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ОглавлениеClimatologie générale de la France
I. — Beauté privilégiée de la France.
L’auteur resté inconnu des quatre mille décasyllabes du poème épique de la «chanson de Roland» appelait noire pays «douce France» et «terre major». Si maintenant la France n’est plus la terre majeure, depuis que la Russie a dévoré le quart du vieux continent, que l’Angleterre a accaparé par ruse ou par droit de conquête un tiers du globe, que l’Allemagne a sept millions d’habitants de plus que nous, que l’Espagne a essaimé à travers les Amériques en républiques turbulentes et que “Italie a réuni ses tronçons ennemis en un seul royaume, la France est toujours «douce France». «C’est bien toujours, dit O. Reclus, la terre charmante, agréable, heureuse, admirée, l’honneur de la zone tempérée qui nulle part ailleurs ne dispense plus équitablement le soleil et la pluie; c’est le verger des meilleurs fruits, le cellier des meilleurs vins, blancs ou rouges, le grenier d’abondance, et, pour tout dire, la patrie du peuple le plus gai et le plus heureux du monde.»
II. — Heureuse situation de la France.
Cette supériorité, la France la doit à sa situation climatologique et topographique exceptionnelle. «A la marge occidentale du territoire, dit J. Arnould, elle présente des saillies puissantes qui portent le sol à des hauteurs où le climat s’identifie avec celui des régions glaciales; elle renferme le colosse des monts européens, le mont Blanc. Si l’on jette les yeux sur une carte en relief du sol français, on remarque aisément que la masse saillante appelée massif central, sépare nettement le Nord du Midi et empêche entre les climats partiels les transitions insensibles; sans compter qu’elle brise ou dévie les vents et qu’elle condense ou précipite les vapeurs. Ici des plateaux élevés, arides, découverts, à climat âpre dans les jours chauds comme dans les hivers; là, des plaines basses, des dunes ou des plages où la terre et l’eau sont en perpétuel conflit; ailleurs, de hautes falaises où le ciel, qui se tenait élevé au-dessus de la mer, semble être en contact avec le sol et se noyer dans sa lumière.»
Elle bénéficie, en outre, de ce fait qu’un bras du Gulf-stream et les contre-alizés venus de l’Equateur réchauffent l’occident de l’Europe. Et, comme le fait encore très justement remarquer J. Arnould, «les côtes de France, à l’Ouest, sont de celles sur lesquelles les flots des mers tropicales reviennent s’étaler largement. L’immense fournaise du Sahara nous envoie, d’autre-part, ses vents un peu attiédis par-dessus le Tell algérien et la Méditerranée. La France reçoit donc de la chaleur par le Midi, l’Ouest et même le Nord; l’Est seul nous envoie parfois ses vents continentaux, secs, chauds en été, glacés en hiver. Toutefois les Alpes se dressent comme de puissantes barrières en travers de ces vents et nous en atténuent les souffles vigoureux. Notre pays bénéficie, principalement sur une large bande de territoire à l’Ouest, de ce fait invariable: l’uniformisation des climats par la mer.»
III. — Avantages du climat de la France.
On comprend déjà quelle influence la situation géographique de la France a sur son climat, largement accolée qu’elle est aux flancs du monde européen, debout entre deux grandes mers, ouverte sur l’immensité océanique et les flots de la Méditerranée. A l’Est, dans la profondeur du pays, le climat va se fondant dans celui de la masse continentale qui est excessif; à l’Ouest, il subit le contre-coup des mouvements de l’Atlantique qui atténuent les extrêmes; au Sud, le grand lac méditerranéen influence à peine l’atmosphère, mais il est un trait d’union entre la France, l’Espagne, l’Italie et l’Afrique, réunissant un certain nombre de contrées dans un climat qui est une sorte d’intermédiaire entre les climats chauds et les climats tempérés et n’est ni l’un ni l’autre.
Ainsi, en France, la température la plus haute aurait été observée à Orange en juillet 1830 (40°2) et la plus basse à Mulhouse le 3 février de la même année ( – 28°1).
Ch. Martins fixe à 12° environ la température moyenne observée en France. Fuster l’abaisse à 10°8, la moyenne de la capitale, de Paris.
IV. — Variété des climats de la France.
La variété climatologique de la France ne dépend pas seulement des latitudes. Il faut tenir compte de l’altitude, de la nature du sol et du sous-sol, de la prédominance de tel ou tel vent, de la présence de l’Océan ou des grands lacs, du voisinage des déserts, du passage des courants chauds ou froids venus de la mer ou des cieux, de l’indigence ou de l’abondance des pluies.
