Читать книгу De l'Influence des chemins de fer et de l'art de les tracer et de les construire - Marc Seguin - Страница 7
III. — DES AVANTAGES QUE PRESENTENT LES CHEMINS DE FER
ОглавлениеChaque mode de transport présente des avantages qui lui sont propres, et il est fort difficile d’établir à ce sujet des comparaisons, et de prononcer en faveur de l’un ou de l’autre. Comment décider par exemple, s’il est préférable de mettre des points en communication en établissant un chemin de fer, un canal ou une route, ou en améliorant le cours d’une rivière, ou par tout autre moyen qui pourrait être découvert, si l’on n’a posé d’avance les conditions spéciales du problème à résoudre? Ce ne sera donc que d’une manière générale que je pourrai traiter ici des avantages des chemins de fer.
Je l’ai déjà dit: la vitesse avec laquelle on peut voyager sur les chemins de fer n’a point de limites; mais on n’a pas voulu jusqu’ici la porter à plus de 12 lieues à l’heure. Les moyens d’établir les rails, les chairs, les dés, les chaussées, etc.; la construction des wagons et des machines, ne présentent pas encore des garanties suffisantes de sécurité, pour que l’ont ait osé aller au delà ; et l’exploitation de cette branche d’industrie est d’une date trop récente pour que l’on ait pu corriger les nombreuses imperfections que l’expérience y a déjà signalées. Mais il n’est pas douteux que dans un temps qui n’est pas éloigné, on sera en mesure de profiter de toute la vitesse que l’on a obtenue dans divers essais. C’est surtout, c’est même uniquement dans l’intérêt des voyageurs que ce résultat est désirable; car il est digne de remarque combien l’homme, instruit par la civilisation à comprendre la valeur du temps, est jaloux de l’économiser. Dans son impatience d’arriver promptement à son but il ferme les yeux sur les dangers, ou les redoute moins qu’un retard. Sur les chemins de fer, par exemple, ces dangers sont tels, qu’en supposant les voitures arrêtées par un obstacle subit, elles viendraient se briser les unes contre les autres avec une vitesse égale à celle d’un poids qui tomberait du haut d’un édifice élevé de 50 mètres au-dessus du sol.
Quant aux marchandises, il ne peut jamais, ou du moins que très rarement être nécessaire de les transporter avec une aussi grande rapidité. Il suffit presque toujours au commerçant de connaître la durée du trajet; il prend alors ses précautions pour faire concorder l’époque de l’arrivage avec celle de ses besoins. Il est d’ailleurs très peu de marchandises dont le prix soit assez élevé pour que l’intérêt de l’argent entre le jour du départ et le jour de l’arrivée, défalcation faite de la différence du prix de transport, mérite d’être pris en considération. Ainsi, les sucres bruts expédiés du Havre à Paris restent moyennement un mois sur la Seine. Le tonneau ayant une valeur de 1500 francs environ, et l’intérêt étant calculé à 6 pour 100, la perte s’élèverait à 7fr,50, qui ajoutés aux 24 francs de frais déboursés, porteraient le coût total du transport à 31fr, 50. Il est évident qu’un service qui permettrait d’obtenir les arrivages, d’une manière régulière, en douze heures, devrait être préféré si les conditions du prix de voiture restaient notablement au-dessous de ce chiffre. Mais à prix égal, le trajet pût-il s’effectuer en trois ou quatre heures, le négociant n’attacherait qu’une bien faible importance à cette célérité, surtout lorsqu’il peut également bien conclure ses affaires au moyen des échantillons.
Il est donc indispensable, lorsqu’on est appelé à se prononcer sur le choix d’un mode de transport, d’entrer dans l’examen détaillé de toutes les circonstances qui se rattachent spécialement à la question posée. Un chemin de fer sera préférable, quelques difficultés que présente d’ailleurs son établissement, dans toutes les directions où se porte un grand concours de voyageurs, parce que ce concours augmentera nécessairement à mesure que les communications seront plus rapides. Au reste la multiplicité des déplacements étant le premier et le plus inévitable effet des progrès d’un peuple vers la civilisation, on s’assure dans l’avenir toutes les chances possibles, en travaillant pour un ordre de choses dont chaque jour écoulé nous rapproche.
