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IV

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Table des matières

M. Margueritte avait repris sa place à table, et c’était, la toque sur la tête, les manches de sa robe retroussées, qu’il dégustait son café, voluptueusement, béate-ment, grisé par le bonheur, le sien propre, comme celui des trois personnes qui l’entouraient et le regardaient avec des yeux émus ou souriants:

Sa mère, glorieuse de son fils et confiante dans l’avenir, elle qui, depuis soixante ans, avait vécu dans la crainte du lendemain;

Sa fille, heureuse et attendrie de la joie de son père;

La tante Tout cha enfin, calculant gaiement les bénéfices qu’elle allait faire sur ses fournitures de cidre, de bois, de beurre, d’œufs, de lait, de fromage, de pommes de terre, tout en digérant un bon déjeuner qui ne lui avait rien coûté.i

–Eh bien, maman, dit M. Margueritte, après un temps assez long de cette douce béatitude, aurais-tu cru cela quand tu me cousais ma première veste de drap que tu avais taillée dans l’habit de mon pauvre père pour m’envoyer au collège décemment vêtu?

–M’a-t-elle donné du mal, cette veste-là! Je voulais que tu fusses comme tes camarades, et, dame! c’était là le difficile pour nous.

–C’est justement parce que je ne pouvais pas être comme les autres que j’ai voulu être plus qu’eux par le travail, puisque j’étais moins qu’eux sous tant de rapq ports; et c’est peut-être ce sentiment qui m’a fait ce que je suis; j’ai plus d’une fois souffert de ma veste râpée et de mes souliers rapiécés; mais quand on donnait les places le mardi et que le principal disait: «Prenmier, Augustin Margueritte,» j’oubliais ma veste et nmes souliers. Je l’ai portée longtemps, cette pauvre veste, et c’est peut-être pour cela que j’ai cédé tout à l’heure à un sentiment de vanité naïve qui m’a fait revêtir ce costume. Enfin, les mauvais jours sont passés, les bons commencement.

Il y avait une pensée qui tourmentait la tante Tout cha depuis qu’elle avait engagé ses marchés pour ses différentes fournitures. Quelle était la solvabilité de son neveu? Comment serait-elle payée?. M. le princiqpal, c’est bien; mais l’argent comptant ou des sûretés, c’est mieux. Elle crut le moment favorable pour poser lla question qui déjà plusieurs fois lui était venue aux lèvres:

–Alors, mon neveu, les affaires ont bien marché? dit-elle.

–Elles vont marcher.

•–Je veux dire: vous avez mis de l’argent de côté.

–J’ai vécu; j’ai élevé ma famille.

–Et les économies.

–Je n’en ai point fait.

–Ah!

Et une contraction plissa son visage épanoui.

–Je n’en ai pas pu faire, ma tante, car ce que gagnent les professeurs est peu de chose. 1

–Oh! mon neveu, ce n’était pas pour vous blâmer, mais par amitié; vous savez, je ne demande pas à connaître vos affaires.

–Elles sont bien simples et je n’ai pas de raisons pour les cacher, à vous surtout. Je n’ai rien, car, ainsi que je vous le disais, ce que j’ai gagné jusqu’à ce jour a été employé par nous à vivre. Je n’aurais même pas pu obtenir cette place de principal à Condé, qui était mon ambition, si un de mes amis n’était pas venu à mon aide. Le professeur n’a besoin que d’être digne de la situation qu’il veut remplir; mais il n’en est pas de même du principal, qui est un administrateur et qui, par conséquent doit offrir certaines garanties pécuniaires.

–Ça c’est bien juste, dit la tante, pensant à ses fournitures; quand on achète, il faut pouvoir payer.

–C’est précisément ces garanties que mon ami a bien voulu fournir pour moi qui ne les avais pas, et c’est à lui que je dois ma position, de même que si je fais fortune ce sera à lui que je devrai cette fortune.

–Alors, mon neveu, vous espérez faire fortune? demanda la tante, poursuivant son idée et cherchant à savoir au juste avec qui elle allait traiter.

