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ОглавлениеL’INCENDIE DE TROIE
(1270 av. J.-C.?)
On n’a pas à rappeler ici la suite des événements qui amenèrent la chute de Troie: notre court récit doit commencer au moment où les Grecs, pénétrant dans la cité de Priam, donnèrent le signal du massacre et de l’incendie.
«C’était, dit Virgile, l’heure où le sommeil, doux présent des dieux, commence pour les malheureux mortels et leur verse ses premières langueurs.» Des points les plus opposés de la ville partent des cris de détresse; des bruits confus et lugubres remplissent l’enceinte d’Ilion, et partout retentit le fracas des armes. «Avec plus de fureur encore, le feu exerce ses ravages, et la flamme se communique avec rapidité .» Énée, réveillé en sursaut, monte d’un bond sur le faîte du palais de son père; il regarde autour de lui; il voit les riches demeures de Deïphobe et d’Ucalégon s’écrouler sous les flammes, et la lueur de l’incendie éclaire au loin la plaine de Sigée.
Transporté de colère, le fils d’Anchise saisit ses armes. Il réunit ses compagnons et les engage à vendre chèrement leur vie; puis, la petite troupe se dirige vers le centre de la ville. La vue du sang et des cadavres qui jonchent les rues anime les combattants, et un grand nombre de Grecs tombe sous les coups des compagnons d’Énée. Revêtus des dépouilles de ceux qu’ils ont tués sur leur route, les Troyens arrivent au palais de Priam, seul monument épargné par le feu; ils y sont témoins de la mort du vieillard; ils voient Pyrrhus traîner le roi au pied des autels et le percer brutalement de son glaive. Énée, à cette vue, songe à son vieux père. Il n’est plus maître de sa fureur, et il se dispose à faire mourir la fille de Tyndare qu’il aperçoit sur le seuil du temple de Vesta, lorsque la déesse sa mère lui apparaît et lui conseille de fuir.
«Alors, dit Énée, je vois Ilion tout entière s’abîmer dans les flammes et la cité de Neptune s’écrouler de fond en comble. Ainsi, lorsque sur la cime des monts les bûcherons, le fer à la main, s’efforcent à l’envi d’abattre un frêne antique sous les coups redoublés de la hache, l’arbre longtemps menace et balance à chaque secousse son feuillage tremblant jusqu’à ce qu’épuisé peu à peu par ses blessures, il pousse un dernier gémissement et tombe, arraché du sommet de la montagne. Je descends de la citadelle et, conduit par la déesse, je traverse les flammes et les ennemis: les traits me laissent passer et les flammes s’écartent devant moi .» Et, pendant que le bruit de l’incendie, roulant ses tourbillons et dévorant le rempart, devient plus terrible, Énée, prenant son père sur ses épaules, sort de la ville et gagne les montagnes.
Les Grecs ne trouvaient plus aucune résistance; ils pillaient dans les maisons les meubles les plus précieux et tout ce qui pouvait assouvir leur cupidité. «Enfin, ils livrèrent aux flammes les murailles de Troie et l’ouvrage de Neptune devint ainsi la proie de l’élément destructeur. La cité, réduite en cendres, servit elle-même de tombeau à ses anciens habitants.»