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L’ART CIVIL AU MOYEN AGE

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Table des matières


l’art exclusivement religieux du moyen âge devait succéder l’art civil. Le pape Grégoire VII ayant entrepris de réformer la discipline et de faire la guerre au luxe, arrêta ainsi ce développement de l’art dans les monastères. Saint Bernard éleva la voix contre la décoration des églises qu’il trouvait trop luxueuse.

L’Art, après s’être arrêté momentanément, changea simplement de direction, devint un art ayant une nouvelle méthode; il se sécularisa. Au lieu des artistes moines il y eut des laïques qui se firent peintres, sculpteurs et architectes.

Les nouveaux architectes prirent le nom de Francs-Maçons.

«Les monuments civils, a dit Reiné Ménard, sont l’expression vivante de la cité: pour qu’ils existent, il faut des institutions municipales. La société chrétienne avait eu à lutter dès son début contre les. croyances paiennes mal éteintes, contre la barbarie envahissante et l’infiltration de populations nouvelles, contre les incursions des Normands et le brigandage des barons. La véritable cité chrétienne, c’était le monastère. Là seulement étaient l’intelligence, le travail, l’esprit d’ordre et de civilisation. Exposés à de continuels pillages, mais s’enrichissant sans cesse par des donations pieuses et par le travail agricole et industriel, les abbayes, que reliait une règle commune, une langue commune et un intérêt commun, constituaient la véritable nation vivante et agissante.

«Autour de chaque monastère se groupaient peu à peu des habitations, et tout un peuple d’ouvriers laïques occupés par les moines; un monastère était une cité et suffisait à tous ses besoins. La salle capitulaire, où on délibérait sur les intérêts de la communauté, remplissait le rôle de nos hôtels de ville; les infirmeries, où l’on soignait les laïques attachés à l’abbaye aussi bien que les moines eux-mêmes, remplaçaient nos hôpitaux; les granges, où l’on resserrait les produits du sol pour en tirer parti, répondaient à no halles et marchés.

«Chaque monastère avait une bibliothèque nécessaire pour ceux qui se livraient à l’étude, une école pour l’enseignement des enfants, des ateliers organisés pour divers travaux industriels; tous avaient une église et la plupart étaient fortifiés. Jusqu’à l’établissement des communes il n’y a donc en France que deux espèces d’édifices, les monuments religieux et les châteaux forts.

«Mais quand le travail et l’industrie passèrent aux habitants des villes, il fallut créer des édifices d’un ordre absolument nouveau pour satisfaire aux besoins de la société laïque devenue prédominante. Alors se forma l’architecture civile, à laquelle nous devons nos hôtels de ville, nos hôpitaux, nos halles et une foule d’édifices municipaux, dont il serait absolument impossible de retrouver la trace avant le XIIe siècle. Ces monuments s’élevèrent petit à petit, non par le fait d’un caprice, mais pour obéir à une nécessité absolue, et ils prirent un développement proportionné à l’importance de la cité, appelée à se gouverner elle-même.»

Le beffroi devint le signe visible de la commune. Quand une ville était affranchie, elle avait le droit d’avoir un hôtel de ville. Si, dans les guerres civiles, si nombreuses à cette époque de troubles et de luttes, une ville perdait son droit de commune, il fallait raser le beffroi.

A Paris, le premier hôtel de ville s’appelait le Parlouer aux Bourgeois; il était placé près du grand Châtelet. Etienne Marcel acheta ensuite une maison pour servir d’hôtel de ville sur le quai de la Grève. On l’appelait maison aux Piliers.

De même que les artistes avaient mis un grand luxe à construire les églises et les monastères, on mit un grand luxe à construire les hôtels de ville et leurs beffrois.

«Les premiers beffrois isolésse composaient d’une grosse tour carrée, le plus souvent surmontée d’un comble en charpente recouvert d’ardoises ou de plomb, dans lequel étaient suspendues plusieurs cloches. Une galerie ou étage percé de fenêtres sur les quatre faces servait de postes pour les guetteurs qui, le jour et la nuit, avertissaient les citadins de l’approche des ennemis, découvraient les incendies, réveillaient les habitants au son des cloches ou des trompes.

«C’était du haut du beffroi qu’on sonnait les heures du travail ou du repos pour les ouvriers, le lever du soleil, le couvre-feu et que l’on annonçait au bruit des fanfares les principales fêtes de l’année. La tour contenait ordinairement des prisons, une salle pour les échevins et quelques dépendances, telles que dépôt d’archives, magasin des armes que l’on distribuait aux bourgeois dans les temps de troubles ou lorsqu’il fallait défendre la cité.»

Les maisons du moyen âge semblent avoir été construites en vue de la défense.

La façade des maisons était peu élevée et percée de fenêtres petites et toujours cintrées. Parfois même, il y avait des créneaux.

