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CHAPITRE III
DEUXIÈME OPÉRATION
SENSIBILISATION DE LA PLAQUE.

Table des matières

L’iode produit des vapeurs d’un violet foncé; c’est de là qu’est venu son nom, qui, en grec signifie violet. Exposé à ces vapeurs, l’argent prend lui-même une teinte plus ou moins violacée. Il se forme alors à sa surface une couche d’iodure d’argent assez sensible pour recevoir à la lumière directe, et avec un objectif double, une impression parfaite en une ou deux minutes. C’est ainsi que Daguerre obtint ses premières épreuves. L’iode est encore aujourd’hui le seul corps générateur de l’image daguerrienne; les substances dites acélératrices ne font que donner une plus grande sensibilité à la couche en formant un sel double ou triple d’argent. Employées seules sans le concours de l’iode, elles seraient impuissantes à donner une image.

L’iodage est donc la base du procédé, et son importance est telle que l’on peut dire a priori: tel iodage, telle épreuve.

Ce n’est pas une simple condensation de vapeurs d’iode qui se produit sur la plaque, mais bien une véritable combinaison de l’iode avec l’argent, c’est-à-dire une iodure d’argent avec excès d’iode.

Chaque opérateur a un genre, une manière, un mode d’opérer, un appareil, qui lui sont propres, qu’il affectionne, et, s’il réussit par ces moyens, il a raison d’y rester attaché.

Depuis la première boîte à iode imaginée et employée par Daguerre et ses élèves, bon nombre de boîtes ont été prônées; quelques-unes nous sont restées: la boîte à iode de M. Séguier, quoique abandonnée depuis longtemps, nous paraît tout aussi bonne que la boîte dite jumelle, et cette dernière nous semble tout aussi convenable que la boîte du baron Gros.

Toute boîte dans laquelle l’iode sera recouvert d’un corps capable d’atténuer sa vaporisation en régularisant la distribution de ses vapeurs dans l’espace, doit donner de bons résultats; nous n’insisterons donc nullement sur l’appareil régulateur à choisir, qu’il ’soit composé d’une plaque poreuse, d’un carton, ou tout simplement d’une feuille de papier, afin d’éviter l’emploi de l’iode à nu.

Quelles que soient la construction et la forme de la boîte à iode, elle doit être profonde.

L’iode trop rapproché de la plaque, en été surtout, dépose sa vapeur d’une manière inégale; il est bon de laisser la vapeur se distribuer dans l’espace avant d’arriver à la couche d’argent: les boîtes à iode américaines ont au moins0m20de profondeur.

Il ne faut pas renfermer la boîte à iode dans la chambre obscure, ainsi que cela se pratique assez souvent quand on voyage; les parois de la chambre pourraient s’imprégner d’iode, et ses émanations nuiraient à la formation de l’image.

La boîte à iode doit rester dans un lieu sec; il faut essuyer les bords intérieurs de la cuvette avec un linge fin humecté d’alcool, et laisser la boîte un instant ouverte avant d’ioder la première plaque.

L’iodage étant considéré, et avec raison, comme l’opération la plus importante et la plus difficile, on a songé à diminuer l’inconstance de ses résultats, en mélangeant l’iode avec différentes substances: le soufre, la magnésie, la chaux, l’amidon, etc.

Les opérateurs qui voyagent, ceux surtout qui ont parcouru les différentes contrées de l’Amérique du Sud, où régnent successivement de longues saisons de pluies et de chaleur, ont pu se convaincre de la presque impossibilité de réussir constamment.

Un touriste, opérateur habile, qui pendant dix ans a travaillé dans ces latitudes, au milieu de variations atmosphériques continuelles, éprouvant les alternatives les plus étranges dans ses résultats, n’est parvenu à diminuer l’inconstance de l’iodage qu’en mêlant l’iode avec l’amidon en poudre. Nous connaissons l’affinité de l’amidon pour l’iode et nous ne sommes pas étonné du succès de notre voyageur.

La chaux hydratée iodée est employée avec le plus grand succès en Amérique, et nous pouvons ajouter que, additionnée de quelques gouttes de brôme, elle forme un excellent mélange que nous conseillons exclusivement.

C’est à M. Bingham, jeune et habile chimiste, que nous devons l’idée d’employer la chaux brômée..

De toutes les substances accélératrices proposées jusqu’à ce jour, la chaux brômée nous paraît mériter la préférence que, depuis dix ans, du reste, les photographes lui ont accordée.

La préparation de cette matière n’offre aucune dif: ficulté; mais les opérateurs, soit qu’ils l’achètent, soit qu’ils la préparent eux-mêmes, l’emploient presque toujours trop chargée de brôme, et cela ne nous paraît pas étranger au voile de brome qui, trop souvent, recouvre leurs épreuves.

Le bromure de chaux rose clair nous semble le meilleur, à moins que l’opérateur ne possède une boîte très profonde; dans ce cas, et en ayant soin de couvrir la chaux d’une feuille de papier buvard, il pourra l’employer entièrement chargée de brome, c’est-à-dire d’une couleur rouge de sang.

La boîte destinée à la chaux brômée est en tout semblable à la boîte à iode. L’emploi de cette substance n’offre aucune difficulté, et l’on opère de la même manière qu’avec la boîte à iode, mais en regardant moins longtemps la plaque. Un instant doit suffire pour juger de la couleur, car la lumière, agissant sur la couche sensible, pourrait déterminer un voile ineffaçable.

Quant à la nuance qu’il faut donner à la plaque sur la chaux brômée, elle dépend entièrement de la teinte obtenue sur la boîte à iode au premier iodage, ou du degré d’intensité qu’on se propose de donner au second.