–Oh! une modeste fortune. Mais enfin, je peux mettre de côté, si les choses restent telles qu’elles sont en ce moment, six ou huit mille francs tous les ans. Si, comme je l’espère, je les améliore, je pourrai en mettre. douze ou quinze mille.

–C’est beau cela, mon neveu; ce n’est pas à travailler la terre qu’on en gagne autant.

–J’ai cinquante ans. Si je travaille encore quinze ans, je peux donc prendre ma retraite avec deux cent mille francs de capital. J’en donnerai cent mille à ma chère fille, et avec les cent mille qui me resteront je vivrai parfaitement heureux jusqu’au jour où je n’aurai plus besoin de rien.

–Tu es un bon garçon, dit la vieille mère.

–Un bon garçon, maman, parce que je dis que je donnerai cent mille francs à Hélène; il n’y a pas de bonté à donner à ses enfants, on se fait plaisir à soi-même. C’est tout naturel. Et je voudrais précisément pouvoir faire quelque chose d’extraordinaire pour elle: un sacrifice, quelque chose de grand qui soit digne d’elle.

Se levant vivement, Hélène vint à son père et tendrement elle l’embrassa en lui mettant la main sur la bouche par un geste d’enfant gâté.

–Veux-tu bien ne pas parler ainsi, dit-elle.

Mais cela ne l’arrêta pas:

–Vous ne la connaissez pas, ma chère fille, dit-il, vous ne savez pas comme elle est bonne, affectueuse, tendre, dévouée, douce, docile.

–Avec toi peut-être, dit Hélène en souriant, et il n’y pas grand mérite à être dévouée avec un aussi bon père, ni d’être docile pour t’obéir.

:–Quand je pense, continua M. Margueritte, qu’avant qu’elle fût née je voulais un garçon.

–Pour l’appeler Homère, Virgile ou Nestor, interrompit Hélène sur le ton d’une douce raillerie.

–Et que j’ai été désolé quand le médecin m’a crié: «Une fille!» Je n’ai commencé à me consoler qu’en voyant qu’elle était blonde.

–Ce qui t’a permis de m’appeler Hélène.

:–Cela était bien imprudent, car rien ne disait alors que tu deviendrais la belle fille que tu es devenue.

C’était l’habitude d’Hélène de plaisanter quand son –père lui adressait des compliments qui la mettaient mal à l’aise.

–Si j’avais été un monstre, cela n’aurait rien été pour moi, n’est-ce pas? Mais pour «Hélènè aux bras blancs» quel déshonneur!

La vieille mère et la tante les écoutaient en les rega dant, se demandant sans aucun doute quelle était cette «Hélènè aux bras blancs».

–Une parente du côté de votre femme, mon neveu demanda la tante Tout cha qui aimait à aller au font des choses et qui n’avait jamais peur de poser une question.

–Justement, dit M. Margueritte avec enjouement c’est d’elle que ma fille descend; elle lui ressemble.

–Alors c’était pour sûr une belle personne, dit la tante Tout cha d’un air entendu et convaincu.

–Tu vois, dit M. Margueritte en regardant sa fill avec un sourire glorieux, je ne l’ai pas soufflé, c’est le cri de la conscience et du cœur.

–Certainement, dit la tante, ce n’est point mentir que dire de ma nièce qu’elle est belle, tout le monde le voit

Hélène coupa la parole à sa tante en lui offrant un verre d’anisette.

–Encore un, j’accepte; mais c’est le dernier. Elle est si bonne! Ce n’est pas ici qu’on en trouve de cette qualité. Il faudra que vous me disiez où vous avez eu celle-ci pour que j’en fasse venir une bouteille si c’est possible. Oh! pas pour moi, mais pour mon pauvre François, ça lui réchauffera l’estomac. Ce pauvre homme! il ne faut pas l’oublier, n’est-ce pas? lui qui ne prend pas sa part de ces bonnes choses.

–Si vous voulez nous faire l’amitié d’en emporter une bouteille, dit Hélène.

–Eh bien! oui. tout de même, sans cérémonie; mais à condition que nous ferons un échange: je vous enverrai une bouteille de cassis; vous me direz comment je le réussis.

