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CHAPITRE V.

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Table des matières

ON apelle de ce mot tous les Ouvrages de Peinture, de Sculpture, &d’Architecture qui ont été faits tant en Egypte qu’en Gréce&en Italie depuis le tems d’Alexandre le Grand jusqu’à l’invasion des Gots, qui par leur fureur&leur ignorance firent périr tous les beaux Arts. Le mot d’Antique néanmoins est plus particuliérement en usage pour signifier les Sculptures de ces tems-là, tant Statuës&bas Reliefs, que Médailles&Pierres gravées. Tous ces Ouvrages ne sont pas également bons: mais dans les médiocres même, il y a un certain caractére de beauté qui fait que les Connoisseurs les distinguent des Ouvrages modernes.

Ce n’est pas de ces Sculptures modernes que l’on entend parler icy, c’est des Sculptures Antiques les plus parfaites,& que l’on ne regarde qu’avec étonnement. Les anciens Auteurs les ont mises au dessus de la Nature,&ne loüoient la beauté des hommes qu’autant, qu’elle avoit de conformité avec les belles Statuës.

Usque ab ungulo ad capillum summum est festivissima.

Est ne? Considera: vide signum pictum pulchrè videris.

Je pourrois citer une infinité d’autoritez des Anciens, pour prouver ce que j’avance, mais pour ne rien répéter, je renvois le Lecteur à ce que j’ay dit touchant l’Antique dans le Commentaire sur l’Art de Peinture de Charles-Alfonse du Fresnoy,&je me contenteray de rapporter icy ce que disoit un Peintre moderne, qui avoit beaucoup pénétré dans la connoissance de l’Antique, c’est le fameux Poussin: Raphaël, disoit-il, est un Ange comparé aux autres Peintres; c’est un Asne comparé aux Auteurs des Antiques. L’expression est un peu forte: je me serois contenté de dire que Raphaël est autant au dessous des Anciens: que les Modernes sont au dessous de luy, mais j’examineray cette pensée plus exactement dans la vie de Raphaël.

Il est certain que peu de personnes sont capables de découvrir toute la finesse qui est dans les Sculptures Antiques; parce qu’il faut pour cela un esprit proportionné à ceux des Sculpteurs qui les ont faites,&que ces hommes avoient le Goût sublime, la Conception vive,& l’Exécution éxacte&spirituelle. Ils ont donné à leurs Figures des proportions conformes à leur caractére,&ont désigné les Divinitez par des contours plus coulans, plus élégans,&d’un plus grand Goût que ceux des hommes ordinaires. Ils ont fait un chois épuré de la belle Nature,&ils ont éxcellemment remédié à l’impuissance où la matiére qu’ils employoient, les mettoit de tout imiter.

Le Peintre ne sçauroit donc mieux faire que de tâcher à pénétrer l’éxcellence de ces Ouvrages, pour connoître mieux la pureté de la Nature,&pour dessiner plus doctement&plus élégamment. Néanmoins comme il y a dans la Sculpture plusieurs choses qui ne conviennent point à la Peinture,&que le Peintre a d’ailleurs des moyens d’imiter la Nature plus parfaitement, il faut qu’il regarde l’Antique comme un Livre qu’on traduit dans une autre Langue dans laquelle il suffit de bien rapporter le sens &l’esprit, sans s’attacher servilement aux paroles.

Abregé de la vie des peintres

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