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IV

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Kerkadec, oppressé par l’émotion, fit une nouvelle halte dans son récit.

La nuit était devenue complète; l’azur sombre du ciel s’illuminait d’une myriade d’étoiles, mais voilées, pâles et tristes.

Un profond silence pesait sur le camp endormi: les feux ne jetaient plus que de mourantes lueurs; les tentes et les sentinelles semblaient autant de fantômes blancs et noirs.

Dans l’immobilité même de cette atmosphère sans un souffle de vent, il y avait quelque chose d’étrangement mélancolique, en harmonie parfaite avec la douloureuse confidence de l’officier breton.

Il continua:

«Ce pauvre Gabriel avait déjà bien souffert!

Il portait au front, aux mains, aux pieds, de sanglantes cicatrices.

A l’exemple, en dérision du divin Maître dont il était allé répandre la doctrine et prêcher la Passion, on l’avait couronné d’épines, on l’avait crucifié.

Oh! je me souviendrai toujours de l’attendrissement, de l’admiration d’Yvonne et de Benjamin lorsque, de retour à la maison, ils firent asseoir entre eux le bien-aimé missionnaire, ils examinerent, ils touchèrent, ils baisèrent pieusement ses glorieuses blessures.

Que fût-ce lorsqu’il raconta son long voyage et ses douloureuses épreuves, lorsqu’il décrivit ce bizarre et mystérieux pays, lorsqu’il parla des périls qu’il avait affrontés, des souffrances qu’il avait subies, des conversions dont il avait eu la gloire!

Benjamin surtout, Benjamin l’écoutait avec une ardente curiosité, avec un enthousiasme qui, de jour en jour, sembla grandir encore.

Aussi, lorsque Gabriel parla de repartir:

–Je t’accompagnerai! lui dit Benjamin d’une voix fermement résolue, je désire m’associer à ton apostolat… je t’en prie, frère… je le veux!

Cette fièvre de dévouement, cette ardeur chrétienne, nous avait gagnés tous. Dans le premier élan de son âme, le vieux Penhoël lui-même applaudit à la courageuse résolution de son plus jeune fils.

Mais, se ravisant aussitôt, et des larmes plein les yeux

–Ah! s’écria-t-il, je n’ai plus que vous deux… Si vous alliez aussi mourir!

Ce fut Yvonne qui répondit:

–Quahd on meurt comme sont morts Brieuc et Corentin, comme mourront peut-être Benjamin et Gabriel…, en cherchant à sauver des hommes ou des âmes!…, c’est-à-dire pour le service de Dieu., la mort est une récompense., un bien!

Tandis qu’elle prononçait ces paroles, Yvonne rappelait ces vierges chrétiennes qui jadis, le front calme, le sourire aux lèvres, le regard illuminé par une dernière prière, attendaient, héroïquement au milieu du cirque, la couronne du martyre, et qui sont des saintes dans le ciel.

–Partez! partez tous les deux! dit alors le vieux Penhoël, et si le Seigneur veut que je reste seul ici-bas, que sa volonté soit faite!

Quelques jours plus tard, Gabriel et Benjamin ’embarquaient pour la Chine. De loin, à l’extrémité de la jetée, le père et la jeune sœur adressaient aux deux missionnaires un suprême adieu.

Puis, tous les trois, nous allâmes nous agenouiller au pied do la grande croix qui domine la rade, Jusqu’alors le vieillard n’avait pas versé une larme. Mais, en rentrant dans sa maison déserte, il se laissa tomber sur le fauteuil rustique, autour duquel se groupaient autrefois ses quatre fils, et il pleura.

–Je vous reste, mon père, dit Yvonne en l’entourant de ses bras, en baisant ses cheveux blancs.

Quant à moi, j’avais pris les deux mains du vieillard dans les miennes, je lui criai du fond du cœur:

–Ne suis-je pas aussi votre fils?

Hélas! j’oubliais en ce moment la dette qu’il me fallait payer à la patrie.

–Courage! me dit Yvonne au moment du départ, faire son devoir, servir son pays, c’est encore servir le Seigneur!

La loi de Dieu

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