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XII

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Né en 1807, Garibaldi a aujourd’hui cinquante-trois ans. C’est l’homme qui possède en ce moment la plus grande et la plus incontestable popularité. Ses cheveux et sa barbe sont fauves, le nez un peu court et large, le front bien développé ; sous sa profonde arcade sourcilliere luit un regard clair, doux et presque tendre, que l’on sent pourtant devoir être terrible aux heures de l’action; sa taille est assez élevée quoique le vigoureux développement des épaules la fasse paraître moyenne; sa physionomie rappelle un lion au repos; tel est l’homme sur la tête duquel reposent en ce moment les destinées de l’Italie. A la douceur sympathique du regard se joint chez lui le charme non moins grand du sourire; on sent en causant avec lui qu’il est simple et bon, deux qualités précieuses et fort rares; il fuit la pompe et l’appareil; ses manières sont si peu théâtrales qu’on l’a vu sur le navire qui le portait vers Naples, attacher lui-même la tente destinée à abriter la dunette des rayons du soleil, et suivre la nuit, pour passer à l’avant, l’étroit sentier des bastingages pour ne pas réveiller les soldats endormis sur le pont.

Il y a deux grands moyens pour exercer une profonde influence sur les hommes: la puissance ou la bonté. Garibaldi n’a ni titres, ni décorations, ni largesses à distribuer à ses soldats; il ne leur promet au contraire que des peines, des souffrances, des privations qu’il partage avec eux; il n’a pas d’autre costume que leur chemise rouge, il n’a pas d’autre habitation que leur tente, il se contente de leur nourriture; c’est un volontaire et rien de plus; il ne combat ni pour le pouvoir, ni pour la gloire, ni pour la conquête, mais pour l’accomplissement d’une mission: la libération et la régénération de l’Italie. Depuis la fin du moyen âge on n’avait plus vu surgir de ces grandes popularités où s’incarnent tous les instincts d’une nation; on les croyait même devenues impossibles.

On s’est demandé quelquefois si Garibaldi avait vraiment le génie militaire. Nous ignorons ce que peuvent en penser les pédants de l’art de la guerre, mais si celui qui crée une armée nombreuse, sobre, infatigable, dévouée, qui marche à son but par les moyens les plus rapides et qui l’atteint n’est pas un grand général, nous avouons ne pas comprendre en quoi consiste ce titre.

Jusqu’ici, du reste, le libérateur n’a manqué ni de génie militaire, ni de génie politique; il a prouvé qu’il savait agir et parler. Dans tout ce qu’il fait, dans tout ce qu’il écrit, dans ses actes, comme dans ses paroles, on voit un air de poésie et de grandeur qui est le cachet des natures privilégiées, Nous avons cité quelques-uns de ses ordres du jour pour montrer l’éloquence de son style. Cette éloquence coule du cœur. Chez lui, tout sort de là. Les hommes oubliaient depuis trop longtemps que c’est dans le cœur qu’est la force véritable. Garibaldi vient le leur rappeler dans un moment opportun. Nous ne sommes que trop disposés à croire à l’habileté et à l’admirer. Il est temps que le dévouement vienne lui faire concurrence et prouver que rien de véritablement grand dans le monde ne s’accomplit sans lui.

T. D.


Les célébrités du jour : 1860-61

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