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TABLEAU N° 1.

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Pour cette période, qui comprend douze années, le pouvoir d’achat fourni par les différentes denrées se présente ainsi:


Je ne possède pas, pour cette période, d’indications suffisantes sur les loyers et le bois de chauffage pour en faire état.

Sachant, au moyen de ce premier tableau, que le pouvoir moyen d’achat de la livre s’élève à 61 fr. 81 pour cette première période, et, d’autre part, connaissant sa valeur intrinsèque par les Tables de de Wailly, dont j’ai donné ci-dessus un extrait, il sera facile de déduire maintenant de ces deux données la moyenne pour cette même période du pouvoir de largent. C’est ce que va nous donner notre second tableau:

TABLEAU N° 2.


Et, en effet, 6 fr. 953 X 8,890 = 61 fr. 81.

De 1461 à 1472 le pouvoir moyen de l’argent peut donc être fixé à ce chiffre 8,890. Il résulte de là qu’à cette époque, 1 kilogramme de métal, or ou argent, avait la puissance que possèdent de nos jours 8 kilogr. 890 grammes de ces mêmes métaux et que celui qui avait, dans cette première partie du règne de Louis XI, mille livres de revenu était aussi riche que celui qui possède maintenant de 61 à 62.000 francs de rente, puisque les mille livres contenaient pour 6,953 francs d’argent, d’après notre monnaie d’avant guerre, et que ces 6,953 francs X 8,890 = 61,812 fr. Mais j’ajouterai incidemment que mille livres de revenu était chose rare en Poitou au temps de Louis XI, et se rencontrait moins fréquemment encore que 61.000 francs de rente en 1914.

Je parle ci-dessus de celui qui possède de 61 à 62.000 francs de rente et non pas de celui qui a 61.812 francs de rente car, fidèle à mes principes, j’entends ne fournir que des indications et non des précisions.

Pour obtenir cette moyenne générale, chaque denrée nous a apporté son contingent particulier, et ces contingents, qui sont loin d’être tous de même valeur, nous fournissent de précieuses indications sur la valeur proportionnelle de chaque chose à cette époque.

Je rappellerai ici qu’un pouvoir d’achat élevé de la livre indique que la denrée qui le fournit était, à l’époque, à bas prix. Ainsi le vin, qui, dans le tableau ci-dessus, nous donne le pouvoir d’achat le plus élevé, se vendait 12 sols la barrique de vin rouge et 5 sols la barrique de vin blanc . Les bestiaux, qui viennent ensuite, en donnant 84 francs comme pouvoir d’achat, étaient également à très bon marché : un mouton valait de 5 à 6 sous .

Pour les denrées alimentaires, on trouve le prix des poulets à 5 deniers, soit 0 fr. 02 de notre monnaie. Douze douzaines d’œufs valaient 4 s. 7 d., ce qui porte la douzaine à 0 fr. 01 c. 8 .

Le froment donne 50 francs comme pouvoir d’achat, c’est-à-dire un chiffre sensiblement inférieur à la moyenne, ce qui le classe parmi les denrées chères. En effet, le boisseau de froment se vendait en moyenne 14 deniers sur le marché de Poitiers . Sur ce pied, notre mesure actuelle, le double décalitre, qui, à la fin du XXXe siècle et pendant les premières années du XXe siècle, s’est vendu en moyenne 4 fr., valait 19 deniers, et ces 19 deniers, traduits en notre monnaie, représentent 0 fr. 08. A première vue ce prix semble infime; et cependant, si c’était notre pouvoir d’achat moyen de 61 francs que nous appliquions à ces 0 fr. 08, au lieu du pouvoir d’achat de 50 fr. spécial au froment, ce n’est plus à 4 fr que se trouverait portée la valeur du double décalitre, mais à 4 fr. 88. Le froment ne se trouvait donc pas, au temps de Louis XI, dans la valeur moyenne des denrées, et nous devons, ainsi que nous l’avons fait plus haut, le classer parmi les denrées chères .

Après le froment nous voyons arriver les Salaires, qui nous apportent le pouvoir d’achat le moins élevé, si nous négligeons les denrées diverses. Nous trouvons, dans cette première partie du règne de Louis XI, le prix de la journée des ouvriers d’art, menuisiers, charpentiers, maçons cotée de 7 à 10 centimes — (pour éviter les longueurs, je transforme tout de suite les anciens sous et les anciens deniers en francs et en centimes) —, la journée d’un faucheur cotée à 0 fr. 08 c. , et tout cela doit s’entendre d’ouvriers nourris. Or nous avons vu que le double décalitre de froment valait, à cette même époque, 0 fr. 08 c., de sorte que le charpentier qui, tout en étant nourri, touchait 10 centimes en espèces, gagnait, quitte et net, dans sa journée 25 litres de froment, soit l’hectolitre en quatre jours. Je ne sais pas si le fait s’est présenté, en Poitou, aux époques du XIXe siècle où le prix des salaires a été le plus élevé ?

Ce qu’il y a là d’intéressant, c’est qu’avec des documents entièrement nouveaux, j’arrive, à propos de ces salaires du XVe siècle, aux mêmes constatations qu’un grand nombre d’économistes. Mais nous verrons par la suite les prix des salaires s’avilir rapidement, et tomber très bas à partir du règne de François Ier.

Tous les prix que nous venons d’examiner donnent bien, ce me semble, l’impression que le chiffre du pouvoir d’achat de la livre fixé pour cette période à 61 francs, n’a rien d’exagéré et qu’une livre du temps de Louis XI valait certainement autant que 61 fr. de nos jours. Et cependant, au temps de Louis XI, la livre avait déjà beaucoup perdu de sa valeur. Un document que je tire des «Archives du Château de la Barre» de Richard, va nous en donner une idée. Par son testament, en date de l’année 1401, Jehanne Pouvreau, dame de la Barre, lègue précieusement un sou qui devra être partagé entre six pauvres: chacun d’eux aura 2 deniers, et, en traduisant ces 2 deniers en notre monnaie, cela donne 0 fr. 00834. Quel était donc le pouvoir d’achat de la livre à ce début du XVe siècle? Si nous le fixons à 100 francs, chaque pauvre recevait 0 fr. 83 cent. Il était bien difficile d’établir une clause spéciale dans un testament pour une somme de si minime importance.

Avant de passer à l’examen de la seconde période, je voudrais revenir encore une fois sur la diversité des chiffres représentant le pouvoir d’achat fourni par chacune des denrées prise isolément. Les denrées diverses nous donnent 41 francs, pendant que le vin nous apporte 93 fr. et que les autres denrées s’échelonnent entre ces deux prix. J’en ai dit la raison: que la proportion entre les prix de ces différentes denrées n’était pas la même à cette époque que de nos jours. Je veux en fournir ici une nouvelle preuve: Nous avons vu que, dans le cours de ces douze années, la valeur moyenne du double décalitre de froment se chiffrait par 8 centimes et celle d’un mouton par 25 centimes. Trois doubles décalitres de froment suffisaient donc, approximativement, pour payer un mouton. Il y a quelques années, avant la guerre, le double décalitre de froment avait une valeur moyenne de 4 fr., et un mouton de 12 à 15 mois valait au bas mot 20 francs: il fallait cinq doubles décalitres de froment pour payer un mouton. La proportion, entre les prix de ces deux denrées, était donc loin d’être la même sous Louis XI que de nos jours. C’est la raison pour laquelle ces denrées nous fournissent des valeurs relatives si différentes.

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