Читать книгу La cornue vivante et ses mystères - Auguste 1802-1890 Debay - Страница 24
DE LA DIGESTION
ОглавлениеDES SUBSTANCES ALIMENTAIRES EN GÉNÉRAL ET DE LEURS CURIEUSES TRANSFORMATIONS DANS LE TUBE DIGESTIF
La digestion est une des plus importantes fonctions de l’organisme humain; son influence sur le physique et sur le moral est incontestable. — Une digestion facile rend le corps dispos et l’esprit gai; — une digestion pénible alourdit les membres, assombrit le caractère et obscurcit les idées. — Une indigestion abat les forces, produit un malaise général. — L’estomac et les intestins fatigués, soit par des excès d’aliments et de boissons, soit par toute autre cause, fonctionnent mal, d’abord; et, si l’indigestion se produit souvent, l’estomac s’irrite, s’enflamme, ou, selon le tempérament du sujet, contracte une de ces affreuses maladies qu’on nomme névroses, gastralgie, gastrite chronique flatulente, etc. Malheur aux imprudents qui ne leur opposent pas un prompt remède!... Plus de repos pour eux..., leurs jours s’écouleront désormais dans la souffrance et la tristesse. — Cet avis donné sur l’importance des bonnes digestions, pour la santé, nous allons initier le lecteur au mystérieux travail qui se fait dans l’estomac et les intestins, pour rendre les aliments assimilables à notre propre substance.
§ 1.
Digestion des viandes et des madères contenues dans divers aliments
Les personnes étrangères à la physiologie, croient que tous les aliments, pris dans un repas: pain, viandes, légumes, fruits, etc., se digèrent dans l’estomac; èrreur, car ce n’est pas tout à fait ainsi que se passent les choses. La démonstration suivante le prouvera.
Les viandes, ainsi que les matières azotées contenues dans les œufs, le lait, le fromage, les légumineuses, les céréales et autres végétaux, sont digérées dans l’estomac, ou, pour parler plus exactement, sont attaquées et dissoutes par le fluide gastrique. Mais il faut que les aliments aient été broyés et préalablement imprégnés de salive; nous verrons, plus loin, que la salive est une des humeurs nécessaires à la digestion de tous les aliments dont l’homme fait usage. C’est dans ce but qu’on recommande la mastication complète des aliments pour obtenir une bonne digestion.
Les graisses, huiles et fécules, provenant d’aliments divers, n’éprouvent aucune transformation dans l’estomac, c’est dans l’intestin duodénum ou second estomac, que leur digestion s’opère. Voici comment: — Les matières grasses contenues dans le chyme ou bouillie alimentaire sortie de l’estomac, rencontrent dans le duodénum, la bile et le suc pancréatique sécrétés, en abondance, par le foie et la glande pancréas, au moment de la digestion. Sous l’action combinée de ces deux fluides alcalins, les graisses sont entièrement émulsionnées, c’est-à-dire, divisées en une infinité de globules microscopiques qui leur donnent l’aspect d’une émulsion d’amandes.
Les sels divers: chlorures, carbonates, phosphates, etc., contenus dans les aliments et boissons, la plupart solubles dans l’eau naturelle ou acidulée, sont pris par les vaisseaux absorbants de l’estomac et des intestins.
Les viandes dissoutes dans l’estomac, ainsi que les matières azotées des autres aliments, doivent être transformées en albumine et en fibrine liquides, avant d’être absorbées par les vaisseaux chylifères et être_ versées dans le sang veineux. — La fibrine du sang sert à former la chair ( les muscles ); — le rôle de albumine est de remplir les intervalles musculaires et de former les tissus fibreux du corps.
Ainsi donc, les viandes, les graisses, les fécules et les sels trouvent dans le canal digestif, chacun en particulier, leurs dissolvants; — pour les viandes et matières azotées, le dissolvant est la pepsine, partie essentielle du suc pancréatique; — pour les graisses et les fécules ce sont la bile et le suc pancréatique; — pour les sels, c’est l’eau simple ou combinée à des acides.
