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III

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Je ne suis pour rien dans ce qu’ils font.

Je ne m’étonne pas que les anciens aient eu tant de peine à supporter l’exil du temps des empereurs. Ils se sentaient frappés par un seul homme, un césar; et cet homme-là de moins dans le monde, il leur semblait qu’ils retrouveraient leur patrie entière. Il me paraît qu’il en est autrement quand ce sont des peuples entiers qui, soit ignorance, soit lassitude, s’affaissent dans l’injustice. Car il doit vous sembler alors que vous seriez leur complice, si vous étiez resté au milieu d’eux. Et dans les ennuis de la proscription, il y a celte joie intérieure qui consiste à se dire: Dieu merci, je ne suis pour rien dans ce qu’ils font.

J’imagine que c’est là le sentiment qui a soutenu tant d’hommes exilés dans les Républiques, soit anciennes, soit modernes. Ils ont montré infiniment plus de force morale contre un peuple que ceux qui ont été frappés par un seul homme. D’un côté, le fier langage de Thucydide ou de Dante, de l’autre, les Tristes d’Ovide sous Auguste, de Mme de Staël sous Bonaparte.

Peut-être aussi que l’injustice exercée au nom d’un seul vous irrite, tandis que celle qui s’exerce au nom de tous fait pitié. On peut sentir de la colère contre un despote, on ne sent que de la commisération pour une foule aveuglée. Quel plaisir trouverais-je à fouetter de verges l’Océan? Le temps de ce plaisir de Xerxès est passé.

Le livre de l'exilé, 1851-1870

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