–C’était donc un fils que je voulais, continua M. Margueritte, j’espérais le faire travailler avec moi, lui apprendre ce que je sais, l’élever en camarade et en ami. A cette époque je ne voyais que cela dans la paternité, qui est un sentiment assez faible et très confus quand on ne l’a pas exercé. Ce fut cette enfant qui m’apprit qu’il y avait autre chose. J’avais vu des gens rester en admiration devant le sourire d’un enfant, et cela, je l’avoue, m’avait paru assez ridicule; mais quand je reçus à mon tour dans mes yeux le sourire de cette petite, ce fut plus que de l’admiration que j’éprouvai, un attendrissement profond, un mélange de joie orgueilleuse et d’espérance confiante. Il me sembla que l’avenir était assuré et que, quoi qu’il arrivât, tant que j’aurais ma fille, je ne pourrais pas être entièrement malheureux. Et, de fait, je ne l’ai pas été. au moins complètement, désespérément. J’ai perdu ma femme cependant, que j’aimais tendrement. J’ai trouvé dans Hélène la force de supporter ce malheur. Elle était là, près de moi; sa tendresse m’enveloppait, me soutenait. J’ai eu bien des traverses dans ma vie, bien des souffrances, bien des colères, bien des indignations; j’ai été comme tout le monde, exposé au passe-droit, à l’injustice, à la trahison, et je suis rentré plus d’une fois à la maison indigné ou découragé; mais jamais l’indignation ou le découragement n’ont résisté au sourire de cette enfant. Un garçon aurait produit le même effet sur moi, direz-vous. Je ne crois pas. Il m’eût distrait, il eût occupé mon esprit; il ne m’eût peut-être pas ému et rempli le cœur comme cette petite fille, si affectueuse et si tendre, car c’est par là qu’elle m’a pris, la tendresse; c’est par là qu’elle me tient, c’est pour sa tendresse que je l’aime si profondément.

Il parlait avec entraînement, avec élan, en homme qui est heureux de trouver l’occasion longuement at tendue de dire enfin ce qu’il a dans le cœur.

Ce fut ce qu’il exprima lui-même:

–Il y a longtemps que je voulais dire tout cela devant Hélène, continua-t-il, ne pouvant le lui dire quand nous sommes en tête-à-tête, et il n’y a jamais eu moment plus propice que celui-ci qui, pour la première fois, nous réunit en famille; c’est ma dette de reconnaissance que je commence à payer.

–Oh! père, peux-tu parler ainsi! s’écria Hélène. N’est-ce pas moi qui te dois tout? Qu’ai-je fait pour toi?

–Tu m’as rendu heureux. N’est-ce rien cela?

Et avec des yeux mouillés, il la regarda.

–Mais s’il est juste de commencer à payer ses dettes, continua-t-il, c’est à condition qu’on ira jusqu’au bout, et j’espère que j’irai. C’est pour cela que j’ai si vivement désiré venir à Condé, où, comme je vous le disais, je puis acquérir une petite fortune.

–Vous l’acquerrez, mon neveu, personne ne le souhaite plus que moi, , croyez-le.

–C’est simplement une question de durée: si je vis, les économies s’entasseront toutes seules.

–Et pourquoi ne vivrais-tu pas, mon garçon? demanda la mère.

–C’est une question que j’émets, maman, ce n’est pas un doute. Pourquoi ne vivrais-je pas encore dix ans?

–Encore vingt ans, dit la tante Tout cha.

–J’ai soixante-treize ans, dit la mère, et je ne me sens pas prête à m’en aller, je t’assure. Si ton père n’avait pas été victime d’un accident, il serait encore de ce monde. Mon père et ma mère ont dépassé quatre-vingts ans; leurs père et mère ont vécu très vieux.

–Il n’y a pas besoin de me rassurer, je n’ai aucune inquiétude; je suis solide et la vie que je mène, celle que j’ai toujours menée ne doivent pas me tuer. Ma santé a toujours été bonne. Et les quelques petits accidents que j’ai éprouvés sont insignifiants.

–Quels accidents? demanda la mère.

