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III.–FAMILLE DE MONTESQUIEU.
Оглавление68(1236. II, fo100vo).–Je vais commencer par 5une sotte chose, qui est ma généalogie.
69(5. I, p.2).–Mon fils, vous êtes assez heureux pour n’avoir ni à rougir, ni à vous enorgueillir de votre naissance.
Ma naissance est tellement proportionnée à ma fortune que je serois fâché que l’une ou l’autre fût plus grande.
Vous serez homme de robe ou d’épée. Comme vous devez rendre compte de votre état, c’est à vous à le choisir. Dans la robe, vous trouverez plus d’indépendance et de liberté; dans le parti de l’épée, de plus grandes espérances.
Il vous est permis de souhaiter de monter à des postes plus éminents, parce qu’il est permis à chaque citoyen de souhaiter d’être en état de rendre de plus grands services à sa patrie. D’ailleurs, une noble ambition est un sentiment utile à la société, lorsqu’il se dirige bien.
Comme le monde physique ne subsiste que parce que chaque partie de la matière tend à s’éloigner du centre, aussi le monde politique se soutient-il par ce désir intérieur et inquiet que chacun a de sortir du lieu où il est placé. C’est en vain qu’une morale austère veut effacer les traits que le plus grand de tous les ouvriers a imprimés dans nos âmes. C’est à la morale, qui veut travailler sur le5 cœur de l’homme, à régler ses sentiments, et non pas à les détruire.
70* (1659. III, fo12).–Et notre fortune, quoique médiocre, est telle que moi, vous et les vôtres aurons toujours à aimer, à honorer, à servir notre prince, et rien à lui demander.
..... la profession, la plus grande et la plus belle que les hommes entre les hommes puissent exercer.
.....que vous n’avez point à rougir de votre fortune et de votre naissance, et encore moins à vous en orgueillir.
.....que nous n’avons ni à caresser la Fortune, ni à la tenter.
.....parce que l’on est toujours grand avec la majesté de la vertu et de l’innocence.
Comme c’est la première fois que ma bouche a parlé de ces choses…
Je ne vous ai jamais souhaité des emplois plus brillants. Je ne vous souhaite point de plus grands emplois, mon fils: on est toujours grand avec la majesté de la vertu et de l’innocence.
71(1344. II, fo193).–Ma fille disoit très bien: «Les mauvaises manières ne sont dures que la première fois.»
72(2170. III, fo359vo).–A mon Petit-Fils.– J’avois pensé à vous donner des préceptes de morale. Mais, si vous ne l’avez pas dans le cœur, vous ne la trouverez pas dans les livres.
Ce n’est point notre esprit, c’est notre âme qui nous conduit.
Ayez des richesses, des emplois, de l’esprit, du savoir, de la piété, des agréments, des lumières; si vous n’avez pas des sentiments élevés, vous ne serez jamais qu’un homme commun.
Sachez aussi que rien n’approche plus des sentiments bas que l’orgueil, et que rien n’est plus près des sentiments élevés que la modestie.
La fortune est un état, et non pas un bien. Elle n’est bonne qu’en ce qu’elle nous expose aux regards et nous peut rendre plus attentifs; elle nous donne plus de témoins, et, par conséquent, plus de juges; elle nous oblige à rendre un compte d’elle-même. On est dans une maison dont les portes sont toujours ouvertes; elle nous met dans des palais de cristal, incommodes, parce qu’ils sont fragiles, et incommodes, parce qu’ils sont transparents.
Si vous avez une fois tout ce que la nature et votre condition présente vous ordonnent de désirer, vous laissez entrer dans votre âme un désir de plus: prenez-y bien garde: vous ne serez jamais heureux. Ce désir est toujours le père d’un autre. Surtout si vous désirez des choses qui se multiplient, comme l’argent, quelle sera la fin de vos désirs?
Il n’y a qu’à se demander pour quel usage on désire tant cet argent. Le consul Paullus se vendit pour une somme à César, qui perdit Rome. Il employa cet argent à faire construire une basilique à Rome.
Quand vous lirez l’histoire, regardez avec attention tous les efforts qu’ont faits les principaux personnages pour être grands, heureux, illustres. Voyez ce qu’ils ont obtenu dans leur objet, et calculez, d’un côté, les moyens, de l’autre, la fin. Cependant le compte n’est pas juste: car les grands tableaux de l’histoire sont de ceux qui ont réussi dans leurs entreprises éclatantes. Voyez quelle partie ils ont trouvée de cette pierre philosophale qu’ils cherchoient: le bonheur et le repos.