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Ceci est un simple conte dans le goût de ceux qu’aimaient à se dire nos aïeux, après boire, pour se consoler sans doute de n’être pas aussi heureux que nous. Car les pauvres gens ne possédaient pas le suffrage universel, non plus que deux Chambres, dont l’une défait religieusement ce que fait l’autre, ce qui est le souverain bonheur pour un peuple libre, pour un peuple libre, dis-je, de contempler à son aise ce jeu pénélopéen, en attendant que les alouettes lui tombent au gosier toutes rôties, ce que ne cessent de lui promettre les politiciens savants qui estiment que leurs simples discours sont plus savoureux et réconfortants à la multitude que les meilleurs gibiers. Oui, mes amis, les abstracteurs de quintessence sociale l’imaginent ainsi et croient-ils fermement qu’on entend le soir, dans les familles prolétaires, des propos de la façon de celui-ci: «Nous fîmes bien de pas acheter au marché cette dinde coûteuse qui nous a tentés un moment; car nous avons, dans notre journal, un Gâtineau qui nous emplit bien autrement la bouche et le ventre que cette ridicule volaille, et vaut à lui seul tous les rôtis.» Une autre fois, c ’est d’une éloquente colère de M. Langlois qu’ils déjeunent, en se répétant: «Mange qui voudra du homard à l’américaine! Voilà qui est bien autrement pimenté et délectable au palais! «A un peuple si substantiellement repu par ses institutions démocratiques, il faut de solides romans bien pleins d’horreurs, ou de sérieuses dissertations dont l’ennui soit d’une irréprochable tenue. Mes amis, oublions que nous sommes de ce temps illustre et cherchons seulement à rire un brin, en disant des gaudrioles. Ne croyez pas cependant que je vais prendre les héros de cette menue aventure dans la suite du roi Louis XI, dit le Bien-Aimé, par les corbeaux, grands amateurs de pendus; ou parmi les contemporains du roi Louis le Gros, lequel mourut de fatigue pour n’avoir pu trouver à la fin, dans tout son royaume, un fauteuil où son derrière pût entrer. ce qui est un bien grand supplice pour une tète couronnée; pas même dans le tas des Pschuts du roi Henri III, qui s’illustra par des mœurs postérieures, au dire des historiens qui regardent toujours derrière eux.

Sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques,

a dit le divin Chénier (la peste soit de l’autre!) Ainsi de ma prose qui aime les gauloiseries d’antan, mais les prête aux hommes d’aujourd’hui, ce qui est bien le plus beau présent qu’on leur puisse faire. D’ailleurs, la nature humaine change-t-elle jamais avec le temps, et aujourd’hui comme autrefois, les servantes accortes n’aiment-elles pas les vaillants hommes d’armes, comme les belles et honnestes dames détestent les époux quinteux et trop vieux pour les bien besogner dans les choses de l’amour. Or, il ne m’en .faut pas davantage pour le véridique et plausible conte que voici:

Histoires belles et honnestes

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