Ce qu’on vient de lire n’est que le commencement des phénomènes de la digestion; d’autres phénomènes plus intéressants, ceux des transformations, vont se succéder dans les intestins. — Lorsque les viandes ont été dissoutes par le fluide gastrique; après que les matières grasses et les fécules ont été émulsionnées par le suc pancréatique et la bile; — lorsque enfin l’eau des boissons a été en partie absorbée par les radicules veineuses, la bouillie alimentaire quitte le duodénum ou second estomac, et descend dans l’intestin grêle . — A mesure qu’elle descend, les trois ordres de vaisseaux chylifères, lymphatiques et veines capillaires, pompent les sucs de cette bouillie qui tient en dissolution les viandes, les graisses, les sels et l’eau qu’on a mangés et bus. Ces sucs mélangés, auxquels on a donné le nom de chyle, ne deviennent réellement du chyle pur qu’en traversant les glandes mésentériques, formées d’un entrelacement des vaisseaux chylifères. (Voyez leur description, chap. II, paragraphe 14). C’est dans ces glandes qu’a lieu l’élaboration du chyle, qui s’eu échappe pour aller se jeter dans le canal thoracique et, de là, dans la veine sous-clavière gauche.
§ 2
Transformation des viandes
Avant d’être absorbées parles vaisseaux chylifères, les viandes et les matières azotées des autres aliments sont, ainsi que nous l’avons dit plus haut, transformées en fibrine et en gélatine; c’est sous cette forme qu’elles arrivent dans la circulation sanguine, pour être dirigées, par une loi mystérieuse, l’une sur les muscles, l’autre sur les tissus fibreux.
§ 3
Transformation des graisses et des Pécules
Les sucs gastrique et pancréatique unis au mucus intestinal produisent des transformations encore plus merveilleuses que celles produites sur des viandes. — Ces trois sucs combinés émulsionnent les graisses; ils dissolvent l’amidon du pain et des végétaux, et le transforment:
1° En dextrine; — 2° en glucose; — 3° en acide lactique qui passe, avec le chyle, dans les glandes chylifères, où il subit la quatrième transformation, et devient, — 4° acide butyrique; c’est sous cette dernière forme que le pain et les fécules passent dans le sang. Donc, les fécules amylacées, autrement dit l’amidon des céréales et autres végétaux, subit quatre transformations dans la cornue vivante. N’est-ce pas merveilleux!...
§ 4
Direction des sels alimentaires dans les organes
Les sels existent en assez grand nombre, dans nos aliments et boissons. — Leur dissolution a lieu dans l’estomac; leur absorption se fait partie dans ce viscère et partie dans les intestins. — La présence des sels dans le sang, prouve qu’ils sont aussi nécessaires à l’entretien de l’organisme humain, que les autres aliments. — En vertu de la loi dite d’élection, chaque sel prend la direction de l’organe où son rôle l’appelle. Nous citerons comme exemples: le chlorure de soude qui se dirige spécialement sur les cartilages; — les phosphates et carbonates de chaux, sur les os; — les sels de potasse, de magnésie et peu de soude, sur les muscles; — dans la pulpe cérébrale et la moelle épinière, on rencontre l’acide phosphorique; — les sels de fer sont portés dans le sang; — le soufre, la silice et le fer, dans la moelle et l’enveloppe des cheveux et des poils. En un mot, tous les sels alimentaires ont leur organe d’élection, sur lequel ils se dirigent invariablement.
§ 5
Sécrétions. — Nutrition. — Excrétions
Si nous sortons du domaine des transformations, pour entrer dans celui des sécrétions ou élaborations glandulaires, les phénomènes deviennent de plus en plus curieux, mais leur cause est toujours un mystère. — Il n’est pas indifférent à toute personne intelligente d’apprendre, de savoir dans quels organes, dans quelles régions de son corps, vont se loger les produits multiples de la digestion; pourquoi le volume et le poids de son corps conservent un équilibre plus ou moins parfait? — pourquoi il engraisse ou maigrit? — pourquoi il conserve ou perd la santé ?... Il est hors de doute que ces questions sont intéressantes à résoudre. Nous tâcherons de les traiter aussi clairement que possible; mais, il faut le dire, la connaissance des diverses pièces qui composent l’appareil de la digestion, est indispensable pour bien en comprendre le mécanisme. Or, c’est en lisant et relisant le chachapitre II, qu’on acquerra cette connaissance.
Le lecteur sait déjà que le chyle est formé des divers produits alimentaires digérés et transformés; qu’il est versé dans le sang veineux conjointement avec la lymphe. Ce sang noir, chargé de carbone, impropre à la nutrition, doit être artérialisé, c’est-à-dire changé en sang artériel, pour aller vivifier tous les organes du corps. Le moyen, très-simple, dont s’est servi la nature, a été de le faire passer dans les poumons. En traversant ces organes, l’oxygène de l’air qu’on a respiré, brûle son carbone et le transforme en sang rouge vermeil. Ce sang ainsi artérialisé, passe du poumon dans le côté gauche du cœur qui, au moyen de la grosse artère aorte, le lance dans toute les parties du corps.
