Читать книгу Les chasseurs de girafes - Thomas Mayne Reid - Страница 12
ОглавлениеUN INCIDENT
Le lendemain matin, ils levèrent le camp et se dirigèrent vers la rivière. Après avoir passé le gué à l’endroit même où ils avaient traversé le Simpopo pour la première fois, Groot Willem, accompagné de Congo, marcha en avant de ses compagnons d’un mille environ.
Son motif, en tenant ainsi la tête de la marche, était de s’assurer de tout gibier digne de son attention, avant qu’il fût effrayé par les autres.
De temps à autre, de petits troupeaux des différentes variétés d’antilopes qui abondent dans le sud de l’Afrique fuyaient devant lui, mais le grand chasseur daignait à peine les remarquer.
Son but étant de trouver une contrée fréquentée par les hippopotames et les girafes, tout ce qui n’était pas cela n’avait pas le don de l’émouvoir.
Sur son chemin il rencontra plusieurs grands panda nus ou pins. Plusieurs étaient couverts de plantes parasites, qui leur donnaient l’apparence de petites tours ou d’obélisques.
Sous un de ces arbres, près de la rivière, et environ à trois cents yards de l’endroit où il passait, il vit un buffle femelle avec son petit.
L’heure avancée rendait fort désirable la prise du petit buffle, car hommes et chiens avaient gagné un bon appétit.
Après avoir commandé à Congo de rester où il était, le chasseur passa sous le vent du petit buffle, et, grâce au couvert de quelques buissons, il commença à se rapprocher.
Sachant qu’un buffle femelle accompagné de son petit s’alarme facilement, il avança avec la plus grande précaution.
N’ignorant pas non plus que cet animal montre une grande bravoure pour défendre sa progéniture, il ne voulait tirer qu’à coup sûr, afin d’éviter une lutte avec le buffle.
Quand il crut être assez près de l’animal, il le visa au cœur. Contrairement à son attente, celui-ci ne tomba ni ne s’enfuit, mais tourna simplement un regard inquisiteur dans la direction d’où le coup était parti.
Cela lui parut un fait assez étrange. Pourquoi la bête restait-elle à la même place? Si elle n’était pas blessée, comment ne la voyait-il pas s’effrayer?
Rechargeant vivement son rifle, il avança hardiment, se croyant désormais bien sûr que la bête ne lui échapperait plus.
Elle ne paraissait aucunement disposée à la retraite; il était arrivé tout près d’elle, lorsque tout à coup elle chargea avec fureur contre lui, et ne fut arrêtée que par la seconde balle, qu’elle reçut au milieu du front. Elle tomba sur les genoux, et mourut comme les buffles, sur le dos, les jambes en l’air au lieu de s’abattre sur le côté.
Une autre balle eut raison du petit.
Congo arriva, et en examinant le petit buffle, il vit qu’une de ses jambes était cassée. Cela expliquait pourquoi la bête n’avait pas essayé de s’enfuir.
Pendant que Willem rechargeait son arme, il entendit un bruit de feuilles au milieu des plantes parasites qui surchargeaient le pandanus sous lequel lui et Congo se tenaient.
«Gare à vous!» cria Willem, en s’élançant de dessous l’arbre et en chargeant son fusil.
Et regardant en même temps autour de lui, il aperçut un homme qui venait d’émerger de dessous les feuilles. Le costume et l’aspect général de cet individu annonçaient un Africain, mais non un individu des races inférieures dont cette contrée abonde.
Il pouvait avoir environ quarante ans. Ses traits, bien formés, exprimaient l’intelligence et le courage. Il était d’un brun bronzé, non pas noir, et ses cheveux semblaient plutôt ceux d’un Européen que d’un Africain.
Ces observations furent faites par le jeune chasseur en six secondes, car le personnage qui venait d’apparaître si soudainement ne lui laissa pas le temps de l’examiner plus à loisir; déjà il s’éloignait, et avec une telle hâte, qu’Arend crut que c’était la peur qui le faisait fuir.
Congo fut le premier à reconnaître le véritable motif de cette course précipitée. L’homme était parti dans la direction de la rivière.
«De l’eau! de l’eau! s’écria le Cafre; il a soif, il veut dé l’eau.»
La vérité de cette remarque fut bientôt évidente. L’étranger se précipita dans la rivière, plongea sa tête dans l’eau, et recommença ses plongeons absolument comme il aurait fait avec une bouteille pour la remplir d’eau.
Hendrick et Arend, ayant entendu la détonation du fusil, avaient craint un accident, et arrivèrent au galop juste au moment où l’Africain, après avoir étanché sa soif, revenait vers l’arbre où le jeune chasseur et Congo étaient restés.
Sans faire la moindre attention aux autres, l’homme alla droit à Groot Willem, et, d’un air de dignité, il commença à lui adresser un speech.
«Le comprenez-vous, Congo? demanda Willem.
— Oui, un peu,» répondit le Cafre. L’Africain remerciait Groot Willem de lui avoir sauvé la vie, et lui disait que n’importe ce que celui-ci lui demanderait, il le lui donnerait.
Groot Willem se demandait comment il avait pu sauver la vie à cet homme sans s’en apercevoir.
«C’est en tout cas être reconnaissant de bien peu et promettre assez! s’écria le sarcastique Hendrick; j’espère que Willem montrera de la retenue et ne demandera pas trop à ce brave homme.»
A ce moment Hans et Swartboy revenaient avec les chevaux de bât. Après avoir choisi pour camper une place près de l’endroit où la bête avait été tuée, les chasseurs s’occupèrent d’allumer un bon feu et de préparer le bivouac.
Toutes les mains se trouvèrent occupées, car il fallut aussi dépecer et faire cuire le petit buffle.
Pendant cette dernière opération, exécutée par le bushman, les autres, ayant Congo pour interprète, écoutèrent le récit de l’étranger.