Mais en raisonnant dans cette hypothèse, on comprend facilement que le transport des marchandises peut apporter de fréquents inconvénients dans la marche, et détruire, en grande partie, les avantages des chemins de fer, en compromettant à la fois ce qui seul peut en assurer la prééminence, la vitesse et la sécurité. Quelques instants suffisent aux voyageurs pour entrer dans les voitures ou pour en sortir. Une fois que l’ordre est établi, que chacun connaît le signal des mouvements, les moments et les lieux où l’on doit s’arrêter, les manœuvres des convois s’exécutent avec un ensemble et une rapidité extraordinaires, et les pertes de temps sont réduites au plus bref délai possible. Il n’en est plus de même lorsque le convoi entraîne des marchandises. D’abord l’impossibilité de charger et de décharger sur la voie principale oblige à établir de nombreuses ramifications qui compliquent la ligne et augmentent les chances d’accidents. En outre, si l’on ne veut porter le prix de voiture à un taux trop élevé, il y a nécessité de faire supporter aux wagons des charges considérables; la fatigue des rails s’accroit dans une proportion en rapport avec le poids accumulé sur un seul point; les fractures de roues, d’essieux et de toutes les autres parties du matériel se multiplient; les encombrements, les chocs, peuvent mettre plus souvent en danger la vie des voyageurs. Enfin, si la ligne que parcourt le chemin de fer traverse un pays où la population est disséminée en un grand nombre de petits centres, à tous ces inconvénients se joint un surcroît considérable de dépenses; car les frais et les mesures de prudence sont partout à peu près les mêmes, indépendamment de l’importance des stations. Aussi, lorsqu’à la création du chemin se lie impérieusement l’obligation d’établir un grand nombre de stations ou de points de chargement et de déchargement, c’est une considération qu’il ne faut pas négliger de faire entrer dans les calculs, et d’envisager relativement aux frais matériels et à la probabilité des accidents.
Le prix des places des voyageurs et celui du port des marchandises ne peuvent être basés uniquement sur la proportion des distances parcourues, surtout lorsque le chemin de fer, comme tous ceux que la France possède aujourd’hui; est d’une médiocre étendue. Le convoi organisé et mis en mouvement, quelques kilomètres de plus ou de moins dans sa marche produisent à peine sur les frais une légère différence, qui perd toute importance lorsqu’on la compare à la dépense totale du voyage.
Mais ne perdons pas de vue que le but principal pour lequel furent créés les chemins de fer fut de transporter d’un lieu à un autre, et au meilleur marché possible, de grandes quantités des productions du sol ou de l’industrie. Et si, depuis leur origine, des résultats sur lesquels on n’avait pas compté d’abord ont donné la pensée d’utiliser au profit des voyageurs une vitesse inconnue jusqu’alors, c’est un deuxième avantage qui est. venu s’ajouter et non se substituer au premier. Il est dans nos pays une foule de localités où gisent sans emploi de grandes masses de subtances précieuses, dont les chemins de fer peuvent déterminer ou faciliter l’exploitation. Dans ces circonstances, les bénéfices qu’on en retirera ne se borneront donc plus seulement à une économie sur le prix de voiture; en transportant ces matériaux dans les lieux où la consommation les réclame, ils augmenteront la richesse nationale de la valeur tout entière du produit; ils créeront, pour ainsi dire, dans chaque localité, l’aliment nécessaire à son industrie ou à ses besoins sociaux.
Ce bienfait s’accomplira sur une plus vaste échelle, et deviendra surtout plus sensible, lorsque les chemins de fer et les diverses machines destinées à en faire le service auront reçu les perfectionnements qu’une trop courte expérience n’a pas permis encore d’y apporter.
