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Chapitre VIII

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VIII. Quand on a surmonté la cime altière du Taurus, du versant occidental de la montagne on voit se dérouler, à droite, les vastes campagnes de la Cilicie ; à gauche, la verte Isaurie, également fertile en vignobles et en moissons. Le Calycadne, fleuve navigable, partage en deux cette dernière province. Deux villes, entre cent autres, en font l’ornement : Séleucie, fondée par le roi Séleucus, et Claudiopolis, colonie de l’empereur Claude. Isaure, jadis trop puissante, et sur laquelle de sanglantes révoltes ont appelé la destruction, aujourd’hui montre à peine çà et là quelques vestiges de son ancienne grandeur.

La Cilicie, déjà fière d’être arrosée par le Cydnus, compte encore parmi ses titres de gloire Tarse, si digne d’attirer les regards ; Tarse, incertaine si elle doit le jour à Persée, fils de Jupiter et de Danaé, ou à Sandan, noble et riche personnage venu d’Éthiopie ; Anazarbe, dont le nom rappelle celui de son fondateur ; et Mopsueste, séjour de Mopsus, compagnon des Argonautes, qui, séparé fortuitement de l’expédition comme elle revenait chargée de la dépouille dorée du bélier de Colchos, trouva sur la rive d’Afrique une fin prématurée. Depuis ce jour les mânes du héros, sous le sable punique qui le couvre, manifestent une vertu curative qu’on invoque rarement sans effet. Ces deux provinces, durant la guerre des pirates, firent cause commune avec ces brigands, furent domptées par le proconsul Servilius, et assujetties au tribut. Séparés du monde oriental par le mont Amanus, leurs territoires réunis n’occupent qu’une longue bande, formant saillie sur le littoral du continent. L’Orient est borné dans un autre sens par une large zone qui se prolonge en ligne directe du cours de l’Euphrate à la vallée du Nil, resserrée à gauche par les régions que parcourent les hordes sarrasines, et battue à droite par la mer. Cette contrée fut conquise et considérablement étendue par Séleucus Nicator, à qui échut le domaine propre des rois de Perse dans le partage de la succession d’Alexandre. Génie actif, et non moins heureux, comme l’indique son surnom, ce prince sut mettre à profit les intervalles de tranquillité de son long règne, et employer les milliers de bras qu’ils laissaient disponibles, à transformer les chétives demeures d’une population rustique en villes fortes et opulentes. Sous les noms grecs que leur imposa le fondateur, ces cités de nouvelle création conservent encore de vieilles dénominations assyriennes, qui perpétuent la tradition de leur origine.

Après l’Osdroène, que nous avons exceptée de cette description, vient la Comagène, qu’on appelle aujourd’hui Euphratensis. Le sol de cette province forme un plateau peu élevé, où l’on remarque deux villes importantes et renommées : Hiérapolis, qui est l’ancien Ninus, et Samosate. De là s’étendent les magnifiques plaines de la Syrie, célèbre par Antioche, sa métropole, qui est sans rivale par les richesses de son sol et par celles qu’y fait affluer le commerce ; célèbre encore par les villes de Laodicée, d’Apamée et de Séleucie, toutes trois florissantes dès leur origine, et qui n’ont pas dégénéré.

Vient ensuite la Phénicie, qui s’appuie au mont Liban ; pays charmant, d’un aspect enchanteur, et qu’embellissent encore de puissantes et splendides cités. Tyr, Sidon et Béryte brillent au milieu d’elles par les délices de leur séjour et l’éclat de leurs souvenirs ; mais sans effacer Émesse ni Damas, leurs aînées. Toutes ces provinces sont arrosées par l’Oronte au cours sinueux, qui côtoie le mont Cassius, et se jette dans la mer Parthénienne. Elles formaient une dépendance de la couronne d’Arménie ; mais Pompée, après avoir abattu Tigrane, opéra leur réunion à l’empire.

La Palestine, district le plus reculé de la Syrie, offre par intervalles de spacieuses vallées, d’une belle et riche culture. Elle a aussi ses villes d’élite, dont chacune serait en droit de disputer la prééminence, ou plutôt qui semblent toutes avoir passé sous un niveau. Telles sont Césarée, bâtie par Hérode en l’honneur de l’empereur Auguste ; Eleuthéropolis et Néapolis ; sans oublier Ascalon et Gaza, construites dans les siècles passés. On ne rencontre en ce pays aucun fleuve navigable ; mais il abonde en eaux thermales, considérées comme spécifique pour toutes sortes de maux. C’est encore là une conquête de Pompée, qui, après avoir dompté les Juifs, réduisit le pays en province romaine sous l’autorité d’un gouverneur.

L’Arabie touche d’un côté à la Palestine, et, de l’autre, au pays des Nabathéens. C’est un pays riche en denrées d’exportation ; et, pour le protéger contre les incursions des peuplades voisines, la politique vigilante des anciens possesseurs y a élevé nombre de châteaux et de forteresses, en choisissant avec discernement les meilleurs points de défense. On y compte aussi des villes considérables ceintes de fortes murailles, telles que Bostra, Gérasa et Philadelphie. L’empereur Trajan, durant son heureuse et brillante expédition contre les Parthes, donna plus d’une sévère leçon à l’orgueil des Arabes, et, finalement, soumit le pays à nos lois, après l’avoir constitué en province romaine, et lui avoir donné un gouverneur.

Un large bras de mer sépare l’île de Chypre du continent. Elle a d’excellents ports, et compte un grand nombre de villes municipales. Les plus renommées sont Salamine et Paphos, l’une par le culte de Jupiter, l’autre par son temple consacré à Vénus. Toutes choses y abondent à ce point que l’île, avec ses ressources propres et locales, et sans rien tirer du sol ni de l’industrie d’autres contrées, peut construire un navire de charge, de la quille à l’extrémité de la mâture, et le mettre à la mer muni de tous ses agrès. En s’emparant de ce pays, je ne crains pas de le dire, Rome a montré plus d’avidité que d’esprit de justice. Ptolémée, qui y régnait, avait pour lui notre alliance, la foi des traités. Proscrit sans qu’on eût un seul reproche à lui faire, et uniquement parce que notre trésor avait des besoins, ce prince termine volontairement ses jours par le poison et voilà l’île rendue tributaire, comme on fait d’un ennemi vaincu, et ses dépouilles trausportées à Rome sur les vaisseaux de Caton. Mais reprenons l’ordre des faits.

Histoire de l'Empire Romain: Res gestae: La période romaine de 353 à 378 ap. J.-C.

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