Le sang artériel pénètre toutes les membranes, tous les tissus et organes de l’économie humaine; il n’est aucune partie qui n’en reçoive sa part. C’est surtout dans les organes glandulaires répandus, avec profusion, sur la totalité du corps, que le sang artériel subit de merveilleuses transformations. Depuis les glandes énormes, telles que les poumons, le foie, la rate, jusqu’aux follicules ou glandes microscopiques, l’anatomiste en rencontre partout. — La peau est criblée de petits trous ou pores qui sont les canaux excréteurs de glandes minuscules, rejetant au dehors le produit de leur travail éliminateur, sous forme de sueurs sensibles ou insensibles (transpiration et perspiration). Enfin, dans tous les tissus, dans toutes les membranes du corps, à l’intérieur comme à l’extérieur, il existe des milliers de petites glandes à peine visibles à l’œil nu; ce sont autant de laboratoires microscopiques où s’opèrent les décompositions et transformations du sang, en humeurs récrémentitielles ou excrémentitielles.
On distingue deux sortes ou systèmes de glandes: — 1° les récrémentitielles qui préparent les humeurs assimilables; — 2° les excrémentitielles, qui expulsent du corps les matériaux usés, dont le séjour prolongé deviendrait nuisible; d’où il résulte que la nutrition se résume dans un échange de matières.
Chaque glande et glandule saisit dans le sang, qui lui arrive, les molécules nécessaires à sa fonction, les travaille et se les approprie.
Ainsi, les glandes salivaires et celles de l’estomac, retirent du sang les éléments nécessaires à la composition de la salive et du fluide gastrique; — le foie et le pancréas en retirent également ce qui leur est nécessaire pour produire la bile et le suc pancréatique, quatre humeurs absolument indispensables à la digestion des aliments.
D’un autre côté, les reins, qu’on pourrait dénommer glandes dépuratives, puisque leur fonction est d’expulser, de notre économie, l’urine contenant un principe très-azoté nommé urée, et plusieurs sels qui, pour ne point nuire à la santé, doivent être éliminés du corps. — Les glandes sudoripares qui, au moyen des sueurs, expulsent un excès de calorique et des sels. — Les glandes lacrymales et nasales sécrétant les larmes et le mucus. — Les glandes sébàcées et vaginales servant à lubrifier certaines parties du corps. — Les glandes prolifères et ovariques élaborant les sucs mystérieux qui perpétuent l’espèce humaine. — Les glandes adipogènes sécrétant la graisse, dispersées de tous côtés et notamment sous la peau, sous le menton, aux seins, etc., et dans les épiploons, où des amas de graisse s’accumulent et produisent ces ventres obèses, désespoir des constitutions lymphatiques. — Nous ajouterons, en passant, que les sujets prédisposés à l’obésité, qui commettent l’imprudence de se nourrir d’aliments gras et féculents, ne sauraient éviter cette gênante infirmité.
Ce qu’il y a de vraiment admirable dans ce vaste système glandulaire, depuis la plus grosse glande jusqu’à la plus minime, c’est que toutes ne retirent du sang artériel que la partie strictement nécessaire à leurs fonctions spéciales; on les croirait dirigées par un instinct!... et dans ces milliers de laboratoires microscopiques, le sang est décomposé, puis transformé en humeur assimilable ou en humeur excrémentitielle.
Comment s’opèrent ces merveilles?.... Là est le secret de la nature que l’homme n’a encore pu découvrir; le découvrira-t-il un jour? C’est plus que douteux.
L’organisation humaine est bornée à cinq sens; elle ne saurait dépasser cette limite. — L’enfant qui naît complètement privé d’un sens sera privé durant sa vie entière des idées attachées à ce sens; c’est évident. Ergoter sur ce sujet, c’est perdre son temps: Avouer l’incompétence humaine en pareille matière, c’est être sage et faire preuve de bon sens.
Nous concluons: — La vie de tous les êtres, dans Le règne végétal comme dans le règne animal, est la résultante d’un double mouvement de composition et de décomposition. D’un côté, assimilation des aliments transformés en sucs nutritifs par la digestion; de l’autre côté, rejet des molécules usées, autrement dit échange de matières.
Notre corps se détruit et se renouvelle incessamment, jusqu’au jour où le renouvellement de la matière cesse; alors..... la vie s’éteint.
Mais rien ne peut absolument disparaître dans l’univers; la plus petite parcelle du corps le plus ténu ne saurait être anéantie. La vie circule partout dans l’espace infini; et tout se transforme: la mort n’est pas le néant!.... De ce cadavre inerte d’autres vies vont bientôt éclore..... Telle est la loi immuable de la nature.