–Rien ou presque rien. J’ai bien quelques douleurs qui courent de ci de là, mais jamais cela n’a été au point de m’aliter. J’ai bien aussi l’humeur un peu changeante, de même j’ai le cœur facile aux palpitations après des excès de travail, des veilles prolongées ou bien des marches forcées, mais cela ne vaut pas qu’on en parle.

–Bien sûr, dit la tante, qui, de sa vie, n’avait eu une seconde d’indisposition, mais qui cependant «par peur de quitter tout cha», se croyait à chaque instant en danger et dépensait largement son argent, auquel elle tenait tant cependant, en visites aux médecins qui arrivaient dans la contrée et en pèlerinages à tous les saints des environs.

–Ce qu’il y a eu de plus grave dans mon état, poursuivit M. Margueritte, si toutefois il est permis de se servir du mot grave à propos de cela, ç’a été qu’à plusieurs reprises j’ai senti mon cœur battre comme s’il voulait rompre la poitrine qui l’enserrait, et qu’au lendemain de ces fatigues du cœur je n’étais plus le même homme: le cœur me manquait, l’aptitude au travail me faisait défaut, j’étais apathique, sans ressort moral, intellectuel et physique; je me sentais détraqué, je ne digérais plus, je ne dormais guère, mes jambes étaient cotonneuses, ma parole était traînante.

–Tu as consulté un médecin? demanda la mère.

–Oh! assurément, dit Hèlène.

–Des attaques légères de rhumatisme, poursuivit M. Margueritte. Mais qui n’a pas des rhumatismes? Cela ne mérite pas qu’on s’en occupe quand on ne souffre pas, et depuis longtemps je ne souffre pas. Je puis donc espérer; je dirai plus, je dois espérer que le rêve que j’ai formé se réalisera et que les dix ou quinze années que je demande me seront accordées.

–N’en doutez pas, mon neveu.

–Oh! je n’en doute pas; je trouve même qu’elles me sont dues et que je serais volé si je ne les obtenais pas. Mais je ne le serai point. Et si je n’ai pas les quinze années de mon calcul, j’en aurai toujours quelques-unes sans doute qui me permettront de ne pas laisser Hélène dans la misère.

–Oh! père, ne parlons pas de cela.

–Et pourquoi? Cela ne fait pas mourir. D’ailleurs quand même je viendrais à mourir demain et à ne te rien laisser par conséquent, puisque présentement je n’ai rien, tu ne serais pas pour cela dans la misère et exposée à souffrir la faim.

Cessant de s’adresser à sa fille pour se tourner vers sa mère:

–Telle que tu vois cette belle fille, maman, qui est assez belle pourn’avoir pas besoin d’autre mérite que sa beauté, c’est une savante. Je l’ai fait travailler, non comme un garçon bien entendu, mais plus que les femmes ne travaillent ordinairement. Elle a tous ses diplômes.

–C’est-à-dire, grand’maman, interrompit Hélène en souriant, que je pourrais être directrice d’une salle d’asile pour les petits enfants, ou bien directrice d’une école primaire, ou bien institutrice.

–J’espère bien, continua M. Margueritte, qu’elle n’aura pas besoin de cela; mais enfin, si je venais à disparaître subitement, elle ne serait pas perdue: elle a un gagne-pain.

–C’est là l’essentiel, dit la tante sentencieusement, quand on peut gagner on gagne, c’est la loi de la nature.

–D’autre part, poursuivit M. Margueritte, Hélène a une dot.

–Ah! dit la tante.

–Sa beauté. Si, pour l’homme, le don par excellence est l’intelligence, pour la femme ce don est la beauté. Jusqu’où ne monte pas un homme supérieur par l’intelligence? A quelle position ne peut pas prétendre une femme supérieure par la beauté?

–Vous comptez sur un beau mariage? dit la tante.

–Je n’y compte pas, mais je dis qu’un beau mariage serait possible pour Hélène si elle voulait en faire un; je dis même qu’elle n’aurait qu’à vouloir.

Hélène ne répondit pas; mais un sourire passa sur son visage, dont l’expression disait clairement qu’elle ne partageait nullement les illusions enthousiastes de Son père et qu’elle ne croyait pas n’avoir qu’à vouloir pour faire ce beau mariage.