Quelques opérateurs ont conseillé de donner au second iodage un quart du temps qu’a exigé le premier. D’autres, en plus grand nombre, laissent la plaque sur la boîte à iode, un tiers, deux tiers même du temps employé au premier iodage. Mais, nous le répétons, toutes ces mesures ne sont bonnes que si l’on tient compte de la quantité d’iode qu’on a donnée d’abord, ou de la quantité de substance accélératrice que l’on a déposée ensuite sur la plaque.

SUPPOSITIONS.

Table des matières

1re Supposition.

1er Iodage, a exigé pour arriver à la nuance jaune d’or foncé. 60 s.

Obtenez sur le bromure la couleur rose clair.

2e Iodage, le 1/4 du premier. 15 s.

Dans ces conditions, la couche sera très sensible et donnera, toutes choses égales d’ailleurs, un résultat assez satisfaisant, mais l’épreuve sera d’une grande sécheresse et sans harmonie.

2me Supposition.

1er Iodage, a exigé pour arriver à la nuance jaune d’or foncé. 60 s.

Bromage rouge.

2e Iodage, le 1/3 du premier. 20 s.

Un peu plus de brôme, un peu plus d’iode au second iodage, couche plus forte; réunis dans cette proportion, l’iode et la substance accélératrice nous semblent dans les meilleures conditions de sensibi lité et d’harmonie. Ces rapports de temps et de couleur nous ont toujours donné de très beaux résultats.

3me Supposition.

1er Iodage, a exigé pour arriver à la nuance jaune d’or foncé. 60 s.

Bromage violet.

2e Iodage, les 2/3 du premier. 40 s.

Plus de brôme, plus d’iode au second iodage.

Avec cette combinaison, moins de sensibilité, mais plus de richesse de ton et d’effet; moins de dureté, modelé plus suave, teintes perlées, tons harmonieux.

Nous pouvons maintenant renverser les chiffres, c’est-à-dire laisser la plaque prendre au premier iodage une teinte plus foncée et diminuer le temps du second iodage. Quelle en sera la conséquence? La même dans beaucoup de cas; mais comme en daguerréotypie il se manifeste des anomalies fort étranges, et que tel procédé qui réussit entre les mains d’un opérateur peut fort bien ne donner aucun résultat entre les mains d’un autre, nous allons inscrire ici d’autres chiffres, en assurant nos lecteurs que nous avons également bien réussi en les adoptant.

1re Supposition.

1er Iodage, a exigé pour atteindre la nuance jaune d’or. 48 s.

Bromage couleur rose clair.

2e Iodage, le 1/4 du premier. 12 s.

Maximum de sensibilité, toutes choses égales d’ailleurs, solarisation des blancs, dureté dans les ombres.

2me Supposition.

1er Iodage, a exigé pour atteindre la nuance jaune rosé. 88 s.

Bromage rouge.

2e Iodage, le 1 /4 du premier. 22 s.

Moins de sensibilité, bonne épreuve, convenant à peu près à toute espèce de reproductions.

3me Supposition,

1er Iodage, a exigé pour atteindre la nuance rose. 100 s.

Bromage violet.

2e Iodage, le 1/4 du premier. 25 s.

Couche moins sensible, épreuve veloutée et d’une grande harmonie.

Concluons donc que plus la plaque est fortement iodée, plus elle peut supporter de brome; que plus la couche d’iodure d’argent est épaisse, moins elle est sensible, mais qu’elle a, en revanche, la propriété de donner une épreuve irréprochable.

Après un travail de cette nature, où nous avons eu soin de présenter des chiffres qui sont le résultat d’expériences longues et comparatives, il semblerait naturel de conclure que rien n’est si facile que d’arriver du premier coup au but désiré, d’obtenir une épreuve moelleuse, dure ou parfaite, à volonté. Malheureusement, nous ne saurions admettre une telle conclusion; et ici, bien plus encore que dans les autres branches de la photographie, un succès complet paraît être plutôt le résultat du hasard que celui de l’habileté.,

Si, effectivement, dans le procédé sur collodion par exemple, nous pouvons compter vingt bonnes épreuves sur vingt épreuves faites, c’est que les substances qu’on y emploie sont rigoureusement pesées, rigoureusement appliquées, et que le temps de la pose peut être impunément doublé (ou dépassé)

Dans la daguerréotypie, au contraire, l’iode et le brome, combinés en des proportions non identiques dont l’œil est le seul appréciateur, doivent nécessairement former un sel d’argent éminemment variable à chaque épreuve, et jeter par conséquent la perturbation dans les calculs de l’opérateur.

Il est aussi très difficile de déterminer la couleur de la plaque iodée, corps miroitant vu par réflexion, dont la teinte se distingue très mal, surtout si le laboratoire n’est pas toujours éclairé par une lumière identique. Notre œil ne voit pas toujours de la même manière, et nous pouvons être plus ou moins sujets à des aberrations du sens visuel.

Que dirons-nous des opérateurs qui sont atteints de daltonisme, et comment nous comprendrons-nous si vous appelez jaune ce que je vois violet?

Quoi qu’il en soit, et malgré les difficultés qui s’opposent à ce que l’on obtienne à tout coup de très belles épreuves par le procédé de Daguerre, nous pouvons garantir à l’opérateur attentif une réussite souvent heureuse et des succès qui sortiront des bornes de la médiocrité, l’image daguerrienne n’exigeant pas, comme le portrait sur papier, cette haute perfection, qui seule peut dispenser d’avoir recours à des retouches.

Compendium des quatre branches de la photographie

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