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LETTRES DE MMES. DE VILLARS, DE COULANGES, ET DE LA FAYETTE; DE NINON DE L'ENCLOS, ET DE MADEMOISELLE AÏSSÉ; Accompagnées de Notices biographiques, de Notes explicatives, et de la Coquette Vengée, par Ninon de l'Enclos.
SECONDE ÉDITION.
TOME PREMIER
LETTRES DE MADAME DE COULANGES, A MADAME DE SÉVIGNÉ
NOTICE SUR MADAME DE COULANGES

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Madame de Coulanges a laissé d'elle la réputation d'une femme très-aimable et de beaucoup d'esprit; mais on ne trouve dans les livres, pour ainsi dire, aucune particularité, aucun détail sur sa personne. Il seroit aujourd'hui fort difficile, et peut-être même impossible, de suppléer entièrement à leur silence. A la distance où nous sommes déjà du siècle de Louis XIV, comment puiser dans la tradition des renseignemens certains sur les personnages de ce siècle, lorsque les écrivains du temps ont négligé de nous en transmettre? Les Lettres de madame de Sévigné sont presque le seul écrit où il soit question de madame de Coulanges. Nous allons en extraire le peu de notions biographiques qu'elles offrent sur cette femme spirituelle.

Madame de Coulanges naquit en 1631, de M. du Gué-Bagnols, intendant de Lyon.

Elle épousa Philippe-Emmanuel de Coulanges, conseiller au parlement de Paris, puis maître des requêtes, mort en 1716, âgé de 85 ans. M. de Coulanges était cousin-germain de madame de Sévigné, dont sa femme devint l'amie intime et presque inséparable. Plein d'esprit et sur-tout de gaîté, très-agréable en société, à cause de ses saillies et de ses chansons, il avoit peu d'aptitude ou du moins peu de goût pour les fonctions graves et laborieuses de la magistrature. On raconte qu'étant chargé de rapporter une affaire, où il s'agissoit d'une marre d'eau que se disputoient deux paysans dont l'un s'appeloit Grapin, il s'embarrassa tellement dans le détail des faits, qu'il fut obligé d'interrompre son récit: Pardon, messieurs, dit-il aux juges; je me noie dans la marre à Grapin, et je suis votre serviteur. Depuis cette aventure, il ne voulut plus être rapporteur, et il finit par se démettre de sa charge pour faire des voyages, des chansons et de bons dîners.

Madame de Coulanges, fille d'un simple intendant de province, et femme d'un homme de robe, qui avoit renoncé à son état, n'avoit aucun rang à la cour; et cependant elle y jouissoit de beaucoup de considération. Elle étoit nièce de la femme de le Tellier, ministre d'état, depuis chancelier, et cousine du fameux Louvois, ministre de la guerre. La parenté lui donnoit un certain crédit auprès de ces deux hommes puissans; et, comme on peut croire, ses amis lui fournissoient quelquefois l'occasion d'en faire usage. C'étoit sur-tout auprès de Louvois qu'on réclamoit ses bons offices, dans ce temps de guerres continuelles, où les emplois de l'armée passoient si rapidement de main en main.

C'étoit beaucoup, pour avoir des succès à la cour, que d'être nièce et cousine de ministre; mais ceux de madame de Coulanges tenoient encore à une autre cause bien plus honorable pour elle. C'est ce que madame de Sévigné a exprimé d'une manière si vive et si ingénieuse, en disant: l'esprit de madame de Coulanges est une dignité. Cet esprit consistoit à dire avec grâce, avec aisance, des choses fines et imprévues, des mots vifs et piquans. On appeloit cela les épigrammes de madame de Coulanges. Voici ce qu'en dit madame de Caylus dans ses Souvenirs. «Madame de Coulanges, femme de celui qui a fait tant de chansons… avoit une figure et un esprit agréables, une conversation remplie de traits vifs et brillans; et ce style lui étoit si naturel, que l'abbé Gobelin dit, après une confession générale qu'elle lui avoit faite: Chaque péché de cette dame est une épigramme. Personne en effet, après madame de Cornuel, n'a dit plus de bons mots que madame de Coulanges.» Madame de Sévigné, qui, dans ses Lettres, nous a conservé plusieurs bons mots de madame de Cornuel, que l'on cite encore tous les jours, en a rapporté aussi quelques-uns de madame de Coulanges; mais ils n'ont pas fait la même fortune. Il semble qu'ils avoient quelque chose de plus délié, de plus fugitif, qui tenoit davantage aux circonstances des personnes, des lieux et du temps; aux manières et au ton de celle qui les disoit; en un mot, nous pensons qu'ils perdroient beaucoup à être déplacés; et ce motif nous détermine à n'en transporter aucun dans cette Notice.

Madame de Coulanges, dont la malice s'égayoit souvent aux dépens des femmes que l'on soupçonnoit de quelque tendre foiblesse, fut à son tour l'objet des épigrammes; elle fut accusée d'avoir un peu plus que de l'amitié pour le marquis de la Trousse, cousin-germain de son mari. Le marquis étoit follement amoureux; elle, dure, méprisante et amère, à ce que dit madame de Sévigné, qui avouoit bonnement ne rien concevoir à leur conduite. «Il y auroit, dit-elle ailleurs, à parler un an sur l'état inconcevable et surprenant des cœurs de M. de la Trousse et de madame de Coulanges». Tout le monde n'avoit point là-dessus la même incertitude qu'elle. Madame de la Trousse étoit jalouse avec fureur de madame de Coulanges; et Louvois ayant envoyé M. de la Trousse sur la frontière, demanda publiquement pardon à sa cousine de ce qu'il lui ôtoit, pendant l'hiver, cette douce société. «Au milieu de toute la France, dit madame de Sévigné, elle soutint fort bien cette attaque; elle ne rougit point, et répondit précisément ce qu'il falloit».

Cette intrigue, vraie ou fausse de madame de Coulanges avec M. de la Trousse, n'empêcha, point la scrupuleuse et dévote madame de Maintenon d'avoir toujours le plus vif attachement pour son ancienne amie de l'hôtel de Richelieu. Elle vouloit toujours l'avoir auprès d'elle à Versailles et à St. – Cyr, et alloit elle-même la voir quand elle étoit malade.

Nous ignorons dans quelle année est morte madame de Coulanges.

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