On peut se faire une idée de l’incertitude qui règne encore dans les esprits sur tout ce qui touche à cette grave question quand on remarque que des capitalistes ont adressé au gouvernement des soumissions par lesquelles ils sollicitaient des concessions sur de grandes lignes, moyennant un péage de 8 centimes par tonneau de marchandises et par kilomètre; et que, dans cette même année, les Chambres, après avoir refusé au gouvernement les fonds nécessaires pour établir lui-même ces lignes sous la perception d’un tarif de 7 1/2 centimes, ont fini par les concéder à des compagnies particulières à un tarif moyen de 12 centimes environ.
Il ne faut pas se dissimuler que tant que l’on n’aura pas adopté des mesures générales régulières et précises, tant que la législation sera flottante, le développement que prendra cette industrie sera lent, et les résultats qu’on peut en attendre paralysés en partie. Il est donc du devoir du gouvernement de s’en occuper activement, parce que tout retard porte préjudice au progrès. Mais, pour asseoir sagement les bases des règlements qui seront faits sur la matière, il sera nécessaire d’envisager les choses d’un point de vue élevé, d’embrasser la question dans toute sa portée, de la dégager des considérations étroites et des réclamations des intérêts particuliers qui tenteraient de prévaloir sur les intérêts généraux.
J’en donnerai la raison dans un exemple:
Qu’une compagnie entreprenne un chemin de fer dont le but sera: ou de transplanter, si je puis le dire, une carrière de houille au sein d’une ville populeuse et manufacturière; ou de transporter des minerais de fer ou autres dans un grand centre d’industrie; ou de centupler l’emploi des produits de la mer en les répandant promptement et à bas prix dans l’intérieur des terres; ou de réaliser des échanges de substances végétales ou minérales propres à féconder le sol et à le disposer à recevoir de nouvelles cultures, de tels établissements, on le reconnaîtra sans peine, réagiraient de la manière la plus bienfaisante sur la prospérité d’une nation, et sur le bien-être des individus.
Mais supposons que par les règlements généraux, ou d’après les clauses du cahier des charges, il soit permis à chacun d’adapter à ce chemin les coupures, voies de déviation ou embranchements utiles à son service particulier, sous la simple réserve de payer le tarif à raison de 5000 mètres, quelle que soit d’ailleurs la distance qu’il aura parcourue au-dessous de cette limite; admettons même que ce tarif soit porté à 10 centimes par tonne et par kilomètre, taux fort élevé pour un chemin qui fonde sa prospérité sur le transport des matières lourdes, ayant ordinairement peu de valeur intrinsèque. Si un propriétaire s’avise de vouloir employer cette voie pour mettre en commuication deux établissements riverains de la ligne, et éloignés l’un de l’autre de 4 à 5000 mètres, il pourra chaque jour et même plusieurs fois par jour, et pour la faible rétribution de 1fr, 50 par wagon, contraindre la compagnie à venir exécuter un service de quelques instants sur cette partie du chemin. Il est inutile d’entrer dans les détails d’estimation des pertes qu’en éprouverait l’entreprise; mais il est évident qu’il s’ensuivrait d’incalculables entraves pour la liberté du parcours général, que les intérêts de la compagnie seraient lésés et qu’il ne faudrait pas que de semblables sujétions se renouvelassent bien des fois sur la longueur du chemin pour en absorber tous les bénéfices. Il suffirait donc de la volonté ou du caprice d’un certain nombre d’individus pour ruiner l’entreprise et priver ainsi toute une ville, tout un pays, d’une ressource peut-être indispensable à son existence. En effet, pour que l’entreprise prospère, il faut que le montant total du prix du transport des marchandises qui parcourent la ligne entière, ou du moins une grande partie de la ligne, couvre, avant de produire un bénéfice net, non seulement les frais occasionnés par ce transport, mais encore les pertes qu’entraîne le service sur de petits espaces; et il est clair que ces pertes en s’accroissant peuvent arriver promptement à dépasser le chiffre des bénéfices.
