Читать книгу L'agriculture et les classes paysannes - Paul Raveau - Страница 24
AVANT-PROPOS
ОглавлениеL’étude que nous entreprenons sur l’ensemble de la Vie Economique en Poitou au XVIe siècle est entièrement tirée des manuscrits de l’époque déposés tant dans nos archives départementales que dans les archives de la ville de Poitiers. Cette étude comprendra quatre parties: 1° L’Agriculture et les Classes Paysannes dans le Haut-Poitou; 2° L’Industrie, le Commerce, les Gens de Finances; 3° Les Abbayes, les Chapitres, le Clergé, en ce qui concerne le temporel; 4° La Noblesse et la Bourgeoisie, leurs rapports entre elles et avec les autres classes de la société. La première partie que nous commençons ici ne traitera donc que de l’agriculture et des classes paysannes.
La vie de nos paysans n’a jamais beaucoup attiré l’attention des chroniqueurs; la façon dont ils préparaient et ensemençaient leurs guérets, levaient leurs récoltes, soignaient leurs animaux, exploitaient en un mot soit leur modeste héritage, soit la métairie de leur maître, n’a jamais été consignée à l’époque, que dans des manuels d’agriculture et autres «Maisons Rustiques», qui sont plutôt un assemblage de conseils empiriques que la véritable expression des modes de culture alors employés.
Pour ce côté de l’histoire économique, bien plus encore que pour les autres, il est donc difficile d’être renseigné, de connaître exactement la manière dont la terre était cultivée autrefois, le revenu que l’on en pouvait tirer, sa valeur et la situation sociale de ceux qui la travaillaient.
Pour le XVIe siècle, seuls les livres de comptes de quelques seigneuries ou de quelques abbayes, échappés à la destruction par le plus grand des hasards, nous fournissent de rares indications à ce sujet.
En ce qui concerne les conditions du travail, les conventions entre le propriétaire et son fermier ou son métayer, les minutes de notaires de l’époque, dont un assez grand nombre ont été fort heureusement conservées, nous apportent par les baux ruraux, des renseignements sinon complets, tout au moins suffisants pour nous édifier sur ce point. Ces minutes vont donc devenir la principale source de notre documentation, mais elles ne contiennent qu’un nombre relativement restreint de ces baux ruraux et d’actes intéressant l’exploitation du sol et l’on comprendra sans peine qu’il nous ait fallu dépouiller un nombre considérable de liasses de ces minutes pour réunir les éléments de ce travail; c’était une affaire de temps et de patience. Nous sommes arrivés, malgré tout, à relever plus de quatre cents de ces baux du règne de François Ier à celui de Louis XIII, et, chose singulière, nous avons bien vite constaté que, de tous ces baux, il n’y en avait pas deux qui fussent identiques, tellement il est vrai que l’imagination de l’homme devient fertile et ingénieuse lorsqu’il s’agit pour lui de défendre ses intérêts et d’accroître sa fortune, de sorte que, de l’un à l’autre de ces baux, l’on décrouvre toujours quelque différence dans les conditions stipulées par le bailleur: soit dans le mode de culture des terres, soit dans la composition et la possession des cheptels, dans le nombre et la nature des redevances, etc., etc.; à chaque renouvellement on enregistre quelque exigence nouvelle du propriétaire. Ce sont précisément ces différences, ces mille et un détails, qui ne sont souvent que des nuances, qui nous ont révélé peu à peu toute la vie de nos campagnes Poitevines au XVIe siècle.
Mais la rareté des documents sur la vie agricole n’est pas le seul obstacle que rencontre celui qui veut connaître les produits que l’on tirait du sol dans les siècles passés et les modes de culture par lesquels on les obtenait. Il vient se heurter encore à bien d’autres difficultés, tout d’abord aux poids et aux mesures alors en usage et qui variaient à l’infini: chaque seigneurie d’une certaine importance avait sa mesure de capacité, son boisseau, sur lequel étaient réglées les mesures de surface. Il nous a donc fallu en faire, pour la région, une étude aussi complète que possible; c’est pourquoi, en débutant, nous avons cru devoir consacrer un chapitre spécial à renseigner le lecteur sur ce point de première importance.