Les étages étaient placés en encorbellement les uns sur les autres; il s’en suivait que la rue étant plus étroite par le haut que par le bas, les maisons se trouvaient très rapprochées par leurs étages supérieurs. Cela pouvait servir à deux fins: d’abord les piétons qui circulaient le long des boutiques se trouvaient à couvert en cas de mauvais temps, et, ensuite, c’était très utile pour la défense.

La brique était mêlée aux pièces de bois apparentes, dans l’extérieur des maisons, ce qui produisait un ensemble décoratif agréable à l’œil. La forme et la dimension des fenêtres variaient suivant les localités.

En général, dans le Midi, les fenêtres étaient petites et assez rares, afin que le soleil et la chaleur pussent pénétrer plus difficilement à l’intérieur. Dans le Nord, au contraire, on faisait souvent de larges ouvertures; mais, pour éviter le froid, la plus grande partie des vitrages était à demeure et ne s’ouvrait pas. Dans l’intérieur de l’appartement, comme sur la façade de la maison, la décoration résultait de la nature même de la construction: les solives du plancher étaient apparentes et quelquefois enrichies d’ornements peints ou sculptés.

Les escaliers étaient très étroits et d’un accès peu facile: autres avantages pour la défense. Ils étaient ordinairement placés dans une tourelle à l’intérieur de la maison.


Les boutiques se trouvaient au rez-de-chaussé des maisons; elles étaient très petites et ne comprenaient que deux pièces: une pièce où travaillaient les ouvriers et une salle sur la rue où étaient déposées les marchandises.

Le vitrage était presque toujours absent.

La boutique se fermait au moyen de volets supérieurs et inférieurs: la partie inférieure se dressait pour former une tablette propre à l’étalage et la partie supérieure se relevait comme une tabatière.

Les acheteurs se tenaient au dehors de la boutique, dans laquelle ils n’entraient pas, l’étalage s’avançant sur la rue.

Afin de protéger les boutiques contre les audacieuses tentatives des voleurs, il y avait des grillages en fer forgé.

Comme il n’y avait alors pas d’annonce pour avertir les acheteurs, on attachait à une potence en fer une enseigne caractéristique souvent aux couleurs très voyantes.

Comme cela ne suffisait pas toujours pour attirer les pratiques; on envoyait des crieurs à pied et à cheval annoncer à travers la ville les denrées ou les marchandises que l’on devait vendre.

Dans les villes de Bretagne, les boutiques étaient munies de colonnes en granit portant, comme de nos jours, des portails en bois. Des tablettes inférieures et supérieures formaient aussi les volets et permettaient de fermer la boutique à la tombée du jour.

Dans les villes du Midi les architectes avaient ajouté à la physionomie pittoresque de ces boutiques des consoles ou corbeaux qui portaient des auvents en toile ou en bois, qui protégeaient l’arcade de la boutique contre les ardeurs du soleil.

Dans le Nord, les consoles historiées, en bois ou en pierre, offraient une grande ressemblance avec les gargouilles des églises.

Après avoir parlé des maisons du peuple, des travailleurs, il nous faut parler des demeures de la noblesse et de la haute bourgeoisie. Ceux-ci se firent construire des châteaux, à de grandes hauteurs, ce qui rendait la défense plus facile. La vue planant sur les vallées environnantes, ces demeures étaient devenues des repaires, de véritables nids d’aigles.

Quand les rapports avec l’autorité royale se furent améliorés, les châteaux et les riches demeures de la bourgeoisie furent construits dans la plaine avec créneaux, ponts-levis, mâchicoulis, remparts, etc., qui pouvaient au besoin protéger la demeure féodale contre les attaques et les assauts.

«On éleva des châteaux, des palais de plaisance, dit Viollet-le-Duc... C’était assez la coutume de donner aux forteresses l’apparence intérieure de palais, de telle sorte que, au dedans, ces constructions étaient faites pour se défendre, et que, au dehors, elles présentaient tous les charmes d’un palais de plaisance.»


Maison gothique (Dessin de M. Léopold GAUBUSSEAU).

Quant au mobilier des châteaux du moyen âge avant le XVe siècle, voici ce qu’en a dit Viollet-le-Duc:

«Le mobilier de la salle se composait de bancs à barres avec coussins, de sièges mobiles, de tapis ou tout au moins de nattes de jonc, de courtines devant les fenêtres et les portes; d’une grande table fixée au plancher, d’un dressoir, d’une crédence, de pliants et de la chaire du Seigneur. Le soir, des bougies de cire étaient posées sur les bras de fer scellés aux côtés de la cheminée, dans des flambeaux placés sur la table, ou sur des lustres formés au moyen de deux barres de fer ou de bois en croix supendues au plafond. Le fer de la cheminée ajoutait son éclat à cet éclairage. Le mobilier de la chambre consistait en un lit avec ciel ou dais, en une chaire; des coussins en grand nombre, quelquefois des bancs servant de coffres omplétaient ce mobilier. Des tapisseries de Flandre ou des toiles peintes tendaient les parois, et sur le pavé on jetait des tapis sarrazinois qu’alors on fabriquait à Paris et dans quelques grandes villes. Dans la garde-robe étaient rangés des bahuts renfermant le linge et les habillements d’hiver et d’été, les armes du seigneur; cette pièce devait avoir une certaine étendue, car c’était là que travaillaient les ouvriers et les ouvrières chargés de la confection des habits. On ne pouvait alors se procurer certaines étoffes qu’aux foires périodiques qui se tenaient dans les villes ou gros bourgs. Il fallait donc acheter à l’avance les fourrures, les draps, les soieries nécessaires pendant toute une saison. Or la plupart des seigneurs se chargeaient de fournir des vêtements aux personnes attachées à leur maison, et tout cela se façonnait dans le château.»

