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§ 1. Le grand Spéos d’Ebsamboul.

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Table des matières

En remontant le cours du Nil, dans la Nubie inférieure, à soixante lieues Sud-Ouest de la première cataracte, à douze lieues Nord de la dernière, le voyageur, attristé par l’aspect pauvre et désolé du pays, s’arrête tout à coup, frappé d’étonnement et d’admiration, en apercevant au milieu de l’encombrement des sables mouvants du désert, de gigantesques statues taillées en plein dans les flancs d’une colline de grès peu élevée, nommée Djebel Ebsamboul ( montagne d’Ebsamboul) et qui vient se plonger dans le Nil à la hauteur d’Aboccis.

Ces statues colossales, sculptées en ronde bosse dans le rocher, ont vingt et un mètres de hauteur. Entre les fauteuils où sont assises les deux statues du milieu, on voit une porte étroite: c’est l’entrée d’un spéos ou temple souterrain, connu sous le nom de grand temple de Phré ou d’Ebsamboul (quelques voyageurs écrivent Ibsamboul ou même Abou-Sembil); les quatre statues colossales représentent Rhamsès II, dit le Grand, ou Sésostris, le Pharaon qui construisit ce temple imposant et le consacra au dieu soleil Phré, dont l’image est représentée par la cinquième statue colossale qui surmonte la porte du spéos.

En franchissant cette porte, on pénètre dans l’intérieur du temple, qui est digne, en tous points, de la façade. La première salle dans laquelle on entre, est le pronaos, vaste salle, large de seize mètres et profonde de dix-sept mètres cinquante centimètres; elle est soutenue par huit piliers isolés, alignés sur deux rangées, contre lesquels sont adossées huit statues de dix mètres chacune, taillées dans le roc comme les piliers eux-mêmes. Ces huit statues sont debout, les mains croisées sur la poitrine; elles représentent encore Rhamsès le Grand, et les conquêtes de ce Pharaon sont retracées dans une file de grands bas-reliefs historiques qui ornent les parois à droite et à gauche; un de ces bas-reliefs, représentant son char de triomphe, accompagné de groupes de prisonniers nubiens, nègres, etc., de grandeur naturelle, offre une composition de toute beauté et du plus grand effet. L’ensemble de cette vaste et mystérieuse enceinte, qui ne reçoit de jour que par la porte, est saisissant, et les huit statues colossales qui soutiennent le plafond lui donnent un air de grandeur et de solennité fort remarquable.

Du pronaos on passe dans le naos ou cella, salle moins vaste, que supportent par le milieu quatre gros piliers.

Puis, on entre par trois portes différentes dans une troisième pièce, moins vaste encore, qui communique au sékos ou sanctuaire, petite salle profonde de sept mètres, au fond de laquelle sont assises sur un même banc quatre belles statues, plus grandes que nature et d’un très-bon travail, représentant les trois divinités de la Trimourli ou Trinité égyptienne (Ammon-Rha, Phré, Phtha), puis, assis au milieu d’elles, Rhamsès le Grand.

De chaque côté du sanctuaire, il y a une petite pièce dont l’entrée s’ouvre sur la cella. Ces deux petites salles ne semblent pas avoir été terminées.

Après les proportions imposantes de l’ensemble, il faut admirer encore l’exécution des bas-reliefs sculptés et des statues qui décorent chaque salle. Ces statues et ces bas-reliefs paraissent avoir été enduits d’une couche de stuc et peints par-dessus de couleurs riches et variées. Le fond du plafond est bleu; une bordure tricolore ornée d’oiseaux symboliques l’encadre.

Quand on sort de ce spéos, les magnificences que l’on vient d’admirer font trouver plus misérable encore le pays environnant.

Il n’y a pas fort longtemps que ces restes splendides de la vieille civilisation égyptienne sont connus.

En mars 1816, le chevalier Drovetti, consul général de France en Egypte, découvrit par hasard la façade du spéos, mais rien ne put faire consentir les superstitieux habitants, pas même l’appât du gain, à lui ouvrir l’issue du temple: les plus grandes calamités devraient fondre sur ces braves gens, si le temple était une fois ouvert aux chrétiens.

Un an plus tard, Belzoni, voyageur anglais, fut plus heureux, il fit déblayer l’entrée et pénétra jusqu’au sanctuaire; il trouva même dans la grande salle deux sphinx à tête d’épervier (symbole de Phré, le dieu soleil) qu’il fit transporter en Angleterre.

Depuis cette époque, le temple d’Ebsamboul, rendu célèbre par les relations de ces premiers visiteurs, n’a. pas cessé d’être le principal objet des excursions des Européens et le sujet de leur admiration.

«C’est la plus gigantesque conception, dit l’un d’eux, M. Ch. Lenormant, qu’ait jamais enfantée le génie des Pharaons.»

«Le temple d’Ebsamboul, dit un autre, M. Champollion jeune, vaut à lui seul le voyage de Nubie.»

Malheureusement, toutes ces merveilles se dégradent de plus en plus chaque jour.

Quant à l’antiquité de ce spéos, quelques écrivains le considèrent comme le modèle primitif de toute l’architecture égyptienne, mais les légendes hiéroglyphiques et les sujets des bas-reliefs paraissent montrer clairement que ce temple appartient à la dix-neuvième dynastie, ou dynastie thébaine, dont le troisième Pharaon, Rhamsès II Meïamoun, ou, si l’on veut, Sésostris, aurait régné de 1400 à 1339 avant Jésus-Christ, ce qui fait une antiquité encore assez respectable.

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