Autre difficulté, peut-être plus grave encore: la multiplicité des monnaies qui avaient cours au XVIe siècle et les différences que l’on constate dans le pouvoir d’achat de la Livre d’une époque à une autre de ce même XVIe siècle.
Du règne de Charles VIII à l’année 1600, la diminution de ce pouvoir d’achat peut, croyons-nous, se chiffrer de 5 à 1.
Pour parer à cette dernière difficulté et mettre le lecteur à même de transformer facilement en francs de nos jours (c’st-à-dire en francs-or d’avant-guerre) les sommes énoncées en Livres, sols et Deniers dans le cours de cette étude, nous avons reproduit en tête de ce volume un travail sur Le Pouvoir d’Achat de la Livre Tournois en Poitou du règne de Louis XI à celui de Louis XIII, que nous avions publié dans le Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest du 4e trimestre de 1922. Nous sommes ainsi, croyons-nous, dispensés d’entrer ici dans de nouveaux détails sur cette question, et il nous suffira, pour la commodité du lecteur, d’insérer le tableau ci-dessous, qui établit succintement, le Pouvoir d’Achat de la Livre sous les différents règnes aussi bien que sa Valeur Intrinsèque.
Valeur intrinsèque et Pouvoir d’Achat de la Livre Tournois en Poitou du règne de Louis XI à celui de Louis XIII .
Nous répéterons ici ce que nous disons dans le Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest, que nous n’avons pas la prétention d’avoir fixé le Pouvoir d’Achat de la Livre d’une façon mathématique pour chaque période, chose du reste impossible, mais de l’avoir seulement indiqué d’une façon suffisamment approximative pour permettre au lecteur d’établir une comparaison aussi complète que possible entre le XVIe siècle que nous allons étudier et notre époque.
On voit, par ce tableau, que le pouvoir d’achat de la livre, que nous avons fixé à 61 francs au début du règne de Louis XI était tombé à 12 francs vers l’année 1600, perdant ainsi; en moins de 150 ans, les 4 / 5 de sa valeur. Il faut, croyons-nous, en chercher tout d’abord la cause dans la diminution de la valeur intrinsèque pendant ce même temps et ensuite dans l’affaiblissement du pouvoir d’achat de l’argent lui-même, résultant de l’abondance de métaux précieux jetés sur le marché par la découverte de l’Amérique .
Quelles qu’en fussent les causes, cette diminution ininterrompue du pouvoir d’achat de la livre entraîna tout naturellement, pendant tout le cours du XVIe siècle, une augmentation parallèle et considérable du prix de toutes les marchandises qui ne pouvait que favoriser, par sa continuité, les commerçants et les agriculteurs.
Rien n’est curieux comme de suivre les minutes de notaires, des premières années du règne de François Ier aux dernières années du règne d’Henri III. On parle certainement plus souvent de milliers de Livres dans les actes et dans les contrats de la fin du règne d’Henri III, qu’il n’était question de centaines de livres dans les actes et les contrats du début du règne de François Ier, et cela, non seulement parce que le prix des immeubles et des denrées a augmenté, mais aussi parce que les transactions portent sur des quantités plus considérables, que les affaires, en Poitou, se traitent sur une plus grande échelle, que l’argent circule enfin dans des proportions jusqu’alors inconnues. Ces prix plus élevés nécessitaient en effet une circulation monétaire plus abondante, et il ne s’agit pas là, comme de nos jours, d’une inflation fiduciaire, d’une circulation de papier d’une valeur discutable, mais bien d’une circulation métallique; monnaie il est vrai plus ou moins dépréciée, si nous considérons les cours antérieurs, mais qui n’en avait pas moins une valeur certaine et positive. Aussi voit-on tous les marchands, tous les gens de finance s’enrichir et constituer des fortunes que l’on ne rencontrait pas auparavant dans notre Poitou. Les contrats de mariage, par l’augmentation ininterrompue du montant des dots, fournissent une preuve saisissante de l’accroissement des fortunes dans toutes les classes de la Société.
Les agriculteurs du Haut-Poitou ne bénéficièrent pas, dans les mêmes proportions que ceux de nos jours, de cette abondante circulation monétaire et cela parce que l’un des éléments de profit leur faisait défaut.
