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II. — Alpes-Maritimes.
Оглавление«C’est, dit O. Reclus, un fortuné littoral que celui qui va de Marseille à la borne de l’Italie; la mer y entre dans les terres par des anses, des calanques, de gracieux golfes abrités du nord, et la terre dans la mer par des promontoires qu’on dirait détachés de la Sicile ou de la claire Ionie. Là, le plus clair soleil de France attiédit l’air, l’oranger l’embaume, et, à l’est de Toulon, le palmier balance des palmes. Sous un ciel gris, la vague armoricaine tonne avec plus de fureur contre ses falaises, mais la vague bleue de Provence murmure sur de plus riants rivages et les caps qu’elle froisse dans ses jours de rage s’élancent bien plus haut que les promontoires du Finistère».
Le département des Alpes-Maritimes fait partie de ce littoral fortuné. Si un hiver presque éternel règne sur quelques-uns de ses sommets, il a dans certains points de son littoral un perpétuel printemps. Aussi c’est le rendez-vous de tous les désœuvrés, de tous les fourbus, de tous les fatigués, de tous les propres à rien, fabriqués avec des viandes veules, de tous ces êtres lamentables que vomit la pourriture bourgeoise et qui, avides d’air pur et de lumière, viennent étaler leurs carcasses de dégénérés au soleil qui a honte, sans doute, de verser la pluie d’or de ses veines sur de pareils enfants faits pour la nuit de la mort et qui insultent à la lumière du jour.
«Au point de vue de l’air et de la lumière, dit M. P. L. Camous, la ville de Nice ne laisse rien à désirer. Le soleil lui prodigue ses rayons les plus lumineux. Jamais de brouillards, jamais une atmosphère obscurcie par les fumées épaisses des cheminées d’usine: un perpétuel sourire du ciel».
En effet, entourée de tous côtés par de hautes montagnes, admirablement située dans la baie des Anges, en face d’une mer d’azur qui reflète un ciel presque toujours bleu, Nice jouit d’un climat heureux entre tous. Le thermomètre marque en hiver 5 à 8 degrés de plus qu’à Paris, en été 2 à 5 de moins; il ne descend que rarement au-dessous de zéro.
Les montagnes du Var et de l’Estérel protègent la ville contre le vent du nord-ouest, le mistral si redouté en Provence. Toutefois, il ne faut pas oublier qu’il y souffle en mars et avril un vent d’est très désavantageux pour les gens qui souffrent de la poitrine. En outre, au mois d’octobre, commence la saison des pluies qui dure cinq à six semaines.
Les vents d’est et d’ouest soufflent souvent sur la plage et leur haleine trop vive ne convient pas toujours aux personnes qui souffrent de maladies de poitrine.
Assez souvent, quand le soleil se couche, on éprouve à Nice une sensation analogue à celle que provoquerait le contact d’un manteau humide placé sur les épaules, phénomène qui cesse une ou deux heures plus tard.
Station peu recommandable en outre parce qu’on n’y trouve pas le calme et le repos; les plaisirs y sont trop faciles et il faut redouter le voisinage dangereux de Monaco.
Enfin, ajoutons, avec M. P. S. Camous lui-même, que les eaux de la Vésubie et de Sainte-Thècle qu’on distribue à ses habitants sont impropres à la consommation et même dangereuses.
Autrefois le vent d’ouest apportait à Nice les miasmes paludéens des bords du Var. Depuis que le fleuve a été endigué, ce danger a disparu. En outre, un rideau d’eucalyptus protège la ville.
A l’est de Nice, est d’abord la charmante rade de Villefranche, et, sur le rocher de la Turbie, Monaco où règne un prince qui se range encore au nombre des souverains de l’Europe et qui n’est guère qu’un tenancier de maison de jeu; enfin Menton, «la perle de la France», abritée contre les vents froids du nord par de hauts rochers. La température y est en général de 1 à2 degrés supérieure à celle de Nice.
La brume ne trouble que bien rarement l’azur du ciel de Menton qu’abrite un hémicycle de montagnes, mais la brise de mer agite assez fréquemment l’atmosphère vers le milieu du jour et le soir il n’est pas rare de voir une froide rosée.
Mieux encore que Nice, Menton convient aux bronchitiques et aux tuberculeux. M. Malibran leur recommande surtout les promenades du matin, alors que «la mer, les montagnes, le ciel, les vallées présentent avec le maximum d’éclat et de fraîcheur, cet aspect de décor féerique qui ravit l’œil et l’âme du promeneur le plus blasé, s’il n’est pas dépourvu de tout sens artistique. Quel plaisir, quel enchantement pour le convalescent d’errer à loisir dans les sentiers qui gravissent les collines ou bien dans les chemins qui serpentent le long des vallées! Quoi de plus sain et réconfortant que cette marche lente, cette flânerie fortifiant le corps pendant que l’esprit, livré à lui-même, rêve au hasard et se délecte à la vue des trésors naturels que rencontrent ses regards: ciel d’un bleu intense et velouté ; collines aux flancs pittoresquement boisés, montagnes aux contours à la fois majestueux et riants, dont les pics arides, rocheux, bizarrement découpés et tranchant par leur gris clair sur l’azur intense, portent à leur flanc de coquets villages, véritables nids d’aigles, morceaux de France découpés dans le Maroc ou la Kabylie.
«Avec sa longue route longeant le bord de la mer, du cap Martin à Gararan, permettant au promeneur de se diriger vers Monaco ou vers Vintimille en peu de temps; avec ses quatre vallées perpendiculaires au littoral, ses montagnes, etc., Menton offre au tuberculeux valide une variété inépuisable de sites qui empêche la monotonie du séjour, inséparable du plus beau site lorsque l’horizon est limité. Heureux celui qui habite cette contrée s’il aime la nature et sait la parcourir.»
Tournons maintenant le dos à l’Italie et, revenant à Nice, marchons vers l’ouest. Voici Antibes, puis Cannes où croissent l’aloès d’Afrique et l’eucalyptus d’Australie. La température moyenne hivernale y est de 9°7. Elle est abritée contre le vent du nord par les monts Estérel, ce qui la fait rechercher comme un séjour d’hiver par les gens qui souffrent de la poitrine.
A une dizaine de kilomètres dans l’intérieur du pays, sur le versant méridional de la grande montagne calcaire de Rocavignon, exposée au sud et abritée contre les vents froids, Grasse est une station d’hiver excellente pour les malades qui ne peuvent s’accommoder du voisinage de la mer. La magnifique ceinture de fleurs qui l’environne et dont elle tire les parfums qu’elle répand dans le monde entier, témoigne assez de la douceur ravissante de son climat.