Читать книгу Programme des Épouses Interstellaires Coffret - Grace Goodwin - Страница 14
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ОглавлениеNatalie
Je suis Roark à l’extérieur de l’oasis, sa grosse main est douce et chaude. Je suis en vrac, des torrents d’émotions me submergent. Notre lien est instantané, si puissant que je ne peux le regarder sans que mon cœur s’emballe. Il est dominateur et exigeant, il m’a sautée comme un homme des cavernes, il m’a même tiré les cheveux. Il s’avère être un gentil géant, mon cœur fond devant tant de gentillesse.
Coucher avec lui est comme dans mes rêves. Je suis persuadée qu’il me conviendra en tous points.
Nous sortons de l’oasis, je sais, en sentant la chaleur me monter aux joues, que je rougis devant ses soldats qui saluent. Ils me dévisagent ouvertement, je fais de mon mieux pour les ignorer. Je ne veux pas avoir un comportement qui puisse s’avérer déshonorant pour mon époux, je tiens ma tête droite, je rejette mes épaules en arrière, la chaîne et les médaillons, le symbole de la famille de Roark, sont bien visibles à travers ma robe transparente. Le poids tire constamment sur mes tétons, ça m’excite, me donne une sensation d’excitation perpétuelle.
Ça n’a pas d’importance. J’ai l’impression qu’un seul regard suffirait pour que je me retrouve à quatre pattes et que mon fougueux amant me prenne par derrière sur simple demande. Des douzaines de tentes surgissent au milieu du paysage désertique, comme sorties de nulle part. Elles se groupent autour d’une tente principale, la plus grande—Roark me la montre—qui abrite le terminal de transport. Au-delà de l’Avant-poste, je ne vois rien à des kilomètres à la ronde, hormis une butte ça et là que je devine être un arbuste ou un rocher. Sur ma droite, au-delà du campement, une formation rocheuse s’élève au beau milieu du désert telle une sentinelle veillant sur l’Avant-poste. Une petite brise m’empêche de crever de chaleur, on aperçoit nettement un chemin dans le sable là où le vent pousse les petits grains de sable contre les rochers.
Un coupe-vent ? Le vent souffle toujours de cette direction ? De quelle direction ? Je n’en ai pas la moindre idée.
Cet univers extraterrestre est étrange mais étonnamment beau. J’ai l’impression d’avoir débarqué au beau milieu d’un conte de fées. Les mille et une nuits. Je contemple le ciel, leur immense soleil est au zénith, sa lumière chaude et jaune est agréable sur mes bras nus. Mais à l’horizon, un soleil rouge vient de se lever, je me demande comment il s’appelle. Je n’ai jamais vu de soleil rouge, je me demande si je ne vais pas avoir chaud lorsqu’il sera levé. Roark m’a dit qu’il y avait deux lunes, j’étais trop occupée pour m’en soucier.
« Conseiller. » L’un de ses hommes le salue. Il est grand, mat, l’air soucieux. Il doit avoir dix ans de moins que Roark. « Je ne voulais pas vous déranger mais on nous informe de la présence, de Drovers à la frontière du territoire. Nous pensons qu’ils s’y sont regroupés afin d’attaquer. »
Je m’approche de Roark. Ça me rend nerveuse de les entendre parler d’attaque, mais la carrure impressionnante de Roark me rassure. Tout comme la présence de douzaine d’hommes bien armés et baraqués. Ils mesurent tous deux mètres, portent une épée impressionnante sur la hanche et une sorte d’arme spatiale argentée de l’autre. J’ignore ce qu’est un Drover et je ne veux pas le savoir. Pour le moment du moins. J’ai peur que Roark soit blessé au combat.
Mon partenaire me regarde tandis que ces hommes l’entourent, formant un cocon protecteur. « Ne t’inquiète pas, femme. Les Drovers ne te feront rien. » Il a l’air calme et totalement sûr de lui. Je lui fais confiance, la tension que j’éprouve retombe à un niveau supportable. C’est son univers, pas le mien. Je dois lui faire confiance. Ça ne signifie pas pour autant que j’ignore la menace qui pèse.
« Qui sont les Drovers ?
—Viens, femme. Il me tire par la main. Je t’expliquerai en temps voulu. Je t’amène au terminal de transport. Tu y seras en sûreté avec la doctoresse pendant que je règle leur compte à ces envahisseurs. »
L’ordre de Roark me pousse à avancer. Les sandales qu’il m’a données s’enfoncent dans le sable blanc à chacun de mes pas. C’est chaud mais pas brûlant. J’ai à peine fait deux pas qu’une bombe éclate.
