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Ce mouvement des esprits vers l’histoire de l’art étudiée dans les faits les plus humbles d’une existence d’artiste, l’Académie des Beaux-Arts l’a noblement secondé. L’institution des secrétaires perpétuels, qui remonte à 1804, a eu pour effet immédiat d’assurer aux artistes les plus marquants un Éloge dans lequel ils seraient, — pour me servir d’une expression connue, — «racontés par un témoin de leur vie».

Joachim Le Breton et son successeur Quatremère de Quincy, écrivirent sur leurs confrères décédés de trop brèves notices. L’usage admis, lorsqu’ils étaient en fonctions, de lire plusieurs Éloges au cours d’une même séance, exigeait de leur part une grande concision. Raoul Rochette obtint de l’Académie qu’un seul Eloge serait lu à chaque séance annuelle. Halévy, Beulé et M. Delaborde ont respecté ce qu’avait établi la Compagnie à la demande de Raoul Rochette.

Mais si les Éloges académiques gagnèrent en intérêt à être plus étendus, leur nombre diminuait, et nécessairement le secrétaire perpétuel se trouvait empêché de rendre justice à la mémoire de plus d’un Académicien disparu.

Le 19 octobre 1867, Lefuel eut la pensée de parer à cet inconvénient. A sa demande, l’Académie fut invitée à se prononcer sur la proposition suivante:

«Tout membre, dans les six mois qui suivront son élection, devra lire en séance ordinaire une notice historique sur la vie et sur les travaux de son prédécesseur. »

Cette proposition étant appuyée par plusieurs membres, l’Académie décida qu’une commission, nommée le 26 octobre, serait chargée de l’examiner. Le 13 novembre suivant, au nom de la commission, composée de MM. Couder, Guillaume, Gatteaux, Reber, Taylor, et des membres du bureau, M. Guillaume rapporteur, conclut en ces termes:

«La commission propose à l’Académie d’émettre le vœu inséré au procès-verbal, que tout académicien, six mois au plus après son élection, rédige et communique à l’Académie une notice sur son prédécesseur. Cette obligation, qui n’aurait pas d’effet rétroactif, commencerait. à partir de la première élection qui suivrait le vote de la présente proposition.

«Il serait donné communication de ce vœu aux nouveaux élus, immédiatement après leur élection.»

La proposition fut adoptée à l’unanimité.

En prenant cette mesure, l’Académie des Beaux-Arts allait donner une impulsion décisive à l’histoire de l’art par les artistes. Une foule de travaux curieux devaient être la conséquence d’une aussi sage décision: et si l’Institut, comme on doit le penser, reste fidèle à la règle posée par lui, avant un demi-siècle, la série des notices lues dans ses séances constituera la source la plus riche et la plus autorisée que devront consulter les historiens de notre École.

En l’espace de quinze années, trente-six notices ont été rédigées par des membres de l’Académie des Beaux-Arts. Sur ce nombre, dix ont trait à des membres libres, amateurs, écrivains d’art ou administrateurs; ces études ne sont pas, au sens rigoureux de l’expression, des «Vies d’artistes». Mais les notices des peintres, des sculpteurs, des architectes, des graveurs, des musiciens, dans lesquelles ceux-ci jugent des contemporains qui ont été leurs émules, — peut-être leurs rivaux, — présentent un puissant intérêt.

Conférences de l'Académie royale de peinture et de sculpture

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