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V

Table des matières

— Quelque habileté rhétorique que j’y mette, je ne saurai, Messieurs, devant vos esprits clairvoyants, escamoter la fatale pétition de principes qui m’attend au début de mon discours.

Messieurs, nous aurons beau faire chacun, nous n’échapperons pas à la pétition de principes. Or, qu’est-ce qu’une pétition de principes? Messieurs, j’ose le dire: toute pétition de principes est une affirmation de tempérament; car, où les principes manquent, là s’affirme le tempérament.

Quand je déclare: Il faut avoir un aigle, vous pourrez tous vous écrier: Pourquoi? — Or, que voulez-vous que je réponde qui ne puisse se ramener à cette formule où s'affirme mon tempérament: Je n’aime pas les hommes; j’aime ce qui les dévore.

Le tempérament, Messieurs, est ce qui se doit affirmer. Nouvelle pétition de principes, direz-vous. Mais je viens de démontrer que toute pétition de principes est une affirmation de tempérament; et comme je dis qu’il faut affirmer son tempérament (car il importe), je répète: je n’aime pas l’homme; j’aime ce qui le dévore. — Or qui dévore l’homme? — Son aigle. Donc, Messieurs, il faut avoir un aigle. Je pense que voilà qui est suffisamment démontré.

... Hélas! je vois, Messieurs, que je vous ennuie; certains bâillent. Je pourrais, il est vrai, placer ici quelques plaisanteries; mais vous les sentiriez factices; j’ai l’esprit irrémédiablement sérieux. — Je préfère laisser circuler quelques photographies libertines; elles feront tenir tranquilles ceux que mes paroles ennuient; ce qui me permettra de continuer.

Prométhée but une g’org'ée d’eau. L'aigle fit en pirouettant trois fois le tour de Prométhée, puis salua.Prométhée reprit:

SUITE DU DISCOURS DE PROMETHEE

— Messieurs, je n’ai pas toujours connu mon aigle. C’est là ce qui me fait induire, par un raisonnement qui porte un nom particulier dont je neme souviens plus, dans la logique, que je n’étudie d’ailleurs que depuis huit jours, — ce qui me fait induire, disais-je, bien que le seul aigle ici présent soit le mien, que, Messieurs, un aigle, vous en avez tous un.

J’ai tu jusqu’à présent mon histoire; d’ailleurs jusqu’à présent je ne la comprenais pas bien. Et si je me décide à vous en parler, maintenant, c’est que, grâce à mon aigle, elle m’apparaît maintenant merveilleuse.

Oeuvres complètes de André Gide: Romans

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