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1383 A 1391
ОглавлениеLa réunion de Coni et de Nice. — Amédée VII n’eut pas moins que son père le caractère d’un prince chevalier et vaillant. Il avait combattu dans les armées françaises à la bataille de Rosebecque en 1382, et paru dans de nombreux tournois. Froissart a loué sa hardiesse et sa magnificence, et l’intrépidité de ses Savoyards «toujours avant». Quand le Comte Vert partit pour Naples, il était occupé à combattre Edouard de Beaujeu, comme sire de Bresse. La seconde année de son règne (1384) il lui fallut châtier ceux du Haut Valais, qui, poussés par les Visconti, avaient mis le Chablais au pillage. Vers le même temps s’élevait en Tarentaise la révolte, en partie légendaire, des bourgeois contre l’archevêque Rodolphe de Chissé. 11 n’est certain ni que ce prélat eût accaparé les grains, ni que son palais fut mis à sac. Mais il dut se retirer, pour des causes qu’on ignore, à Saint-Jaquemoz, et il y fut assassiné (1385). De tels événements préparaient à Moûtiers l’affermissement du pouvoir des Comtes.
La politique d’alliance avec la France donna pour femme à Amédée, Bonne de Berri, nièce de Charles V. Comme l’expédition de Naples était finie, il se rendit de nouveau aux Pays-Bas, où l’armée française campait devant l’Ecluse. On faisait le projet de descendre en Angleterre. Le duc de Berri, beau-père du Comte, commandait l’expédition. Elle échoua par sa lenteur (1388).
Le duc d’Anjou, nouveau roi de Naples, mourut en 1384. Toujours unies à cet égard, la France et la Savoie couronnent en Avignon (1389) son fils Louis II, âgé de douze ans. Marie de Chatillon, sa mère, prit la régence. Comme ses prédécesseurs de l’ancienne maison d’Anjou, il régnait aussi sur la Provence. A ce titre il pouvait payer le secours apporté à sa cause par le Comte Vert. La même année Amédée VII en recueillit le fruit, dans la cession de Nice, de Vintimille, de la vallée de Barcelonnette et de Coni, provençale jusqu’alors, pointe avancée d’une maison rivale dans le domaine piémontais de nos princes. Nice leur donnait pour la première fois accès à la Méditerranée, en forçant la barrière que Saluces et Monferrat leur opposaient de ce côté.
Suite de la politique française. — Dans l’Italie du nord, la politique française n’en tenait pas moins ses intérêts séparés de nos princes. Elle prenait ses sûretés contre leurs avantages, elle envisageait l’alliance des Visconti. Le mariage de Valentine, fille de Galéas Il avec le duc d’Orléans Louis, frère de Charles VI, en 1389, marqua le commencement de cette politique milanaise, qui prit un demi-siècle plus tard tant d’importance dans les rapports des deux Etats.
D’autre part, l’hommage du marquisat de Suluces porté en 1373 au roi de France, et contesté par les Comtes de Savoie, était pendant devant le parlement de Paris. Cette cause d’un si grand prix pour les deux contestants, devait être décidée par les juges du Roi. Ils la réglèrent à son profit en 1390. Dès lors ce fief mouvant du roi de France au cœur des Etats Savoyards, ne cessa d’être une cause d’inquiétude pour nos princes.
Il livrait l’accès de l’Italie par le col de la Traversette, qui fait communiquer Saluces avec Embrun en Dauphiné. Comme il s’en fallait que cette route fût aussi facile que le Petit Saint-Bernard et le mont Cenis, les rois de France l’accommodèrent d’un chemin percé sous la montagne, longtemps connu sous le nom de pertuis du mont Viso, et dont les journaliers qui vont d’Italie en France se servent encore.
Anciens engagements réparés. — Les grandes dépenses auxquelles une politique aussi hardie qu’infatigable avait engagé le Comte Vert, avaient obligé ce comte à tirer de l’argent des judicatures jusque-là exercées par les baillis et les châtelains. Mais elles ne furent vendues qu’à charge de rachat, et les sujets de Savoie se plaignant de l’état nouveau, il fut bientôt question de les racheter. Le Comte assembla les Etats (1391), qui consentirent l’impôt nécessaire. Ainsi cette espèce d’emprunt fut éteinte trente ans environ après les circonstances qui l’avaient rendue nécessaire.
Amédée mourut peu après au château de Ripailles sur le lac de Genève, où il avait pris le lit pour une chute de cheval. Il n’avait que trente et un ans: son règne en avait duré huit; cependant ce peu de temps suffit à marquer sa place parmi les princes habiles et valeureux qui conduisirent enfin l’ancien comté de Savoie à son apogée sous Amédée VIII.