Au XVIe siècle en effet, dans une métairie du Haut-Poitou, si nous en exceptons le troupeau de porcs et la laine des brebis, le revenu résultant des bestiaux n’existait pour ainsi dire pas et était traité comme une quantité négligeable. Les bœufs n’étaient considérés qu’au point de vue de leur travail et les vaches qu’en raison du laitage qu’elles fournissaient pour la nourriture du métayer et de sa famille. De loin en loin, on élevait quelques veaux pour remplacer les bœufs de travail devenus trop vieux, on en faisait autant pour les vaches qui devenaient stériles, et, au point de vue de l’élevage de la race bovine, tout se bornait là. Nous nous empressons de faire remarquer que notre étude porte uniquement sur l’agriculture du Haut-Poitou et que, pour l’élevage. il en était tout autrement, nous en sommes convaincus, dans les marais du Bas-Poitou; mais, dans le Haut-Poitou, ce que nous avançons ci-dessus ne comportait que de très rares exceptions que nous ne manquerons pas de signaler du reste.
Si nos paysans du XVIe siècle ne purent s’enrichir au moyen de bénéfices réalisés sur les bestiaux, ils eurent l’occasion de se rattraper d’un autre côté et largement, par suite de l’augmentation folle qui se produisit dans le prix des céréales de Louis XI aux premières années du règne d’Henri IV. Le froment, qui ne valait que 0 fr. 10 le double décalitre au marché de Poitiers vers l’année 1480 (pour plus de commodité et pour éviter des pertes de temps, nous transformons de suite le boisseau de l’époque en double décalitre), le boisseau de froment qui ne valait, dis-je, que 2 sous en 1480, se vendait couramment 20 sous et 24 sous, vers l’année 1595, ayant ainsi décuplé.
Nous avons cru devoir nous étendre assez longuement dans cet avant-propos sur la question de la valeur intrinsèque et du pouvoir d’achat de la livre, ne comptant y revenir désormais qu’incidemment dans le cours de notre travail.
A l’aide des données fournies par les nombreux documents que nous avons pu recueillir, nous espérons pouvoir faire revivre le laboureur du XVIe siècle tel qu’il était réellement. Nous le prendrons chez lui, au milieu de ses travaux quotidiens, mais aussi dans ses rapports avec son maître, et là, au moment où il discute ses intérêts, il nous révélera peu à peu tous ses besoins, tous les détails de culture de sa métairie, en un mot l’ensemble de la vie agricole à l’époque.
L’auteur de l’une de ces «Maisons Rustiques du XVIe siècle» dont nous parlions plus haut, en nous donnant son avis sur le choix d’un fermier, va nous faire connaître comment il entrevoyait, à l’époque, «un bon laboureur».
La première page de ce manuel manque, mais l’une des pages suivantes nous apprend qu’il a été imprimé à Lyon, sous Charles IX. «Elisez un fermier entre deux âges, dit l’auteur, non
«maladif, de même pays que votre ferme; que sa femme soit
«mesnagère et ses enfants bien morigénés, qu’il n’ait ni métairie
«ni héritage proche de votre ferme, qu’il soit diligent pour ap-
«prendre le métier de rustication, point villotier ni souffreteux,
«plaideur ni tavernier, qu’il ne reçoive homme pour hôte s’il
«n’est ami de son Seigneur, que toute sa famille soit vêtue à
«profit non à plaisir. Et n’est ja besoin qu’il sache lire ni écrire
«et fasse faire par autrui registre de sa dépense, car le papier
«endure tout, aussi ne lui faites rendre compte de plus longtemps
«et de plus de choses que sa mémoire ne puisse porter. En
«temps présent les bons serviteurs sont rares, ce n’est plus
«comme autrefois.»
Et ceci était écrit et imprimé exactement en 1572! Mais, quelle que soit l’opinion de l’auteur sur les serviteurs à son époque, nous trouverons encore quelques bons et braves laboureurs en Poitou au XVIe siècle.
Nous diviserons notre travail en six chapitres:
1° Nous examinerons les différentes mesures utilisées en Poitou au XVIe siècle. A la base, figuraient la Livre, unité de poids, et le Boisseau, unité de mesures. Pour la livre, dans la partie du Poitou qui nous intéresse, il faut toujours entendre la livre dite «Livre Poids de Marc» de 16 onces correspondant à 0 kg. 489,505 de notre système métrique. Quant au boisseau, chaque abbaye, chaque chapitre, chaque seigneurie d’une certaine importance et, par suite chaque paroisse, avait le sien.
