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Natalie

Avec ce voyage interplanétaire, la notion de décalage horaire prend tout son sens. J’ai la tête lourde et dans le gaz alors que j’essaie de me tirer de mon sommeil. Ma chaise est contre le caisson de Roark, je relève rapidement la tête pour m’assurer qu’il va bien, qu’il guérit. Mais la vitre transparente doit comporter une autre épaisseur parce que je ne vois rien. La fenêtre transparente du caisson a cédé la place à un écran noir. Je ne sais même pas s’il est toujours à l’intérieur. La machine ronronne sous mes bras.

Je me penche et regarde les commandes que le docteur a actionné tout à l’heure. Tout semble conforme, mais j’ignore ce qu’elles signifient. C’est comme sur la Terre, un écran surveille le cœur et la pression sanguine, ça bipe en cas de changement. Cette avancée technologique me dépasse. Les symboles sont étranges, je ne comprends rien. Je me rends compte que je ne connais rien à la physiologie des habitants de Trion. Ce qui est normal chez un humain peut être anormal chez eux.

Heureusement, Noah est un bébé en pleine santé, il n’a pas besoin de voir un docteur, hormis pour un simple bilan. Personne ne m’a posé de questions sur le fait qu’il soit à moitié Trion. C’est un bébé mi-extraterrestre mi-terrien. Les docteurs ne m’ont pas posé de questions, je ne leur ai pas donné d’explications.

J’ai rien à faire, je me tourne et me rallonge, je pose les coudes sur les accoudoirs. Je prends mon menton dans ma main et inspire profondément. Je me demande si Noah va bien, s’il est réveillé et grognon. S’il a faim.

Il règne une sorte de torpeur ambiante, j’apprécie la tranquillité. Je me suis levée tant de fois en pleine nuit pour m’occuper de mon fils pendant que tout le monde dormait. Une certaine solitude paisible emplit l’air. Seton m’a dit qu’on était en ville, mais je me sens seule en pleine nuit.

J’entends un léger ronflement sur ma gauche, Seton s’est endormi par terre. Il dort, enroulé dans une simple couverture. Je me tourne vers la porte close, un sentiment de terreur m’envahit, comme si une goutte d’eau glacée me coulait dessus. Il n’y a personne d’autre dans la pièce. Pas de docteur ni de techniciens. La porte est fermée mais non gardée.

Où sont les gardes ?

Je m’extirpe de ma chaise, me lève au moment où la porte coulisse silencieusement sur ses gonds. Je reconnais le Commandant Loris et pousse un soupir de soulagement.

« Commandant. Merci. Je m’inquiétais de ne pas voir de gardes, » je parle à voix basse.

Il referme doucement la porte derrière lui et regarde Seton endormi. « Pardon de vous avoir fait peur madame. Seton fait les frais d’une longue journée.

— Oui. Je souris. Il est très fidèle envers Roark.

— Oui, effectivement. Il s’approche du caisson. Comment va le Conseiller ? »

Je m’éloigne en haussant les épaules. « Je n’en sais rien. Je ne sais pas lire les écrans de contrôle et le docteur n’est pas là. »

Le commandant croise ses bras derrière son dos et se dirige à l’autre bout de la pièce, il se penche pour regarder derrière la cloison, le docteur et l’équipe médicale y ont fait de fréquents aller-retour. « Ah, oui. Le Docteur Brax est là, il dort.

— On est en pleine nuit. »

C’est tout de même bizarre. Sur Terre, il y a toujours une infirmière de garde, même en pleine nuit.

« Oui. Il vient vers moi. Que faites-vous debout madame ? Vous n’avez pas mangé le ragoût ?

— Oui, j’en ai pris deux fois— » je ne termine pas ma phrase, j’essaie de comprendre où il veut en venir. Qu’est-ce que ça peut lui faire que j’en ai mangé ou pas ? Comment il sait que c’était du ragoût ?

« Ah, la physiologie des Terriens est étrange. Je n’y avais pas pensé. » Le commandant se dirige vers le pupitre de commandes du caisson de Roark et appuie sur des boutons.

« Qu’est-ce que vous faites ?

