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XVII

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Table des matières

Gédéon sifflait comme un merle, lorsqu’il fut appelé par le marchef de son escadron: on allait enfin lui donner le brillant uniforme.

Gédéon suivit le marchef au magasin d’habillement.

Là trône et règne le capitaine d’habillement, un capitaine à part.

Celui du 13e est très-marié et on ne peut plus bourgeois. Il prétend avoir l’état militaire en horreur, et fera pour ce motif, sans doute, toutes les démarches imaginables pour reculer l’heure de sa retraite.

Il ne passe pas une heure de la journée sans s’écrier: Chien de métier! et, dans son exaspération contre le pantalon garance, il a juré que, dût-il faire acte d’autorité paternelle, son fils ne serait jamais troupier. Aussi l’a-t-il envoyé à la Flèche, où il pioche l’X en vue de Saint-Cyr.

C’est un gros homme à la face épanouie; l’habitude qu’il a prise de toujours gonfler ses joues comme s’il soufflait sur sa soupe, lui donne un faux air d’ange bouffi. Depuis longtemps d’ailleurs il a renoncé aux vanités de la fine taille, et son ventre croît en liberté dans les plis d’un pantalon à ceinture élastique. Il porte des uniformes aisés.

Sa position lui permet de vivre presque en dehors du régiment, et il en profite, sauf pour ce qui concerne le café.

Sa vie serait donc heureuse, si, de temps à autre, il n’y avait les grandes revues d’inspection—à cheval. Cette grande revue est le fantôme de ses nuits.

Ce jour-là, bon gré mal gré, il faut sangler le ceinturon et monter à cheval.

Monter à cheval! ô terreur! Ce n’est pas qu’une fois en selle il craigne de tomber, oh! non: il a, dit un mauvais plaisant de lieutenant, un trop bel aplomb pour cela; mais le difficile est d’arriver en selle.

Tous les hussards du 13e ont contemplé le capitaine d’habillement à cheval, nul jamais ne l’a vu ni monter ni descendre.

Comment s’y prend-il?

C’est un secret entre Dieu, son brosseur et lui. Et ce secret, nul ne l’a pénétré; mais il est à peu près établi qu’il emprunte sans façon le secours d’un escabeau.

Le gros capitaine regarda attentivement Gédéon; il le toisait, il lui prenait mesure.

—Qu’on apporte des uniformes, dit-il au maître tailleur.

L’essayage commença.

Au 13e hussards, où règne despotiquement la tradition d’élégance, habiller un bleu est une affaire capitale, le maître tailleur en sait quelque chose.

Ce n’est pas un de ces régiments où l’on n’admet que les trois tailles réglementaires, grande, moyenne et petite; où, pour habiller le soldat, on prend mesure sur sa guérite; où chaque homme peut impunément être «ficelé comme l’as de pique.»

Non. Le capitaine d’habillement ne lâche un hussard qu’après avoir trouvé le dolman qui lui donne du chic, ou qui du moins le coupe agréablement en deux.

On essaye, s’il le faut, cent uniformes: le colonel ne plaisante pas sur cet article.

Après le dolman, la pelisse et le pantalon, les bottes.

—Celles-ci, dit Gédéon, me vont très-bien, si ce n’est qu’elles me gênent abominablement et que je ne saurais marcher avec.

—Vous croyez-vous donc dans l’infanterie? répondit le capitaine.

Tandis qu’on donnait à Gédéon ses effets de petit équipement et ses armes, le capitaine lui demanda s’il avait de l’argent pour verser à sa masse.

Le marchef prit la peine de lui expliquer que la masse est une première mise que le gouvernement accorde à chaque soldat lors de son arrivée au corps. Cette masse varie suivant les armes; pour le 13e hussards elle est de 75 francs.

Naturellement, le premier équipement épuise presque la masse, et comme elle ne s’augmente que de quelques centimes chaque jour, il faut un temps assez long pour qu’elle remonte au chiffre réglementaire; encore faudrait-il supposer que le soldat n’userait que très-lentement les effets qu’il paye sur ses fonds.

Or, au 13e hussards, avoir sa masse complète est une excellente note. Gédéon déclara donc qu’il allait sur l’heure verser l’argent nécessaire.

—A la bonne heure! dit le capitaine, vous arriverez, vous: on va loin quand on a sa masse complète.

La toquade du capitaine d’habillement du 13e est de vouloir juger les hussards, seulement d’après l’état de leur masse. Il prétend que c’est un infaillible thermomètre qui ne l’a jamais induit en erreur.

Enfin Gédéon fut habillé, chaussé, coiffé et armé de pied en cap. On lui remit un livret, ce vade-mecum du troupier, sur lequel on inscrit ses dépenses à côté de ses états de service.

A la fin est imprimé un abrégé du code pénal militaire, et l’énumération des «devoirs du soldat envers ses supérieurs.»

Sur la première page, au-dessous de son nom écrit en grosses lettres, Gédéon aperçut son numéro matricule. Il était immatriculé sous le nº 1313, et il retrouva ce chiffre sur tous ses effets, depuis les tiges de ses bottes jusqu’au fond de son schako.

Comme il descendait l’escalier, chargé de tout son attirail, le marchef le rappela:

—Vous oubliez vos musettes, lui criait-il.

Gédéon remonta bien vite.—Quels peuvent être ces instruments? se demandait-il.

On lui remit deux sacs de toile, renfermant toute sorte de brosses, d’éponges, de peignes et d’étrilles.—Ce sont là, évidemment, se dit-il, les nécessaires de toilette de l’homme et du cheval; mais pourquoi ce singulier nom de musettes?

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