Mais déjà, au XVIe siècle, si ces différents boisseaux continuaient à servir pour lever les cens et les rentes constitués à l’époque féodale au profit des abbayes, chapitres et seigneuries auxquels ces boisseaux appartenaient, il n’en était plus de même lorsqu’il s’agissait des transactions commerciales entre habitants: là c’était généralement le boisseau de la ville la plus importante du voisinage qui était employé. Ainsi, en ce qui concerne le boisseau de Poitiers, son usage s’étendait: au nord, jusqu’au point où il rencontrait le boisseau de Châtellerault, à l’est, les boisseaux de Chauvigny et de la baronnie de Morthemer, au sud, ceux de Vivonne et de Gençay, à l’ouest enfin, les boisseaux de Mirebeau, d’Ayron et de Thénezais. Le domaine du boisseau de Poitiers formait ainsi un cercle de 20 à 30 kilomètres de diamètre. Il en était ainsi, dans des proportions variables, pour les boisseaux de Châtellerault, Chauvigny, Gençay, etc., etc. C’est là ce qu’une longue observation nous a appris et ce que, pour le Poitou, nous pouvons donner comme une règle générale. Nous verrons également que de la contenance de ces différents boisseaux découlaient toutes les mesures agraires.
2° En second lieu nous chercherons le prix des terres: terres arables, prés, vignes, etc... Nous constaterons de très sérieuses différences selon que nous nous adresserons au Châtelleraudais ou au Montmorillonnais, au Loudunais ou au pays Civraisien, etc., et il sera curieux d’en rechercher les causes. Par outre, pour l’évaluation de ces prix, nous nous heurterons à une difficulté nouvelle résultant de la diversité des charges qui grevaient alors la propriété foncière: les tailles, la dîme et les devoirs féodaux. Ceux-ci comprenaient les cens, rentes et terrages, ces derniers, les terrages, d’origine moins ancienne, croyons-nous, que les cens et les rentes et, nous ajouterons, beaucoup plus lourds pour les terres qui y étaient assujetties. Nous constaterons, en effet, et ce sera peut-être pour quelques-uns un sujet d’étonnement, combien les cens et rentes stipulés payables en argent, étaient devenus charge légère dès le début du XVIe siècle.
Mais la partie la plus intéressante de ce second chapitre consistera dans l’étude de la transformation que nous verrons se produire dans la possession du sol, transformation résultant d’un groupement des parcelles de faible étendue pour aider à constituer la plupart des grands domaines qui existent de nos jours en Poitou. Ce sont ces grandes exploitations agricoles, ces grands domaines dont le propriétaire possède la pleine et entière jouissance, que nous opposerons volontiers à l’ancien domaine ecclésiastique ou seigneurial émietté pour la presque totalité en tenures, sur lesquelles le Seigneur ne conservait qu’une sorte de souveraineté purement théorique attestée par les cens et les rentes, ce sont, dis-je, ces grandes exploitations agricoles, dont on constate la première et puissante éclosion aux XVe et au XVIe siècles en Poitou. Cette transformation, bien peu d’auteurs l’ont signalée jusqu’ici pour notre région.
3° Notre troisième chapitre abordera l’agriculture proprement dite, en traitant de la culture des céréales, froment, seigle, méteil, orge, avoine, et aussi de la culture de nombreux mélanges de grains, que nous ne soupçonnons plus aujourd’hui et qui étaient alors utilisés pour former les moutures de toute sorte dont était fait le pain des paysans, et même celui d’une bonne partie des habitants des villes, car le pain de pur froment était un objet de luxe en Poitou au XVIe siècle, et nous ajouterons qu’il le demeura jusqu’au milieu du siècle dernier. Nous ferons suivre un aperçu du prix des grains de Louis XI à Louis XIII et nous constaterons que le froment était alors, et de beaucoup, la plus chère de toutes les denrées. La culture de la vigne et celle des prairies complètera ce. troisième chapitre. Avec la culture de la vigne, nous examinerons celle des arbres fruitiers, très nombreux alors dans le Haut-Poitou et dont la récolte fournissait un appoint appréciable pour l’alimentation.