Ainsi la région française du Nord et de l’Ouest n’a pas plus froid en janvier que la région méridionale, de Valence à Marseille, à la condition de toucher à la bande littorale altantique. De même, le degré élevé de la latitude n’empêche pas les terres du Nord d’avoir des étés très chauds, du moment qu’elles sont continentales, et que, plus au Midi, l’acuité de la chaleur est atténuée par la proximité de l’Océan.
«Il ne faut pas s’imaginer, dit O. Reclus, qu’en allant droit devant soi, vers le sud, de Dunkerque à Montlouis, de Cambrai à Béziers, de Givet aux Saintes-Maries, on verra le Nord faire insensiblement place au Midi.
«Loin de là ! L’homme de Dunkerque ou de Cambrai trouvera le nord juste au moment où, venant de passer la Loire, il se croira tout près d’entrer dans les pays du soleil torride; car il lui faudra monter sur le Massif Central, qui porte de durs hivers au seuil même du brillant Midi. Et l’homme de Givet, quand il redescend le Rhône vers Montélimar, passe brusquement du septentrion au méridion, et presque d’Europe en Afrique; en quelques lieues il change de climat plus qu’il ne l’avait fait en plusieurs centaines de kilomètres.
«Dans l’autre sens, de l’ouest à l’est, de Brest à Epinal, de La Rochelle à Chamonix, de Bayonne à Menton, l’on ne reste point sous le même climat en suivant le même degré de latitude, car de l’Occident à l’Orient les climats français empirent: plus loin de l’Océan et hors de l’influence des tièdes vents du Sud-Ouest, ils sont plus froids dans la moyenne de l’année, beaucoup moins doux en hiver et plus chauds en été.»
V. — Le midi de la France.
Les villes du Midi, à moins de conditions topographiques spéciales, d’abri plutôt que de situation côtière, sont non seulement inférieures à celles de la bande atlantique, mais même ne remportent pas sur les localités continentales. Nice et Toulon ont seules une véritable supériorité ; encore sont-elles moins favorisées que Brest, Fécamp, Lorient. Nancy, climat continental, est d’une certaine façon plus égal que Marseille et que Nice; les minima et les maxima annuels absolus, sans doute, sont plus distants, mais à Nancy la chaleur monte et décroît progressivement; le climat y est excessif sur une année entière, mais non d’un jour à l’autre.
Enfin, faisons avec J. Arnould cette dernière remarque générale que, sous notre climat à grandes alternances, le moment le plus chaud de l’année n’est pas celui où le soleil est au solstice, mais quelques semaines plus tard, et, réchauffement de l’atmosphère se faisant lentement, la décroissance de la température affecte une semblable lenteur. A égale distance de l’été, il fait plus chaud après qu’avant, ou encore le printemps est la fin de l’hiver tandis que l’automne est la fin de l’été.
VI. — Classification des climats de la France.
L’esquisse rapide de ces grands traits de la climatologie française était nécessaire pour faire comprendre et justifier la division en climats partiels qui va suivre.
De l’inégale répartition des influences atmosphériques de l’Océan et de la Méditerranée, et de la disposition variée du sol naissent deux grands climats: l’Atlantique et le Méditerranéen, et plusieurs climats locaux, généralement comptés au nombre de sept: 1° le climat vosgien, éloigné de la mer, avec une moyenne de +9°, des hivers froids et longs, des étés chauds et courts; 2° le climat parisien ou séquanien avec une moyenne de +10°, des hivers assez froids, des étés tièdes et une atmosphère généralement fraîche; 3° le climat breton ou armoricain, égalisé par l’atmosphère marine, avec une moyenne de +11°, des hivers très doux, des étés tempérés, des pluies fréquentes; 4° le climat girondin avec une moyenne de + 12°, des hivers doux, des étés chauds, de longs automnes; 5° le climat auvergnat, avec une moyenne de + 11°, des hivers rudes, des étés chauds, des neiges fréquentes; 6° le climat lyonnais ou rhodanien avec une moyenne de + 11°, des hivers froids, de beaux étés, un ciel variable et des pluies fréquentes dans les montagnes; 7° le climat méditerrannéen avec une moyenne de +14°, des hivers doux, des étés secs, un ciel bleu, de grands vents du Nord, des pluies subites et courtes.