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La porte était légèrement entr’ouverte, Voiron, qui était adroit comme un chat, se glissa à quatre pattes dans la chambre des amoureux et profita de l’ombre pour y voler, sur le canapé, tous les habits de ce pauvre Guy.–Comme ça, avions-nous dit, il faudra bien qu’il se révèle à nous in naturalibus. Je vous le répète, pour m’excuser, mesdames, nous étions ivres comme des cochers. Il était convenu que j’entrerais ensuite et ferais un grand bruit pour faire peur à des Etoupettes qui se croirait surpris par son rival et sauterait vraisemblablement par la fenêtre. Je vous ai dit qu’il n’y avait aucune lumière dans la maison. Ce qui avait été médité fut, de point en point, accompli.

Pan! pan! pan! pan! Je is le va carme a annoncé. Je vis vaguement un homme sauter du lit. J’entendis des cris de femme. L’homme se baissa d’abord, puis prit son élan par la croisée. En passant, il me fouetta avec quelque chose au visage. Je tendis les mains et j’empoignais. Ce quelque chose, horreur! était velu et me resta dans les mains. Je roulai à terre avec. Pendant ce temps-là des Etoupettes s’esquivait au galop, et le malheureux Voiron, s’embarrassant dans les plantes grimpantes, demeurait suspendu à une autre fenêtre et nous faisait perdre ainsi le fruit d’une si noble expérience. Mais moi j’avais en mains le corps du délit, l’appendice de des Etoupettes. Car je le tenais, ce précieux secret! Je la possédais, cette curiosité physique, que notre camarade cachait avec un si grand soin. Je vais vous la chercher, car je l’ai toujours conservée. C’est à peu près comme une queue de panthère, très bien moucheté, et c’était placé à l’endroit même où ces admirables félins portent cet ornement.

Et Laripète sortit avec un air de triomphe.

Il rapporta quelques instants après, enveloppée soigneusement dans du papier de soie, la chose qu’il avait annoncée, portant cette petite étiquette: «Offerte au musée de ma ville natale après ma mort. Détachée par moi et par surprise du corps d’un officier de dragons.».

–Voulez-vous me permettre de regarder? dit, d’une voix éteinte, le général baron Leloup de la Pétardière.

–Volontiers, général, ne fut-ce que pour vous convaincre.

Le général souffla. légèrement dans le poil et y découvrit cette autre petite inscription qu’il y avait lui-même découpée autrefois avec des ciseaux très fins: «Panthère tuée par moi à Biskra le14août1845et offerte à ma bien-aimée Césarine. Son Honoré.»

Il se rappela que Césarine avait un jour perdu cette précieuse fourrure sans avoir pu lui expliquer comment, et bien qu’il fût extraordinairement borné, il devina que le coupable des Etoupettes, ne retrouvant pas ses habits, s’en était fait un paletot, pour se sauver, et ne pas tomber tout nu dans la rue. C’était donc la queue de l’animal que Laripète avait arrachée au passage.

–Eh bien, êtes-vous convaincus, maintenant? dit triomphalement le commandant.

–Parfaitement, répondit le général baron Honoré Leloup de la Pétardière qui n’avait aucune envie de rétablir, devant son épouse, la réalité des faits.

–Et vous, Le Kelpudube c?

–Moi, fit l’amiral, je persiste à croire que votre camarade avait tout simplement avalé le matin une queue de panthère à son déjeuner, en croyant manger une anguille à la tartare. Ces restaurateurs sont si voleurs aujourd’hui!

Histoires belles et honnestes

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