Ces considérations sont également applicables au cas où le tarif d’un chemin de fer n’établirait pas des prix variés proportionnels aux difficultés locales qui se rencontreraient sur quelques points de la ligne. Ainsi un plan incliné, une pente régnant sur le tout ou sur une partie du parcours, peuvent, quand le convoi remonte, doubler ou tripler les frais de traction.
Il en serait de même enfin dans toutes les circonstances particulières où l’excédent de dépenses ne serait pas compensé par une augmentation de prix, et dont la multiplicité déterminerait un déficit dans la balance générale.
En ce qui concerne le transport des voyageurs, les intérêts de la compagnie ne seront pas moins froissés par l’établissement de stations trop fréquentes entre les points de départ et d’arrivée, si le prix est réglé uniquement d’après la distance parcourue. Mais on pourrait établir quelques stations principales dans des lieux où la perte du temps serait compensée, soit parce qu’on y renouvellerait les provisions d’eau ou de combustibles, soit parce qu’ils avoisineraient une ville de quelque importance. Il semblerait juste alors que, pour les voyages d’une moindre longueur, la compagnie fût autorisée à percevoir le droit entier attribué par le tarif au transport entre les deux stations. Cette latitude lui permettrait de fixer des prix suffisants pour se couvrir du surcroît de dépense qu’occasionnent les temps d’arrêt; mais elle n’en devrait pas moins, dans son intérêt bien entendu, les maintenir à un taux assez modique pour s’assurer la clientèle contre toute concurrence, et pour favoriser, autant que possible, l’augmentation du nombre des voyageurs.
Dans le but de conserver une garantie contre le monopole des compagnies, on avait voulu aussi reconnaître en principe le droit de libre circulation, c’est-à-dire qu’il aurait été permis à tout venant d’éviter la location du matériel de la compagnie en faisant soi-même son propre service, et en payant le parcours d’après des bases déterminées. Ces mesures, si on les avait adoptées, n’auraient été qu’un moyen d’entraves apporté gratuitement au service, et n’auraient eu pour effet que de blesser les intérêts de la compagnie, sans aucun profit pour le public. Une telle condition insérée au cahier des charges aurait nécessairement maintenu les soumissions à des prix beaucoup plus élevés. Les intérêts du public trouveront ailleurs une garantie bien autrement puissante, puisqu’elle se lie intimement au succès même de l’entreprise: il suffira que les compagnies aient eu le temps de reconnaître que le bas prix des transports peut seul leur amener les masses, et que ce sont les masses qui font la prospérité d’un chemin de fer, quand le service en est régularisé et simplifié. Cette vérité bien constatée, le gouvernement pourra s’en rapporter aux compagnies elles-mêmes pour la fixation de leur tarif.
La législation anglaise, toujours identifiée, par suite du génie même de la nation, avec la prospérité de l’industrie nationale, avait compris, dès avant l’expérience, toute la portée de ces considérations. Elle décida par avance la question; sans attendre des essais dont elle avait prévu l’issue, elle ordonna que sur le chemin de fer de Darlington à Stokton, quelque court trajet que l’on fît, on ne payerait, en aucun cas, un prix moindre que celui du parcours de 10 milles anglais ou 16 kilomètres; le tarif fixait en outre un droit de 6 pence ou 60 centimes pour le passage de chaque plan incliné. Mais, d’un autre côté, le droit sur le transport des houilles, qui forme l’objet principal de ce rail-way, établi à 1 penny par ton et par mile anglais, c’est-à-dire à 6 1/4 centimes par kilomètre, est réduit à moitié pour tous les chargements qui, parcourant la ligne jusqu’à son extrémité, sont embarqués au port de Stokton pour être exportés. En sus du prix de transport, la compagnie perçoit, pour le louage de ses wagons, un demi-penny par ton et par mile; le droit total est donc de 9e, 37 par tonne de houille consommée dans le pays, et de 6e, 25 par tonne destinée à l’exportation. Par ces sages mesures, le gouvernement anglais atteint le double but de favoriser l’accroissement des transports dans l’intérêt de la compagnie, et d’encourager, dans son propre intérêt, l’écoulement hors de ses frontières des productions de son sol et de son industrie. Sans affirmer absolument que la compagnie de Darlington doit à ces conditions l’état florissant de son entreprise, je ferai cependant remarquer que ce chemin de fer est le seul dont personne n’ait jamais songé à contester le succès. C’est donc un précédent qui devra être pris en sérieuse considération par le gouvernement et par les compagnies, quand il s’agira de déterminer les bases d’une exploitation analogue.
