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Montesquieu possédait une série de volumes in-4o, solidement reliés et composés de feuilles toutes blanches primitivement. De l’un d’eux, il n’a utilisé que quelques pages, pour y consigner les corrections qu’il voulut, d’abord, introduire dans son traité sur la Grandeur des Romains. Mais les autres étaient appelés à lui rendre des services plus variés et plus durables.

Tantôt il y inscrivait lui-même et tantôt il y faisait inscrire des notes relatives à des faits curieux, ou des extraits de ses lectures, ou encore l’expression de ses idées personnelles, résumées en courtes formules ou plus ou moins longuement développées. Dans celui de ces registres qui nous semble être le plus ancien, et qui est intitulé Spicilegium, on trouve surtout des notes; au besoin, des recettes médicales. C’est, au contraire, à des analyses de livres qu’étaient réservés presque exclusivement six à huit tomes environ, dont un seul nous est parvenu, mais dont chacun était affecté à un ordre spécial d’études, tel que le Droit, la Politique, la Géographie, etc. Enfin, trois volumes, autrement précieux que le reste, constituent un recueil où des réflexions détachées sont mêlées à de petites œuvres inédites ou à des fragments inédits d’œuvres que l’auteur de l’Esprit des Lois n’a jamais terminées ou n’a terminées qu’en en retranchant des parties plus ou moins importantes. C’est à la publication de ce recueil que nous consacrons le présent ouvrage.

Le premier des trois volumes dont nous parlons semble avoir été commencé après l’impression des Lettres Persanes; le second, après celle des Considérations sur la Grandeur des Romains; et le troisième, après celle de l’Esprit des Lois.

Mais il s’en faut bien qu’on puisse induire sûrement de ce qu’un morceau se trouve à la suite d’un autre, qu’il n’ait pas été transcrit avant lui dans le registre où il figure. Les intercalations sont visibles dans une foule d’endroits. C’est même par dizaines, sinon par centaines, que l’on compte dans les tomes II et III, entre les pages écrites, celles qui sont demeurées en blanc, et qui, sans doute, étaient destinées à recevoir des pièces ayant quelques rapports avec les fragments qu’elles auraient immédiatement suivis.

Nos volumes n’en fournissent pas moins des renseignements chronologiques; mais il est parfois délicat de les en tirer.

Ajoutons que, bien qu’ils comprissent, outre un millier de courtes réflexions, des œuvres ou fragments d’œuvres de plus longue haleine, Montesquieu, lui-même, les désignait ordinairement sous le titre de Mes Pensées. Nous suivrons son exemple. En parlant des manuscrits que nous éditons, nous les appellerons tome I, II ou III des Pensées ou encore des Pensées (manuscrites) de Montesquieu.

Pensées et fragments inédits de Montesquieu

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