprend les différents degrés de spiralescence qui sont une des conditions de la beauté dans la pose, la tournure, l’attitude des êtres vivants et intelligents.

La ligne courbe distingue principalement les parties des corps doués de vie, l’ondoyante se remarque dans leur ensemble, la spiralescente dans leurs mouvements, tandis que la ligne droite semble être le résultat impalpable des facultés ou propriétés immatérielles des corps en général.

Ainsi de notre œil sphéroïde s’échappent des rayons visuels en ligne droite.

Ainsi la terre est sphéroïde, mais l’attraction qu’elle exerce agit en ligne droite. Les corps libres qui obéissent aux lois de son orbite tombent en ligne droite.

Ainsi la matière solaire est sphéroïde, mais elle projette en ligne droite ses rayons lumineux.

Par analogie, en jugeant des phénomènes inconnus par les phénomènes connus, on pourrait déduire des observations précédentes que si les corps qui composent le système sidéral dont la terre fait partie décrivent des courbes variées, ces courbes sont subordonnées à une puissance rectiligne qui les entraîne avec les Nébuleuses en suivant une ligne droite éternelle, de sorte que le tournoiement particulier de chacun des corps célestes ne serait qu’une variété dans l’unité de ce mouvement rectiligne suprême, cause première de tout mouvement.

La ligne courbe la plus parfaite est le cercle, son expression composite est la sphère; l’un et l’autre ne peuvent être et se comprendre qu’avec une étendue limitée, un dedans et un dehors, donc un cercle ne peut être infini; donc le ciel n’est pas sphérique.

La ligne droite, au contraire, se comprend sans peine comme infinie en longueur; prolongée dans l’espace, elle n’a ni commencement ni fin. Qu’on imagine cette ligne, qui n’a de l’infini que la longueur, se développant en largeur, on aura une surface infinie en longueur et en largeur. Qu’à cette surface on ajoute par la pensée une épaisseur infinie, on aura les trois termes de l’infini. Longueur, largeur, hauteur, tel est l’espace. Ici apparaît le nombre trois, symbole antique de la Divinité.

Études céramiques

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