Читать книгу Le livre de l'exilé, 1851-1870 - Edgar 1803-1875 Quinet - Страница 29
ОглавлениеLa Mer du Nord.
Ils n’ont pu m’enchaîner dans le froid hiver. Voici le printemps! Il me reconnaît encore et me sourit.
Nous marchions au bord de la mer, sur une plage unie, où ne s’apercevait aucun vestige de pas d’hommes.
Nous nous entretenions de ce qu’il y a de plus intime dans les espérances humaines.
Le roulement continu des flots accompagnait nos paroles, et quelquefois une vague, partie de la haute-mer, se brisait à nos pieds et semblait nous dire: Je suis témoin entre le ciel et vous!
Mouvement éternel de la vie dans la nature morte! Rhythme sacré des éléments, pulsation de l’infini visible!
Une vague se forme au loin dans le sein de l’Océan; elle s’amoncelle, elle arrive, elle se répand sur la plage avec une multitude de coquillages, d’herbes marines et de débris d’anciens naufrages. A peine cette vague a-t-elle touché le bord, elle se retire, en emportant tout ce qu’elle avait montré au soleil; et la terre semble plus aride et plus stérile qu’auparavant.
Voyez, une troisième fois la vague est revenue; elle a roulé de nouveau les trésors arrachés aux abîmes; et le sol qu’elle a conquis devient pour jamais le domaine de l’Océan, Lui seul y règne; personne n’essaiera de l’en déposséder.
Ainsi du flux et du reflux des choses humaines.
Toi qui regardes du haut de la grève, et qui vois le flot se retirer, tu te désoles de ne plus trouver qu’un sable aride à la place des espérances nées de l’écume. Esprit immortel, attends encore un jour, une année, un siècle sur la rive. Le flot te rendra au centuple ce qu’il t’a enlevé.
Blankenbergh (Flandre-Orientale), 31 juillet 1852.