Les prairies formaient une catégorie spéciale dans la propriété foncière. Dans les baux elles faisaient toujours l’objet d’une réserve; le propriétaire en conservait la jouissance exclusive et les rares parcelles qu’il abandonnait à son métayer ou à son fermier, il les lui octroyait comme une grâce et une faveur toute particulière.
4° L’exploitation du sol au moyen du fermage et du métayage formera notre quatrième chapitre. Nous chercherons l’origine du métayage en Poitou, et point ne sera besoin, selon nous, de remonter très haut dans les siècles passés.
Nous avions essayé de faire de ces deux modes d’exploitation, le métayage et le fermage, deux chapitres différents, ce qui serait indispensable à l’époque actuelle, mais nous les avons trouvés, au XVIe siècle, tellement confondus l’un dans l’autre qu’il nous a fallu y renoncer. Les deux points les plus importants de ce chapitre seront l’étude de la situation à l’époque, du métayer et du fermier, situation qui différait complètement de ce qu’elle est aujourd’hui, et, en second lieu, la question des cheptels. Un autre point, secondaire si l’on veut, mais qui n’en a pas moins son importance parce que aujourd’hui très controversé dans notre région du Poitou, attirera notre attention: c’est la question des redevances ou menus suffrages. Ces redevances formaient autrefois une partie assez importante du revenu d’une métairie et nous aurons, par là même, à les étudier (assez longuement.
5° Nous arrivons dans le cinquième chapitre au paysan propriétaire, à la petite propriété, si répandue au XVIe siècle, dans tout le Haut-Poitou, à l’encontre de l’idée que l’on s’en fait généralement aujourd’hui. Nous étudierons, dans ce même chapitre, le paysan en tant qu’ouvrier agricole ou journalier, qui est toujours désigné, dans les actes de l’époque, sous le nom de «laboureur à bras», par opposition avec le «laboureur à bœufs», qui était le métayer ou le fermier et le «laboureur», sans aucune épithète, qui indiquait le paysan propriétaire, généralement qualifié de nos jours dans les actes poitevins de Propriétaire Cultivateur. Ces remarques sont le fruit de longues observations dans la lecture des manuscrits de nos archives poitevines, et nous ajouterons que cette règle ne comportait que de très rares exceptions.
6° Le sixième chapitre ne sera que la conclusion de notre travail. Il contiendra un coup d’œil d’ensemble sur l’agriculture et les classes paysannes dans le Haut-Poitou au XVIe siècle. Nous essaierons d’établir, avec impartialité, une comparaison entre ces paysans du temps de François Ier, d’Henri II, de Charles IX, d’Henri III, et ceux de nos jours.
Tel est notre programme. Son exécution, facilitée par les nombreux documents dont nous disposons , nous permettra, nous l’espérons du moins, de faire revivre un Poitou agricole jusqu’ici peu connu.
En terminant cet avant-propos, nous insisterons de nouveau sur ce point que cette étude ne vise que le Haut-Poitou. Les indications qu’elle contient, les renseignements qu’elle fournit, les prix des terres, des bestiaux, des grains, des denrées de toute nature qu’elle enregistre ne seraient probablement plus exacts si on les appliquait aux autres provinces, voire même quelquefois, à cette autre partie du Poitou connue sous le nom de Bas-Poitou.
Chacune des provinces de l’ancienne France avait ses coutumes, ses moeurs, ses besoins, avec en plus son climat et par suite ses productions. Les difficultés de transport étaient un obstacle presque insurmontable aux communications de province à province, sans parler des ordonnances royales et, plus tard, des décisions des intendants qui venaient, de temps en temps, les interdire complètement; de telle sorte que l’abondance de récolte qui se produisait dans l’une d’elle ne pouvait parer que très imparfaitement, et quelquefois pas du tout, à la disette qui régnait dans telle autre. Dans ces conditions, l’on s’expliquera facilement que ce qui est vrai pour le Poitou, puisse bien ne pas l’être pour la Touraine et le Berry et moins encore pour l’Orléanais et l’Ile-de-France.
Nous n’avons donc écrit que pour le Poitou, voire même, au point de vue agricole, pour le Haut-Poitou seulement. Là se borne toute notre ambition.