— Rien, ne vous inquiétez pas. »

Je ne le crois pas, un certain malaise m’envahit. « Arrêtez ça immédiatement. »

Il m’ignore, le caisson baisse en puissance, les lumières faiblissent, le ronronnement s’arrête. Je m’attends à ce que le couvercle coulisse mais il n’en est rien. On dirait que le caisson est mort, comme s’il avait arraché la prise. « Qu’est-ce que vous faites ? »

Le Commandant Loris pointe une sorte de revolver vers moi. « Donnez-moi le médaillon. »

J’écarquille les yeux et recule instinctivement. « Je ne vois pas de quoi vous parlez. Rallumez le caisson. »

Il se rue sur moi, sort mon T-shirt de mon jean, sa grosse main farfouille dessous pour accéder à la chaîne en or qui devrait pendre sur mon ventre, si je ne l’avais pas fourrée dans mon soutien-gorge.

Il me regarde d’un air féroce et furieux, il ne la trouve pas. « Où est-il ? »

Je recule, ses doigts boudinés me dégoûtent. Je lui suis reconnaissante de ne pas être au fait des dessous qu’on porte sur Terre. Apparemment, il n’a jamais vu de femmes en soutien-gorge. « Bas les pattes.

— Donnez-moi le médaillon. » C’est lui qui le voulait ? C’est lui qui a envoyé le message crypté sur Terre ? C’est lui qui a essayé de me tuer ? De tuer Noah et Roark ?

« Rallumez le caisson ! » Je hurle. Roark peut mourir ? Il est piégé ? Il étouffe ? Le Commandant Loris me tire cruellement par les cheveux. La douleur aigüe me donne les larmes aux yeux, il pointe son arme sous mon menton. Ça me fait mal. On ne dirait pas une arme terrienne, mais une arme reste une arme quand elle est pointée sur votre tempe. « Donne-le moi sinon je te tue et je l’arracherai sur ton cadavre.

—Vous êtes malade. Vous ne pourrez pas vous en servir.

— Oh, je sais. Mais tu as résolu le problème. Son haleine chaude m’arrive en pleine figure et je crie.

— Quoi ?

— Ton fils, Natalie. Mes amis sont prêts à s’emparer de lui. Il se penche et tente de me voler un baiser. Ne t’inquiète pas. Je ferai un bon père. Il ne se souviendra même plus de toi. »

Quoi ? Il veut s’approcher de Noah ? Jamais. Essayer de me tuer est une chose, jouer avec l’instinct maternel en est une autre. Qu’il aille se faire foutre. J’ai enfin la famille dont je rêvais. Un mari qui est venu me chercher à des années-lumière, au fin fond de l’univers. Un fils, le fruit de notre amour. Des beaux-parents affectueux et adorables. Et ce connard veut tout détruire ? Même pas en rêve.

Je lève ma jambe et atteins ma chaussette, je m’empare de la petite dague de la main droite. Je la pointe vers sa gorge.

J’arrive à entailler son menton, sa mâchoire jusqu’à l’os, le sang coule dans son cou. Je l’ai blessé mais pas mortellement.

Il me traîne par les cheveux vers le caisson. Il cogne ma main tenant le couteau sur le côté du caisson jusqu’à ce que je le lâche. Je hurle de douleur devant la rudesse de ses actes. Mon poignet et mes doigts sont cassés. Je les ai sentis—et entendus—se rompre comme des brindilles, la dague en or tombe à mes pieds.

« Lâche-la, Loris. C’est terminé. » Je me fige. C’est Roark ? Quoi ? Le commandant me plaque contre le caisson. Roark est toujours à l’intérieur. Comment est-ce possible ?

« Roark. » Le commandant Loris presse le canon de son arme contre ma tempe, m’écarte du caisson en faisant en sorte que mon dos repose contre sa poitrine, je suis son otage. Le sang qui coule de son cou baigne mon tee-shirt. C’est chaud, ça colle et me dégouline dessus tandis qu’il se penche sur moi.

« Pose ton arme, Conseiller, sinon je la tue. » J’aperçois Roark du coin de l’œil. Il tient une arme semblable à celle du commandant. Roark est tendu à l’extrême. Rigide. Il pose son arme et lève les mains en l’air. « Relâche-la.

— Donne-moi le médaillon et elle aura la vie sauve.

— Lâche-la, Loris. Tu ne gagneras pas. Les codes seront mis à jour au moment même où je te remettrai le médaillon. Les codes seront désactivés avant que tu ne puisses t’en servir. »

Le commandant rigole contre mon oreille, postillonne sur ma joue, ça me rend malade, je vais vomir. « Pas si vous êtes tous morts. À part le bébé. »

Le visage de Roark se pétrifie d’horreur en entendant Loris. Il va assassiner toute sa famille, ce soir, sauf son fils. Mon fils. Ce taré va le garder en vie et se servir de son ADN comme clé du médaillon. Pour quoi faire ? Pourquoi tant de haine, de malveillance ?

