Читать книгу Le livre de l'exilé, 1851-1870 - Edgar 1803-1875 Quinet - Страница 27
ОглавлениеDernier Remède.
On me dit que cette fange est nécessaire, que c’est là un progrès, que de cette pourriture naîtra un monde. Je le veux bien. Mais permettez-moi de n’avoir rien de commun avec cette création dans la fange. Je suis un homme du passé, déclassé. Tant d’ignominie me surpasse. Je ne saurais y atteindre.
Quelle immense accumulation de métaphysique, pour expliquer un acte de bassesse! Comme si la servilité était une chose inconnue sur la terre!
Mais on veut être vil d’une manière unique, qui n’appartienne à personne. Vous me parlez des entités, des catégories, pour m’expliquer le Deux Décembre!
Eh! que ne me dites-vous: J’avais une âme de valet et je me prosternai naturellement dans l’antichambre.
Tout le monde comprend ce langage.
Relever le peuple sans aucun effort moral, sans aucune vertu, hélas! je comprends trop, je connais trop ce langage! Il y a trois ou quatre siècles qu’on l’a tenu à d’autres cadavres.
Si ce pays veut périr, pourquoi les autres le suivraient-ils dans le suicide? Le temps est venu où la plus simple probité nous oblige de dire aux autres: Sauvez-vous sans nous.
N’attendez pas de revivre par nous, qui avons pris goût à la mort.
Ne poussez pas l’imitation, la contre-façon jusqu’à contrefaire nos opprobres.
Pour se sauver du déluge de boue, il faudrait gravir le mont Ararat de la justice, le pic le plus escarpé du Droit et de la Vérité.
Dernier remède pour un peuple dégradé : Reconnaître et confesser son infamie.