Les bahuts étaient alors des meubles indispensables; de même qu’ils servaient d’armoires pour le linge et les vêtements, ils servaient pour s’asseoir, car les sièges garnis de jonc ou de paille ne datent que du XVe siècle.

Quant aux lits de cette époque, ainsi que le dit M. Paul Lacroix, «ils varient de forme et de dimension: étroits et grossiers chez les pauvres et les moines, ils finissent par devenir, chez les rois et les nobles, d’une telle grandeur et d’un luxe tel, que ce sont de véritables monuments de menuiserie, où l’on ne monte qu’à l’aide d’escabeaux ou même d’échelles. L’hôte d’un château ne pouvait recevoir de plus grand honneur que de passer la nuit dans le même lit que. le seigneur châtelain; les chiens dont les seigneurs, tous grands chasseurs, étaient constamment entourés, avaient le droit de coucher là où couchaient leurs maîtres; c’est ainsi qu’on explique ces lits gigantesques mesurant jusqu’à douze pieds de large. Les oreillers étaient, si l’on en croit les chroniques, parfumés avec des essences, des eaux odoriférantes; ce qui pouvait bien, on le comprend, n’être pas une précaution inutile.»

La table sur laquelle on mangeait était le plus souvent de forme ronde et posée sur des tréteaux pliants, de manière à pouvoir facilement l’enlever. Le pourtour de la table était entouré d’un rebord de quelques centimètres, auquel s’accrochait une sorte de nappe qui servait plutôt d’ornement, car la table elle-même n’en était nullement recouverte.

«La viande, dit Viollet-le-Duc, était servie à chaque convive sur des tranchoirs, c’est-à-dire sur des morceaux de pain rassis, cuits exprès pour cet usage.

«Les écuyers tranchants, découpant les viandes, plaçaient chaque morceau sur ces tranchoirs rangés sur un plat; on les présentait aux convives, qui désignaient le morceau à leur convenance, afin qu’on le plaçât devant eux avec son tranchoir sur la nappe, ou, chez les grands, sur une assiette d’argent. Chacun coupait ainsi sa viande sur ce lit de pain, sans endommager la nappe ou sans faire grincer le couteau sur la vaisselle plate. Chez les petites gens on mangeait avec ses doigts. Quant aux potages, aux brouets, ils étaient servis dans des écuelles ou assiettes creuses, communes à deux convives; d’où la locution «à pot et à cuiller», c’est-à-dire dans la plus grande intimité avec quelqu’un.»

Une bible manuscrite du Xe siècle qui se trouve à la Bibliothèque nationale, renferme une miniature représentant le festin de Balthazar. On y voit de très curieux détails sur les repas de cette époque féodale.

Généralement, pendant la période du moyen âge, les halles étaient simplement de vastes espaces appartenant à un seigneur féodal ou à la ville, et sur lesquels on permettait la vente de marchandises. Les halles se tenaient sous des porches d’église, sous des portiques de maisons, sur la place, autour des hôtels de ville.

Dès le Xe siècle, Paris possédait une halle qui se tenait sur un terrain entouré d’un fossé.

Quand les villes s’enrichissaient par le commerce, la halle devenait un important monument qui arrivait parfois à une grande élégance.

Les ponts, imités primitivement des ponts des Romains, étaient presque toujours assez étroits et organisés pour la défense, comme on le voit au pont de Cahors, qui est accompagné de trois grosses tours portant sur le pilier des arches. Le grand pont, qui met Pont-de-l’Arche en communication avec l’autre rive de la Seine, est extrêmement célèbre, ainsi que le pont d’Avignon.

Comme les guerres étaient fréquentes, ces ponts duraient rarement longtemps et étaient souvent reconstruits.


Pendant les XIe, XIIe, XIIIe et XIVe siècle, on construisit un grand nombre d’hôpitaux. Ce furent les établissements religieux qui commencèrent à offrir des refuges assurés aux malades indigents. Comme les pestes étaient fréquentes au moyen âge, un grand nombre de monastères et de grands châteaux avaient fait élever, dans leur voisinage, des léproseries, des maladreries, petits hôpitaux desservis par des religieux. Jusqu’au XIVe siècle, ces lieux de refuge étaient construits de la même façon architecturale que les constructions religieuses.


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