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Le 6 Mars, le Moniteur, journal officiel de l’empire français, publiait une note dans laquelle on lisait:

«Il n’est pas permis au chef d’une grande puissance comme la France de s’isoler des questions qui intéressent l’ordre européen; animée d’un esprit de prudence, qu’il serait coupable de n’avoir pas eu, il se préoccupe avec loyauté de la solution raisonnable et équitable que pouvaient recevoir ces détails et ces difficiles problèmes. Sont-ce là des rêves de guerre? C’est le propre de toute sage politique de chercher à conjurer les événements ou les questions de nature à troubler l’ordre, sans lequel il n’y a ni paix, ni transactions. Ce n’est pas du répit qu’il faut aux véritables affaires: c’est de la sécurité et de l’avenir. Une telle prévoyance n’est ni de l’agitation, ni de la provocation. Étudier les questions, ce n’est pas les créer, et détourner d’elles les regards et son attention, ce ne serait non plus, ni les supprimer, ni les résoudre.

Telle fut la politique du gouvernement français avant qu’on ne le forçât de courir aux armes.

Cette politique noble, prudente, à la fois ferme et pacifique, ayant été dénaturée, au delà du Rhin, par la calomnie, l’Autriche s’efforçant d’égarer l’opinion publique en Allemagne et de l’exciter contre la France, le Moniteur publia, le 16 mars, cette nouvelle note pleine de franchise.

«Une question vague, indéfinie, qui touche aux problèmes les plus délicats comme aux intérêts les plus élevés, surgit tout à coup dans le monde politique. Le gouvernement français y voit un sujet d’examen et un devoir de vigilance. Il ne se préoccupe de la situation inquiétante de l’Italie que pour la résoudre, de concert avec ses alliés et dans l’intérêt du repos de l’Europe. Est-il possible de montrer un désir plus sincère de dénouer pacifiquement les difficultés et de prévenir les complications qui résultent toujours du manque de prévoyance et de décision?

«Cependant une partie de l’Allemagne répond à celte attitude si calme par les alarmes les plus irréfléchies. Sur une simple présomption que rien ne justifie et que tout repousse, les préjugés s’éveillent, les défiances se propagent, les passions se déchaînent: une sorte de croisade contre la France est entamée dans les chambres et dans la presse de quelques-uns des Etats de la Confédération. On l’accuse d’entretenir des ambitions qu’elle a désavouées, de préparer des conquêtes dont elle n’a besoin, et l’on s’efforce, par ces calomnies, d’effrayer l’Europe d’agressions imaginaires dont la pensée n’a même point existé.

«Les hommes qui égarent de cette façon le patriotisme allemand se trompent de date. C’est bien d’eux que l’on peut dire qu’ils n’ont rien oublié ni rien appris. Ils se sont endormis en 1813, et ils se réveillent, après un sommeil d’un demi-siècle, avec des sentiments et des passions ensevelis dans l’histoire et qui sont un contre-sens par rapport au temps actuel; ce sont des visionnaires qui veulent absolument defendre ce que personne ne songe à attaquer.»

«Si le gouvernement français n’était pas convaincu que ses actes, ses principes et lu sentiment de la majorité du peuple allemand démentent les suspicions dont on voudrait le rendre l’objet, il aurait le droit d’en être blessé ; il pourrait y voir, non-seulement une injustice, mais encore une atteinte à l’indépendance de sa politique. En effet, tout le mouvement que l’on essaie d’exciter sur le Rhin à propos d’une question qui ne menace pas l’Allemagne, mais où la France est intéressée comme puissance européenne, ne tendrait à rien moins qu’à lui contester le droit de faire sentir son influence en Europe et de défendre ses propres intérêts, même avec la plus extrême modération. C’est là une prétention qui serait blessante si elle pouvait être sérieuse. La vie d’une grande nation comme la France n’est pas enfermée dans ses frontières; elle se manifeste dans le monde entier, par l’action salutaire qu’elle exerce au profit de sa puissance nationale en même temps que pour l’avantage de la civilisation. Quand une nation renonce à ce rôle, elle abdique son rang.

«Ainsi donc, contester cette légitime influence qui protège partout le bon droit, ou la confondre avec les ambitions qui le menacent, c’est méconnaître également le rôle qui appartient à la France et la modération dont l’Empereur a donné tant de preuves depuis que le peuple français l’a élevé à la responsabilité du pouvoir suprême.

«L’Empereur, qui a su dominer tous les préjugés, devait s’attendre à ce qu’ils ne fussent pas invoqués contre lui. Que serait-il arrivé, si, en montant sur le trône, il avait apporté les sentiments étroits et les souvenirs irrités auxquels on fait appel aujourd’hui pour le rendre suspect? Au lieu de se faire l’allié le plus intime de l’Angleterre, comme le lui conseillaient les intérêts de la civilisation, il fût devenu son rival, comme semblaient le lui commander les rivalités séculaires des deux peuples. Au lieu d’accueillir les hommes de tous les partis, il eût repoussé avec défiance les serviteurs des anciennes dynasties. Au lieu de raffermir et de calmer l’Europe, il l’eût ébranlée, en rachetant, au prix de sa sécurité et de son indépendance, les souvenirs de 1814 et de 1815.

«Si l’Empereur, cédant à de telles suggestions, avait voulu sans raison, renouveler, dans une ère de paix et de civilisation, les guerres et les conquêtes du premier Empire, il n’eût pas été de son temps, et il eût ainsi encouru le plus grand blâme qui puisse atteindre un chef de gouvernement. On ne règne pas avec gloire quand on obéit à des rancunes, à des haines. Il n’y a de gloire véritable pour un souverain que celle qui se fonde sur l’appréciation généreuse des besoins de son pays et sur la garantie éclairée des intérêts de la société.

«Nous constatons simplement ici une situation mise en lumière par tant d’actes décisifs de la politique de l’Empireur. Devant cette situation si nette et si franche, l’Europe se sentira affermie dans sa sécurité, et ceux qui veulent l’effrayer et la tromper éprouveront peut-être quelque embarras.

«Quant à la France, elle ne s’est pas émue jusqu’à présent de ces vagues rumeurs et de ces attaques injustes; elle ne rend pas toute l’Allemagne responsable de l’erreur ou de la malveillance de quelques manifestations qui ressemblent plutôt à de mesquins ressentiments qu’à des craintes sérieuses. Le patriotisme allemand, quand il n’est pas obscurci par des préventions, sait très-bien distinguer entre les devoirs qui l’obligent et les préjugés qui l’égarent. L’Allemagne n’a rien à craindre de nous pour son indépendance; nous devons attendre d’elle autant de justice pour nos intentions que nous avons de sympathie pour sa nationalité : c’est en se montrant impartiale qu’elle se montrera prévoyante et qu’elle servira le mieux la cause de la paix.

«La Prusse l’a compris, et elle s’est unie à l’Angleterre pour faire entendre à Vienne de bons conseils, au moment même où quelques agitateurs cherchaient à passionner et à coaliser contre nous la Confédération germanique. Cette attitude réservée du cabinet de Berlin est certainement plus avantageuse à l’Allemagne que l’emportement de ceux qui, en faisant appel aux rancunes et aux préjugés de 1813, s’exposent à irriter en France le sentiment national. Le peuple français a la susceptibilité de son honneur en même temps que la modération de sa force, et si on l’excite par la mecnace, on le calme par la conciliation.»

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