Je n’en ai pas la moindre idée, mais je n’ai plus du tout envie d’avoir ce foutu truc qui pendouille entre mes seins. Ça occasionne plus d’emmerdes que le contraire. Si c’est censé représenter la cruauté et la violence, je ne veux pas être impliquée avec ce lien que je partage avec Roark.

Le Commandant Loris garde son arme pointée sur ma tempe. De l’autre, il plonge sous mon T-shirt pour attraper la chaîne. Je me débats, il me dégoûte. « Non !

— Laisse-la, répète Roark. C’est moi que tu veux. »

Loris me pelote et ricane en voyant le regard sombre de Roark. « C’est pas toi que je veux. Si y’en a une qui doit rester en vie, c’est bien elle. Des seins pareils, avec les clés de la planète qui pendent au milieu ? » Il ricane d’un air vicieux.

Connard.

Je baisse la tête et mords son poignet comme un animal sauvage, j’essaie de ne pas vomir en sentant le goût de sa peau, le goût métallique du sang emplit ma bouche.

Il pousse un hurlement et retire sa main.

Je donne un coup de pied dans le poignard en or qui glisse jusqu’à Roark et hurle. Je tombe à genoux et lui donne un violent coup.

Roark s’agenouille, s’empare du couteau et le lance avant que j’aie le temps de réagir. La lame se plante dans l’œil droit de Loris avec un bruit dégoûtant que je ne veux plus jamais entendre de ma vie. Je détourne le regard et ravale la bile qui monte dans ma bouche.

Le commandant s’effondre, je m’éloigne maladroitement et rapidement et rejoins Roark. « T’es pas dans le caisson ? Je comprends pas. »

Mon cœur bat si vite que je crains qu’il ne sorte de ma poitrine. J’ai le souffle court, comme si j’avais couru un marathon, pas comme si j’avais désarmé un mec complètement taré armé d’un pistolet spatial.

Roark me prend dans ses bras, m’examine pour voir si je ne suis pas blessée. Il me tâte et me regarde. « Putain, ton poignet. »

Je secoue la tête et regarde ma main. « Ça fait un mal de chien, je vais avoir besoin de la baguette ReGen. Mais, toi. Toi ! Explique-moi. T’es censé être dans ce fichu caisson ! »

Roark m’attire contre lui et s’empare de l’arme. « Je savais que ce traître se montrerait bien avant que je me réveille de mon séjour dans le caisson. Le docteur, Seton et moi avons convenu, avant mon transport sur Terre, qu’à mon retour, nous nous servirions du caisson pour le piéger. Les blessures que j’ai subies sur Terre ne faisaient pas partie du plan mais j’ai guéri en quelques heures. Le docteur m’a relâché comme convenu et on a mis le piège au point. »

J’ai la tremblote. L’adrénaline c’est bien beau mais les conséquences sont dramatiques.

« Noah. Il a dit qu’il s’en prendrait à Noah. » Je me débats pour qu’il me relâche mais il me serre plus étroitement encore.

Je me débats, il me parle. « Noah est en sécurité, mon amour. Je te le jure. » Il caresse mon dos pour m’apaiser. « Mes parents ne l’ont pas emmené chez eux avec Miranda. Ils ont usé d’un stratagème pour leurrer les amis du commandant qui projetaient de nous envahir. Mon père a envoyé une douzaine d’hommes les capturer. Ils sont en détention dans des cellules souterraines sous la ville, dans l’attente de leur interrogatoire. Noah est sain et sauf. »

Je regarde le commandant, mort, le poignard en or planté dans son visage, le sang coule sur le sol aseptisé de l’unité de soins. J’ai un mouvement de recul et me blottis contre Roark. J’entends son cœur battre calmement. « Pourquoi ne m’avoir rien dit ?

— Pardonne-moi mon amour. Je voulais que ta réaction soit pure et sincère.

— Mais il a réussi à entrer. Il aurait pu nous tuer tous les deux.

— Je l’ai sous-estimé, et j’en suis désolé. Je ne comptais pas te faire courir de danger.

— Hein ? dis-je en essayant de m’écarter, furieuse. Il comptait se mettre en danger ?

— Nous devions identifier le traître afin de ne plus avoir à s’en soucier, ne plus avoir à craindre pour notre sécurité. Je devais éliminer la menace afin de me concentrer sur toi et Noah. Je n’avais pas prévu qu’il mettrait un sédatif dans le repas. C’était bien pensé. Il me caresse la joue. Mais pas si bien que ça au final, puisque ça n’a eu aucun effet sur toi.