A l’époque où furent accordées en France les premières concessions de chemins de fer, l’organisation de ce genre d’établissements n’y était connue encore que de la manière la plus imparfaite. Le gouvernement crut devoir, par précaution, se réserver le moyen de mettre postérieurement à profit les leçons de l’expérience. Il laissa donc dans le vague tous les points sur lesquels il ne pouvait statuer en connaissance de cause et d’une manière définitive: c’est ainsi que dans l’ordonnance royale qui autorise la construction du chemin de fer de Saint-Étienne à Lyon, il n’est nullement question du transport des voyageurs, et qu’on s’y est borné à fixer les lieux de chargement. Plus tard seulement, on décida que de cette fixation résultait, comme conséquence au profit de la compagnie, le droit de percevoir le prix entier porté au tarif pour le parcours entre deux de ces stations, quelque court que fût d’ailleurs le trajet accompli. Ce principe, après avoir été le sujet de quelques contestations, fut enfin admis et mis à exécution comme formant la loi des parties. Postérieurement encore, le gouvernement a adopté pour minimum du droit de parcours sur le chemin de fer de Paris à Saint-Germain une distance de 6000 mètres. Peut-être est-ce trop peu; je crois qu’en portant cette distance à 10000 mètres, on aurait traité plus équitablement les intérêts de la compagnie sans nuire à ceux du public.
Je n’essayerai pas de calculer, comparativement à la dépense, les avantages que peuvent produire, soit la création d’un chemin fer, d’un canal, d’une route ordinaire; soit la canalisation d’une rivière; soit la construction, au moyen de l’asphalte, d’une route dont le service serait fait par des machines locomotives, nouveau genre d’établissement qui paraît devoir prendre bientôt rang parmi les utiles inventions de notre époque. De telles comparaisons, je le répète, ne prouvent rien lorsqu’on en a pas précisé les termes. Pour leur donner quelque valeur, il faudrait qu’on y tint compte d’une foule de circonstances, variables à l’infini, et sur la rencontre desquelles on ne peut même bâtir un système raisonnable de probabilités. En effet, quand il s’agit d’ouvrir une voie de communication, la détermination à prendre dépend et des besoins que l’on a à satisfaire, et de la disposition des localités, et du prix des matières premières, et des ressources de toute espèce dont on peut disposer, et enfin du degré de civilisation et de l’état moral des populations chez lesquelles et pour lesquelles cette voie doit être ouverte. On ne sait pas ordinairement, à moins que l’on n’en ait fait sur les lieux une étude spéciale, quelles grandes différences existent parfois dans la nature de deux pays qui, physiquement, sont peu éloignés l’un de l’autre; entre deux populations dont les mœurs et les usages semblent être à peu près les mêmes. C’est un examen que ne doit jamais manquer de faire préliminairement celui qui fonde une industrie dans une contrée où elle est nouvelle. S’il froisse des habitudes, s’il heurte sans ménagement des préjugés, s’il n’a pas d’avance, et avec soin, pesé la résistance qu’il trouvera dans ce genre d’obstacles, il marche entre deux dangers qui le menacent également: ou bien il échouera complètement dans ses projets; ou bien il verra, à la moindre circonstance imprévue qui viendra contrarier ses efforts, l’opinion publique rejeter sur son incapacité, sur son ignorance, ou sur des causes chimériques, mais accusatrices, ce que souvent nulle sagesse humaine n’aurait pu éviter.