–N’allez pas supposer, continua M. Margueritte, que j’ambitionne un beau mariage pour ma fille; la vérité est, au contraire, que, loin de le rechercher ce mariage, je tâcherais de l’éviter s’il se présentait, car je ne crois pas que le bonheur se rencontre sur les sommets. On est exposé là à trop de dangers, et ce que je veux avant tout pour ma fille, c’est le bonheur, c’est qu’elle aime son mari et qu’elle en soit aimée; c’est qu’ils vivent étroitement unis, n’ayant pas d’autres désirs et d’autres joies que de se rendre mutuellement heureux. Au reste, puisque nous sommes sur ce sujet, je ne veux pas vous cacher que, bien que rien ne soit arrêté, j’ai en vue ce mari qui doit lui donner le bonheur que je veux pour elle.

–C’est quelqu’un d’ici? demanda vivement la tante, incapable d’imposer silence à sa curiosité.

–Je vous dis que rien n’est arrêté; et même les choses sont si peu avancées que je ne peux pas en parler; il y a un projet, voilà tout; s’il prend corps, vous serez une des premières, ma tante, à en être informée.

Il fallut que la tante Tout cha, malgré son désir d’en apprendre davantage, s’en tînt à cela. Elle voulut, en quittant la table, interroger Hélène; mais celle-ci se renferma dans ce qu’avait dit son père.

–Au moins est-ce pour bientôt? demanda la tante.

–Comment voulez-vous que je vous dise quand cela se fera, puisque je ne sais même pas si cela se fera.

L’heure du départ était arrivée. La tante demanda qu’on attelât Cocotte. Puis, après avoir promis de ne rien oublier de ce qu’elle devait fournir à son neveu, elle monta en char à bancs, et, faisant claquer son fouet mais sans toucher la jument, elle partit grand train.

Lorsque la grande porte fut refermée, madame Margueritte s’approcha de son fils avec un certain embarras que M. Margueritte ne vit pas, mais qu’Hélène remarqua:

–Vous voulez quelque chose, grand’maman? demanda-t-elle.

–C’est à mon fils que je voudrais parler, dit elle.

Hélène fit un pas pour se retirer, mais sa grand’mère la retint:

–Je peux parler devant toi, ma fille; ce que j’ai à dire c’est relativement à ta tante, mon garçon, et aux fournitures qu’elle doit te faire. Il faudra être attentif.

–Sois tranquille, les prix seront ceux du cours du jour.

–Ce n’est pas seulement du prix que je veux parler, .

–Je veillerai encore à la qualité.

–Il y a aussi.–elle hésita un moment en regardant autour d’elle,–il y a aussi la quantité. Je te dis ça, tu sais, ce n’est pas pour l’accuser; mais ce ne serait pas bien à moi de ne pas te prévenir.

–Pauvre maman, dit-il, comme tu as dû souffrir près d’elle, toi si droite, si délicate!

–Tu sais, l’intérêt lui trouble l’esprit; sans cela elle ne serait pas méchante femme; mais quand il s’agit de son intérêt, rien n’existe plus; il n’y a plus ni parentsr ni enfants, ni bon Dieu.

–Eh bien, je me défendrai et je m’arrangerai de façon à lui prouver dès le premier jour que, moi aussi, j’ai souci de mon intérêt et que je sais le défendre. Tu m’aideras.

–Oh! mon garçon!

–Ne vas-tu pas avoir peur d’elle maintenant. Qu’as-tu à craindre? Nous sommes réunis pour toujours, et tu n’auras pas d’autre maison désormais que la mienne. Nous allons vivre heureux tous les trois jusqu’au jour où nous serons quatre, puis cinq, puis six, tes petits-enfants que tu surveilleras. Car je dois te dire ce qu’il ne me convenait pas de raconter à la tante Tout cha: si le mariage que je désire pour Hélène se réalise, mon gendre vivra avec nous, et nous ne nous quitterons plus. Tu vois que tu n’a pas à t’inquiéter de la tante, et quand tu croiras devoir prendre ma défense, tu pourras le faire librement.

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