Читать книгу Histoire de l'Empire Romain: Res gestae: La période romaine de 353 à 378 ap. J.-C. - Ammien Marcellin - Страница 7
Chapitre IV
Оглавление[14,4] IV. D’un autre côté, les Sarrasins, que je ne nous souhaite ni pour amis ni pour ennemis, se montraient soudain, tantôt sur un point tantôt sur un autre, déprédateurs rapides de tout ce qui se trouvait sur leur chemin, et pareils au milan ravisseur, qui fond sur sa proie d’aussi haut qu’il la découvre ; également prompt à disparaître, soit qu’il ait pu la saisir, ou qu’il ait manqué son coup. J’ai déjà parlé des habitudes de ce peuple en traçant l’histoire de l’empereur Marc-Aurèle et de quelques-uns des règnes suivants : j’en dirai encore deux mots. Répandue sur une région qui s’étend depuis l’Assyrie jusqu’aux cataractes du Nil et aux confins du pays des Blemmyes, cette race a même physionomie partout. Tous sont guerriers d’instinct, vont à demi nus, n’ayant pour tout vêtement qu’une courte casaque bigarrée, et changent continuellement de place, en paix comme en guerre, à l’aide de leurs coursiers agiles et de leurs maigres chameaux. Pas une main chez eux ne touche la charrue, ne cultive une plante, ne demande la subsistance de l’homme à la terre. Tout ce peuple erre indéfiniment dans de vastes solitudes, sans foyer, sans assiette fixe, et sans loi. Aucun ciel, aucun sol n’a de quoi l’arrêter longtemps. L’émigration est sa vie là, l’union de l’homme et de la femme n’est qu’un contrat de louage : pour toute forme matrimoniale, l’épouse, fiancée à prix fait et à temps, apporte, en manière de dot, une lance et une tente à son mari, se tenant prête, le terme expiré, à le quitter au moindre signe. On ne saurait dire avec quelle fureur, dans cette nation, les deux sexes s’abandonnent à l’amour. L’existence y est si mobile, qu’une femme se marie en un lieu, accouche dans un autre, et élève ses enfants loin de là, sans avoir, un moment, pris domicile. Ils se nourrissent universellement de venaison, de lait que leurs bestiaux fournissent en abondance, de plusieurs sortes d’herbes, dont leur sol offre une grande variété, et, quand ils peuvent, d’oiseaux pris au piège. Presque tous ceux que nous avons vus ignoraient l’usage du pain et du vin. C’est assez parler de cette nation dangereuse ; reprenons notre récit.