Je me retrouve par terre sans comprendre ce qui m’arrive, Roark me protège de son corps massif.
Un déluge de feu s’abat au-dessus de nos têtes mais s’arrête net. J’entends hurler, des hommes crient à l‘autre bout du campement, près des énormes rochers.
J’ai du mal à respirer, je fais mine de protester lorsque Roark se relève.
« Tu es blessée ? » Il roule sur le côté, il fait dos aux cris, son corps fait écran, il me scrute de la tête aux pieds. D’un air cruel, intense, inquiet. Envolé l’amant attentionné.
« Je suis ok.
— Ça veut dire quoi O-K ? C’est des lettres ? Tu me parles avec des lettres ? Son regard se fait plus intense, il relève le menton sans me quitter des yeux. Docteur ! »
Il me casse les tympans, je pose ma main sur sa joue pour le calmer. Evidemment, le traducteur implanté derrière nos oreilles ne traduit pas l’argot américain. « Je vais bien, Roark. Je ne suis pas blessée. Juste légèrement secouée. »
Il me fait un petit baiser, la doctoresse qu’il a appelée est là, ses sandales sont à quelques centimètres de ma tête. « Conseiller ? »
Roark se lève et m’attire contre lui. La chaîne balance sous ma robe ample. « Emmenez ma femme au terminal de transport et veillez sur elle au péril de votre vie.
— Roark, non … » J’ai pas envie que cette femme se fasse tuer pour moi. Ça nous concerne tous les deux. Roark et moi contre le monde, contre les Drovers. « Donne-moi une arme. Je vais me battre. »
Ses guerriers s’approchent de nous, épée dans une main, arme de l’autre. Il secoue la tête. « Non, femme. Tu suis le docteur.
Quoi ? Pourquoi ? Où tu vas ? »
Il se tourne, son regard est cruel et effrayant. J’aimerais pas être à la place de ces Drovers. « Je veux m’assurer que mes parents sont bien rentrés sur Xalia. Si ce n’est pas le cas, je dois assurer leur protection. Je tuerai les Drovers lorsque je les saurais en sûreté. »
Ses parents. Les Drovers. Et moi. Ok. Parfait. Je vais m’en sortir. Je hoche la tête. « Reviens-moi.
— Je te donne ma parole, Natalie. Je te rejoins une fois la bataille terminée. Mais je dois m’assurer que mes parents sont bien partis hier comme prévu. » Roark me donne un petit poignard, je referme la main sur la poignée. Il est petit, à peine plus long que mes doigts, la lame est en or, brillante. « Prends-le. Ne t’en sépare jamais. »
Je hoche la tête, la doctoresse m’entraîne et j’avance dans sa direction. J’ai un mauvais pressentiment. Roark se tourne et ordonne à deux de ses hommes de nous escorter jusqu’au terminal de transport. Les deux guerriers nous tiennent par le bras et se mettent à courir, une seconde explosion retentit.
Je me tourne, mon partenaire aboie des ordres dans un vacarme sans nom. Il est gigantesque parmi ses hommes, cruel, fort, totalement occupé à trouver ses parents et protéger le campement. Il scrute le site du regard, tel un prédateur. Il passe sur moi sans me voir, comme s’il m’avait déjà oubliée.
« Ne fais pas l’enfant, » je me gronde en m’échappant avec la doctoresse. Elle fait une demi-tête de plus que moi, elle est plus costaud. Je cours mais elle m’entraîne à sa suite, je trébuche tous les trois pas, j’arrive pas à la suivre à cause du sable. Elle a peut-être l’habitude de courir sur la plage, moi pas. Le terminal de transport n’est pas loin mais je suis à bout de souffle et effrayée lorsqu’on se réfugie toutes les deux sous la tente. Les deux guerriers qui nous accompagnent se postent près de l’entrée, armes dégainées, prêts à tirer. Les bruits à l’extérieur ne ressemblent à rien de ce que j’ai entendu lors de mon arrivée. Le calme retombe. Je sais que quelque chose cloche, même sans le voir. J’entends la peur, la panique, la mort derrière les fines parois.
La doctoresse ferme le rabat et m’enlace brièvement, entre nanas, ça fait du bien. « Dites-moi que tout va bien se passer, même si c’est un mensonge. »
Elle recule et sourit. « Tout va bien se passer. Ce n’est pas un mensonge. Sinon le Conseiller Roark ne vous aurait pas envoyée ici. » Elle me lâche et m’indique la plateforme de téléportation. « Mais je préfère jouer la prudence.
— Comment ça ? »
Elle l’indique du doigt. « Montez. Je vais activer les codes de téléportation au cas où.
