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IV

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J’aurais voulu que M. Amédée de Margerie insistât d’une façon plus particulière sur cette situation. Elle donne à son livre le caractère élevé d’une œuvre accomplie en vue de répondre aux besoins les plus légitimes et les plus critiques de notre temps.

Il faut le reconnaître: c’est aujourd’hui, c’est à l’heure où nous sommes, que le dix-neuvième siècle subit sa crise décisive.

Le vrai jour du péril pour un peuple n’est point celui où l’insurrection s’arme et descend soutenir la lutte de la rue. Il est permis à un penseur d’interroger ce jour-là l’état moral de la nation, et de prononcer à l’avance, avec une certitude infaillible, qu’avant d’avoir bien éclaté, la révolte est déjà vaincue. Aucun désordre matériel, en effet, ne saurait se perpétuer ni se répandre, dès qu’il vient se heurter à un ordre moral bien établi.

Ce ne sont pas là les crises véritables, celles dont un peuple pourrait dater, à bon droit, son affaiblissement et sa décadence.

Il y a des moments plus terribles dans la vie des nations.

Ce sont ceux où les idées mêmes qui forment le fond du sens commun et de la moralité publique se trouvent tout d’un coup, par je ne sais quel accord tacite, mises en discussion et en péril par ceux qui ont le don de se faire lire.

Alors la machine sociale continue dans la pratique sa marche régulière, grâce à la force d’impulsion qu’elle a reçue et qu’elle conserve; mais, avec le temps et à la longue, cette campagne entreprise contre les principes, et par conséquent contre les vertus que ces principes sont faits pour assurer, cet effort à l’encontre de la direction suivie par la confiance naïve de tout un peuple, finit par déterminer un ralentissement et par marquer un temps d’arrêt. La contagion du doute menace de se répandre, et le mal devient plus facile à ceux que la vérité laisse plus indifférents ou que l’erreur trouve plus dociles.

Cette heure de transition, de dangers imminents et pourtant capables encore d’être conjurés, est le moment où le philosophe se sent des obligations plus étroites et des devoirs plus impérieux.

Lorsque le doute aura pris le temps de descendre des sommets intellectuels où il se discute encore jusqu’aux régions inférieures où on ne fait plus que l’accepter, qui sait si, par malheur, ce ne sera pas peine perdue que d’instituer une discussion pour des intelligences incapables de la suivre ou indignes d’en profiter?

Je serais bien fâché d’être mis, par qui que ce fût, au rang de ces hommes moroses, épouvantés, injustes, qui semblent se donner à plaisir la mission de sonner sans cesse la cloche d’alarme. Je ne dis ni ne donne à entendre que nous soyons arrivés encore à ce moment suprême et terrible où le sens commun serait mis en discussion et en péril; mais il ne faudrait pas non plus nous fier avec trop de sécurité à la solidité et à la justesse de l’esprit français. Tant de plumes éloquentes et passionnées ne sauraient continuer impunément à défendre et à propager dans l’ordre moral les doctrines du matérialisme. Le peuple qui, semblable à un enfant, écoute toujours ce qui se dit ou ce qui s’écrit, sans le plus souvent en avoir l’air, finirait par croire à son tour qu’il n’y a plus ni Dieu, ni création, ni Providence. Soyez-en sûrs, il traduirait bientôt à son usage cette métaphysique nouvelle, en affirmant qu’il n’y a plus ni obligation, ni autorité, ni devoir.

La Science de la Foi

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