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VI

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Après un premier temps d’épreuves, Gaiel et Benjamin étaient parvenus à fonder, dans l’une des provinces les plus reculées de la Chine, dans le Kouang-si, ce que les missionnaires appellent une chrétienté.

Cette humble et primitive paroisse, perdue dans une montagneuse contrée, au bord d’un grand fleuve, ne se composait tout d’abord que de quelques chaumières habitées par de pauvres parias convertis au culte du vrai Dieu.

Grâce aux efforts persévérants, grâce à l’attractive vertu des deux jeunes apôtres, la colonie s’accrut rapidement, devint très-prospère.

De nombreuses habitations s’élevèrent sur cette rive jusqu’alors déserte; les campagnes environnantes furent défrichées, se couvrirent d’intelligentes cultures, car les frères Penhoël n’enseignaient pas seulement la religion, mais aussi le travail.

Ce travail fut béni de Dieu; la chrétienté ne tarda pas à se trouver assez riche pour élever, dans ce pays idolâtre, une chapelle que surmontait la croix.

Toutes les vertus évangéliques, toutes les béatitudes possibles ici-bas s’épanouissaient, ignorées et paisibles, dans ce simple coin de terre, dont les frères Penhoël avaient fait une sorte de paradis.

Bientôt leur réputation s’étendit au loin, leur attirant de nouveaux prosélytes. Quelque temps encore, et toute la province allait devenir chré-’ tienne,

Mais la jalousie des prêtres de Boudha no l’entendait pas ainsi, leur fanatisme réveilla la colère endormie des persécuteurs et des bourreaux.

Un jour même le village fut cerné, envahi par des soldats avides de pillage, altérés de sang. C’était toute une armée de tigres.

La résistance était impossible. On somma les chrétiens d’abjurer leur croyance. Ils refusèrent.

Vainement on incendia leur village; vainement on les menaça de la mortt; vainement on en tortura quelques-uns, on en crucifia quelques autres. Pas un seul ne faiblit, même dans les plus atroces supplices.

Il est vrai que ceux-là qu’on martyrisait le plus cruellement, c’étaient les frères Penhoël, dont l’exemple était un encouragement, dont l’héroïsme semblait un miracle.

Les tigres, enfin, désespérant de vaincre tant de courage, imaginèrent un terrible moyen d’en finir. Des bâteaux à soupape, des bâteaux semblables à ceux de Carrier, apparurent sur le fleuve. On y transporta la chrétienté tout entière, hommes, femmes, enfants, vieillards. tous enfin, à l’exception de quelques malheureux qui se tordaient sur les grandes croix sinistres, élevées çà et là parmi les ruines fumantes du village réduit en cendres.

Les deux jeunes pasteurs avaient été embarqués les derniers. Vers le milieu du fleuve, les soupapes furent ouvertes, et tous les chrétiens engloutis.

La plupart de ces malheureux revinrent à la surface des eaux, se recherchant, s’appelant, s’embrassant dans un suprême effort.

Parmi les bourreaux, qui les criblaient de flèches et de balles, c’étaient des clameurs féroces ou de grands éclats de rire; parmi les victimes, des gémissements, des cantiques et des prières.

A travers les groupes et les cadavres à demi submergés, Gabriel et Banjamin allaient et venaient, nageant d’une main, bénissant de l’autre.

Une dernière décharge eut lieu. Un dernier cri s’éleva du fleuve, où tout s’engloutit, disparut.. Avec le troupeau, les pasteurs.

On ne distinguait plus, sous les eaux ensanglantées, que leurs deux longues soutanes noires qu’emportait le courant.

La loi de Dieu

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