—Au cas où ? » Je vois très bien où elle veut en venir mais je refuse de l’admettre. Je ne veux pas partir sans Roark.
« Votre mari m’a demandé de vous protéger, je m’y emploie. » Elle est docteur, elle garde son sang-froid malgré la tension mais je vois bien qu’elle a l’air préoccupée, elle agit vite. « C’est le seul moyen de s’enfuir si les Drovers nous encerclent.
— Pour m’envoyer où ?
— Il lui faut quelques minutes pour se mettre en marche, il faut ensuite entrer les nouvelles coordonnées. Il est toujours programmé avec celles de la Terre. » Elle m’adresse un signe de la main, sans quitter des yeux les commandes du terminal de transport. J’ai l’impression d’être dans un épisode de Star Trek, « Téléporte-moi, Scotty. »
Je me lève et époussète le sable sur ma peau. J’en suis couverte, les grains fins me collent aux bras et à la poitrine et brillent tels des paillettes sur le tissu doux de ma robe. Y’en a partout dans la cabine de téléportation.
« Allez. Vite. » La doctoresse marmonne, je frotte le sable sur mes cuisses. Le bruit du métal qui s’entrechoque, les épées, résonnent à l’entrée de la tente. La doctoresse pousse un juron dans sa langue maternelle et je bondis, je pousse un hurlement en voyant l’un de nos gardes tomber à la renverse à l’entrée de la tente, un poignard planté dans l’œil gauche.
« Allez ! Maintenant ! » Le garde restant aboie un ordre tout en reculant dans l’entrée. Il se bat apparemment contre trois hommes. Ces Drovers sont plus petits que moi, mais rapides et malveillants. Ils portent une longue robe marron qui les couvre des pieds à la tête et des écharpes qui me font penser aux nomades vivants dans les déserts qu’on voit dans National Geographic. Leurs courtes épées fendent l’air à une telle vitesse que j’ai du mal à suivre l’échauffourée des yeux.
« Non ! Je hurle. Roark ? Où est Roark ? »
La doctoresse secoue la tête, elle crie tout en tapotant sur le panneau de commandes. « Il est mort. Je suis désolée. S’ils sont arrivés jusqu’à nous, c’est qu’il est mort. Je dois vous faire partir d’ici.
— Mort ? Non ! »
Non. Il n’est pas mort.
Non. Non. Non.
La doctoresse me crie quelque chose mais je ne l’entends pas. Le plancher vibre sous mes pieds. Une vive lumière bleue provenant de lignes que je n’avais jamais vues m’éblouit. Ça fait mal aux yeux, ça forme un étrange quadrillage. J’essaie de bouger mais je suis retenue prisonnière par l’énergie qui monte, s’empare de moi, m’entoure, j’arrive plus à respirer. Le garde que je viens tout juste de rencontrer tombe à genoux, un Drover lui tranche la gorge, un autre le poignarde. J’essaie de m’enfuir, de hurler mais je n’arrive à rien. Je ne peux que regarder, totalement impuissante.
Le troisième Drover s’élance vers la doctoresse et la poignarde dans le dos. Elle hurle, elle tombe à genoux, bouche ouverte, je n’entends plus rien, hormis le ronronnement de la cabine. Un Drover poignarde sans relâche un garde au niveau de la poitrine, je suis pétrifiée. Avec une horreur qui va crescendo, je regarde l’autre assaillant se ruer vers moi.
Il se faufile entre les rais de lumière bleue, ses mains calleuses et noueuses essaient de s’emparer de moi.
Il empoigne ma robe, m’attire vers lui impitoyablement, j’avance inexorablement. Je bondis et le poignarde. La lame dorée touche son bras. Son sang gicle sur ma robe mais il ne me lâche pas pour autant. Terrifiée, je m’écarte de lui de toutes mes forces. L’ourlet de ma robe se défait, ma robe se déchire en deux. Le Drover tombe à la renverse en hurlant lorsque le tissu lui reste entre les mains, la couture dans le dos se déchire avec un bruit assourdissant, j’en claque des dents.
Je suis nue, à l’exception de mes sandales et des chaînes qui pendent à mes seins, je hurle contre lui, enragée qu’il ait tuée la doctoresse, il l’a poignardée dans le dos. De sang-froid. Ils m’ont arraché mon époux. Tel est mon destin sur cette stupide planète. L’homme que je commençais à aimer, qui s’est uni à moi, est mort ?
Le ronronnement environnant se mue en un grondement sourd, j’ai l’impression que mon crâne va exploser. Je ne peux même pas hurler, tout devient noir.