Читать книгу Les Maîtres peints par eux-mêmes, sculpteurs, peintres, architectes, musiciens, artistes dramatiques - Henry 1841-1913 Jouin - Страница 21
ОглавлениеDÉPART OBLIGÉ D’UN PENSIONNAIRE DE L’ACADÉMIE DE FRANCE
Rome, le 27 janvier 1790.
A Marie-Anne Belle.
Monsieur et cher confrère,
J’ai l’honneur de vous faire part que M. votre fils se détermine à retourner en France. Vous avez su par lui-même les détails de la malheureuse affaire qui lui est arrivée, et que plusieurs circonstances ont encore rendue plus grave qu’elle ne l’auroit été peut-être dans un autre temps. C’est une imprudence sur laquelle on est très sévère dans ce pays icy, et qui l’a mis en grand danger, mais qui ne portera pas atteinte à son honneur et sa réputation. Monseigneur le cardinal de Bernis a pris le plus vif intérêt à cette affaire. C’est à lui que nous devons qu’il n’ait point été arrêté le soir même qu’on est allé à son atelier, ainsi que la liberté dont il a continué de jouir dans Rome jusqu’à ce jour...
Quelque regret que j’aie de voir partir M. Belle, que je voyois icy avec le plus grand plaisir, j’aime encore mieux qu’il attende la fin de cette affaire en France, que de lui voir prolonger son séjour icy, ne pouvant lui répondre jusqu’à un certain point de ce qui pourroit arriver. Il part librement, ainsi cela ne peut point influer sur sa réputation. Il s’arrêtera quelques jours à Florence, à Bologne, passera (par) Turin, et de là en France, ainsi vous le reverrez vraisemblablement dans six semaines ou deux mois...
Recevez, etc.
MÉNAGEOT.
Belle (Augustin), fils de Marie-Anne Belle, inspecteur des Gobelins, avait obtenu le deuxième grand prix de Rome en 1782. C’était trop peu pour bénéficier régulièrement de la pension du Roi. Mais le graveur Cochin, dont l’influence était grande, obtint que le jeune Belle, son parent, parti pour Rome en 1784, aux frais de ses proches, fût nourri et logé à l’Académie de France, sans que son père eût rien à débourser. Cette faveur, écrit M. Lecoy de la Marche, fut continuée au jeune étudiant depuis le 11 mai 1785 jusqu’au 26 janvier 1790. Le bénéficiaire se fût sans doute accommodé plus longtemps du privilège dont il jouissait, mais l’imprudent se mit dans un mauvais cas et dut quitter précipitamment les États romains. La lettre de Ménageot, directeur de l’Académie de France, adressée le 27 janvier 1790 à Marie-Anne Belle, père du délinquant, a été possédée par Émile Cottenet. Nous en donnons ici les passages essentiels.