 Non, effectivement. J’ai mangé comme un cochon et ça ne m’a strictement rien fait.

— Etrange physiologie terrienne. » Je cite un homme mort, c’est cocasse. Je dois perdre la tête. Mon humour s’évanouit en contemplant mon mari. « Ne refais plus jamais ça. J’ai encore le goût de son sang dans la bouche. J’ai mordu le commandant au sang, ça m’a laissé un goût de cendres.

— Non. Non. Non. Pas du tout. » Le regard de Roark lance des éclairs, il plaque sa bouche sur la mienne pour effacer le goût de la peur et du danger. Je blottis mon bras valide contre lui, j’ignore la flopée de soldats qui déboule dans la pièce.

Roark relève la tête et vérifie auprès des gardes que le restant de ma famille est bien en sûreté. L’un d’eux se met en contact avec les gardes qui veillent sur Noah et les parents de Roark, nous apprenons que tout le monde est sain et sauf, je me jette dans les bras de Roark, il m’embrasse dans un moment de faiblesse. Je m’abandonne, j’ai besoin de ressentir l’amour et la confiance. Je me fiche qu’il y ait des gardes. Mon fils est sain et sauf. Je suis saine et sauve. Roark m’embrasse, m’aime, il me rappelle que nous sommes unis.

Quelqu’un se racle la gorge derrière nous. Seton est assis par terre, l’un des soldats lui passe la baguette ReGen. « Ça va vous deux ? »

Il a l’air de se réveiller d’une nuit de folie arrosée, les cheveux ébouriffés, grognon, comme s’il sortait de son lit. Il est splendide. Il plairait à Miranda …

« Donnez-moi cette foutue baguette, » aboie Roark en la prenant des mains du type, il la passe sur mon poignet. Je sens comme par magie mes os se ressouder, guérir. Il est concentré sur ce qu’il fait, relève la tête, croise mon regard jusqu’à ce que je sois complètement guérie.

« Ça va mieux ? » Je hoche la tête. Mon dieu, j’adore leur technologie spatiale.

Après s’être assuré de mon intégrité, Roark m’abrite sous son menton. « Le traître est mort.

— Je vois ça. » Seton adresse un signe de tête au médecin qui vient d’arriver en force avec d’autres membres de l’équipe médicale, le traître ayant été découvert. Elle agite sa baguette sur lui. Il la force à arrêter ses soins, certainement plus vexé par le fait qu’il ait été drogué que par ses attentions. Je réprime un sourire. Ces mecs Trion se croient supérieurs aux humains. A l’instar de certains mâles dominants sur Terre.

Mon sourire s’évanouit. « Ok, il est mort, mais qu’en est-il de l’homme qui nous a attaqué sur Terre ? »

Roark m’enlace et ébouriffe mes cheveux. « On sait pas. La Gardienne Egara est sur ses traces. Elle traque le moindre message crypté et reste vigilante. On a fait notre possible. On va interroger les hommes capturés ce soir et on espère découvrir son identité, bien que je doute qu’on apprenne quoi que ce soit. La Terre est une planète très lointaine.

— Mais quelqu’un doit bien être au courant, je réplique.

— Oui. La gardienne Egara est une adversaire redoutable et intelligente. Elle découvrira la vérité. »

Je hoche la tête et me détourne du cadavre du commandant. Je regarde le soldat à ses côtés et m’éclaircit la gorge. « Le poignard en or m’appartient. Je veux le récupérer.

— Oui, ma Dame. »

Roark me regarde. « Je t’en donnerai un autre. Laisse-le là où il est.

— Certainement pas. Tu me l’as donné. Il m’a sauvé la vie, par deux fois. Je le veux. Propre, évidemment. Je ne m’en séparerai jamais.

— Tu l’auras. Il regarde le soldat. Enlève-le quand on sera partis. Nettoie la lame minutieusement et rends-le à ma femme demain matin à la première heure.

— Oui, Conseiller. »

Roark m’attire contre lui. Il adresse un signe de tête à Seton, qui permet enfin à la femme de le soigner avec la baguette. Roark me guide hors de la pièce, je le laisse faire, j’ai hâte de m’éloigner de toute cette tension, de tout ce sang. De tirer un trait. « Où va-t-on ?

— A la maison. »

Programme des Épouses Interstellaires Coffret

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