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LETTRES DE MMES. DE VILLARS, DE COULANGES, ET DE LA FAYETTE; DE NINON DE L'ENCLOS, ET DE MADEMOISELLE AÏSSÉ; Accompagnées de Notices biographiques, de Notes explicatives, et de la Coquette Vengée, par Ninon de l'Enclos.
SECONDE ÉDITION.
TOME PREMIER
LETTRES DE MADAME DE VILLARS, A MADAME DE COULANGES
LETTRE XXXVI

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Madrid, premier mai 1681.

Jamais rien au monde ne m'a paru moins un compliment que tout ce que vous me dites, ma chère madame, sur l'obligeante envie que vous me marquez que j'aille loger chez vous en arrivant à Paris. Soyez bien persuadée que je pense et que je sens sur cela tout ce qu'il faut pour inspirer une tendresse vive et reconnoissante. Mes enfans vous feront mille excuses de ma part, de ce que je ne puis faire ce que vous souhaitez. Ce sont des excuses bien différentes de celles que l'on emploie pour refuser une grâce ou un service que l'on ne peut rendre. Mais votre cœur est fait de manière que je ne puis douter que ce ne soit vous faire une espèce d'offense de mettre quelque obstacle aux services que vous voulez rendre. Je vous demande donc une infinité de pardons; je m'en demande à moi-même de m'opposer à la joie que j'aurois de me trouver à portée de vous voir, de vous parler à tout moment. Je ne suis pas destinée à des plaisirs continuels, il s'en faut bien; et, pour changer de discours, je vous avouerai que, depuis quelque temps je suis moins empressée de mon retour à Paris; car vous saurez que M. de Villars prit la résolution de me faire partir, quand il sut, par la lettre du roi, son maître, qu'il le rappeloit. Il crut, pour plus grande commodité, qu'il étoit plus à propos que je m'en allasse la première, pour être en état de faire plus de diligence, débarrassé de femmes, de hardes et d'équipages; ne doutant point qu'au plus tard, trois semaines ou un mois après, il n'eût ordre du roi pour partir, et qu'il n'y eût un autre ambassadeur nommé. Mais je vois présentement qu'on ne parle de rien, et que M. de Villars peut demeurer encore ici long-temps. Cela étant, je ne voudrois plus m'en aller, pour ne pas laisser mon mari dans cet ennuyeux pays, où je puis être comptée pour quelque chose, par rapport au dénuement de toute sorte de plaisirs. Cependant M. de Villars ne pouvant s'imaginer d'être ici pour long-temps, et les chaleurs approchant, veut que je parte. A propos de cela, si vous trouvez par hazard, sur votre chemin, quelqu'un qui dise que le roi ait ordonné que je m'en revinsse en France, dites hardiment, madame, qu'il n'en est rien; sa majesté n'en a jamais écrit un mot à M. de Villars. Si ce que je vous écris là n'étoit pas vrai, vous croyez bien que je ne vous manderois pas le contraire. Vous voyez à quoi se réduisent mes vanteries, qui sont de vouloir établir, parce que cela est vrai, que le roi n'ordonne point de me faire partir, par la raison de mes malversations. Je vous entretiendrai bien, madame, quand je vous verrai. Il ne me sera, je crois, guère difficile de vous faire avouer que je ne mérite pas beaucoup de blâme sur ma conduite en cette cour; et, sans me vanter, peut-être n'ai-je fait tort à la conduite de personne. Adieu, ma chère madame.

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