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Ce volume est un recueil d’études, d’esquisses, d’articles que j’ai publiés pendant la présente guerre et dont cette guerre est l’unique objet.

La plupart ont paru dans le Journal, dont le directeur, M. Charles Humbert, m’a admis à appuyer d’arguments historiques et les conseils d’énergie dont il fortifie la défense nationale et l’activité stimulante qu’il semble avoir héritée des hommes de l’an II.

Les lecteurs du Journal ont collaboré à mes articles. Plus d’un sujet m’a été indiqué par leurs lettres, surtout par celles qu’en si grand nombre soldats et officiers m’ont écrites du «front». Ma plume a exprimé souvent les espérances, les indignations, la sagesse de ces héros qui, au prix de leur vie, défendent la vie de la France contre les Allemands.

Si ces pages improvisées méritent d’être réunies en volume, c’est parce qu’elles gardent un écho de la pensée des combattants.

Echo exact, mais incomplet.

J’ai souvent reçu du «front» des lettres de reproches pour ma timidité, pour mes oublis, pour l’imprécision de mes dires. C’est à tort que mes correspondants me croient libre d’écrire tout ce qu’ils estiment vrai et utile. Je ne le suis pas. Il y a des choses que je m’interdis de constater ou de demander devant les Allemands, qui, je le vois par leurs journaux, me lisent. Il y a des choses que je crois qu’il serait utile de dire, même devant les Allemands. Mais la Censure n’est pas toujours de mon avis sur cette utilité : elle a interdit plus d’un de mes articles, même purement historiques; elle a, dans les articles qui ont pu passer, effacé des phrases que je croyais innocentes. Je ne dis point cela pour blâmer ou pour me plaindre, mais pour expliquer au lecteur une des raisons pour lesquelles il y a dans ces articles tant de lacunes, tant de réticences, tant de timides périphrases, parfois même un air d’incohérence.

C’est par l’histoire que j’ai essayé de commenter des incidents de la présente guerre, non pour critiquer des personnes ou signaler des fautes que le bon sens public critique ou aperçoit sans qu’il soit besoin de lui venir en aide, mais pour rappeler à la France actuelle les exemples de volonté, d’énergie, d’audace, de génie militaire que la France d’autrefois a donnés.

J’ai surtout proposé l’exemple de la Révolution française et de la Convention nationale, c’est-à-dire de la France envahie et chassant l’envahisseur par un effort à la fois enthousiaste et scientifique, par la fermeté ardente et dure avec laquelle elle tint le serment révolutionnaire de vivre libre ou mourir.

Je n’ai jamais conseillé à nos chefs civils ou militaires de singer les hommes de la Révolution, mais seulement d’être aussi énergiques qu’eux, aussi dévoués qu’eux à la patrie, aussi ingénieux qu’eux à forcer la victoire par l’audace, la ténacité et la science.

C’est pourquoi j’ai si souvent rappelé ce grand Comité de salut public, qui, dans des circonstances encore plus terribles que celles où nous nous trouvons, sut chasser l’envahisseur et assurer l’indépendance de la France en lui procurant le Rhin pour frontière.

Si ému que je sois du danger de ma patrie, de cette patrie qui me paraît encore plus aimable depuis que je la vois menacée de mort, je n’ai jamais été tenté d’accommoder la vérité historique au service de la France, comme les Allemands l’accommodent au service de l’Allemagne. Je n’ai proposé aux réflexions de mes lecteurs aucun incident, aucun acte de l’époque de la Révolution ou de l’époque de Gambetta qui ne soit ou que je ne croie irréprochablement exact dans les détails comme dans l’ensemble.

Si l’histoire m’a servi de passeport pour des vérités de bon sens, ce n’a jamais été aux dépens de l’histoire: ce n’est pas la trahir que d’y chercher des similitudes dont la vue peut nous éviter des fautes. En montrant, par l’exemple du général Trochu, les méfaits de l’indécision, je n’ai pas altéré la figure du général Trochu.

J’ai rangé ces articles par ordre chronologique: on verra ainsi la succession des vues et des impressions, les vicissitudes d’un esprit et d’une pensée au plein de cette guerre inachevée, les contradictions, les erreurs, les illusions, le mélange d’inquiétudes et d’espoirs, les hauts et les bas d’une âme qui a bonne volonté, mais qui souffre de son impuissance à collaborer par l’action. Il y a dans ces pages des redites, des fautes, des tâtonnements: je n’ai corrigé presque aucune de ces négligences. C’est œuvre de journaliste, c’est-à-dire improvisation, et la forme hâtive rappellera au lecteur que mes impressions et mes témoignages sont bien contemporains des événements.

J’ai donc daté chaque article. J’ai indiqué le journal auquel chaque article est emprunté : Journal, Information, Dépêche de Toulouse, Bulletin des armées de la République, Guerre Sociale, Révolution française, etc.

La guerre actuelle commentée par l'histoire

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